Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

Accueil > Grands thèmes d’histoire locale > Cartulaires, chartriers et pouillés > Cartulaire de l’église d’Angoulême > 1120 - Cartulaire de l’église d’Angoulême - Terre de Bouchereau (...)

1120 - Cartulaire de l’église d’Angoulême - Terre de Bouchereau à Macqueville (17)

vendredi 23 mars 2007, par Pierre, 8650 visites.

Cartulaire de l’église d’Angoulême (1652 pour la rédaction du cartulaire)
Source : Bulletin et Mémoires de la Société Archéologique et Historique de la Charente
année 1899

Deux documents (le premier de date inconnue, antérieure à 1120, le second de 1120)

Avec un commentaire détaillé de la 2ème charte par A. Esmein.
Source : Bulletin et Mémoires de la Société Archéologique et Historique de la Charente - année 1901-1902.

Macqueville (17) - Logis de Bouchereau (bourg Charel), fief de la famille Charel
Photo : Pierre Collenot - 2003

CVI - DE TERRA MANCUVILLA.

Texte Commentaire
Convenientia de terra Mancuvilla [1] quam commendaverunt canonici Sancti Petri, Ramnulfo Charel per balliam [2], in tali convenientia ut in terra illa mansionem faciat, cum clusello, et in ipsa maneat, sicut homo qui dominicus est seniori suo. Canonici commendaverunt ei de terra illa, ut habeat, unum quarterium de vinea et très sextairadas [3] de terra et decimam de annona et de vino et milz et paniz et geissas et lentillas et carbas et linos et terciam partem dels gatgios, si canonici absolvere noluerint illum qui dederit gatgium. Et hoc placito fecerunt canonici in tali convenientia cum Ramnulfo, ut ullus de suis parentibus hanc balliam requirere non valeat, per nullum rectum, nisi filius suus legitimus de muliere qui caballarius esse noluerit et terram aedificare fideliter voluerit et in ea habitare. Juravit Ramnulfus sacramentum super altare Sancti Stephani [4], ut hanc balliam fideliter teneat. Canonicus qui hanc terram in obedientiam tenuerit, Ramnulfus ei fideliter serviat, et si unum ex servientibus suis mittere voluerint cum Ramnulfo, placeat ei et adjuvet eum in omnibus fldeliter. Les chanoines d’Angoulême confient à Raoul Charel l’administration de leur terre de Macqueville. Il y aura sa demeure et son clos, comme représentant le chapitre propriétaire, aura un quartier de vigne, trois sesterées de terre, la dîme du blé, du vin, du mil, des panais, gesses, lentilles, chanvres, lins et un tiers des fermes. Cette condition passera à son fils légitime, seul, si celui-ci la préfère au métier des armes. Il relèvera du chanoine délégué du chapitre qui ne pourra lui imposer aucun serviteur sans son agrément. (Date inconnue.)

CXLVIII - DE MACOVILLA.

Texte Commentaire
Nos canonici engolimenses notum fieri volumus presentibus et futuris quod controversia erat inter nos et Charelens [5], G. Chareu scilicet et Iterium, nepotem ejus, et fratres suos et Fulconem alium nepotem ejus et suos et G. alium nepotem et suos de prepositura terras sancti Petri de Mancovilla. Dicebant enim se in terra illa preposituram habere los milz et panit et geisas et lentillas et carbas et lina et terciam partem de gatgiis, si canonici absolvere noluissent illum qui gatgium dare deberet, et in vino undecimam partem et tercium refol, et ista satis recognoscebamus. Sed illi addebant se similiter habere in agrariis nostris solagium [6] et collum et balaium [7] ; sed nos dicebamus eos in agrariis nichil habere nisi undecimam partem fantum, sicut in vino. Et de is omnibus supradictis talem concordiam facimus : Damus Iterio Chareu, in feodum, decimam partem in agrariis et undecimam et tercium refol in vino et los milz et panit et geisas et lentillas et carbas et lina et terciam partem de gatgiis, si canonici absolvere noluerint illum qui gatgium dare deberet, et unum denarium in unoquoque carterio vinearum dum vineae in terra illa fuerint. Habebant autem in feodo quamdam particulam ejusdem terrae in qua erant nogerii. Illos autem nogerios et illam partem terrae concesserunt ut esset sancti Petri et nostra, sicut tota alia, retento ibidem feodo, eodem modo quo in alia terra habebant, nobis concedentibus. Concessitque Iterius Chareus ut canonico qui hanc terram in obedientiam tenuerit fideliter serviat et oneste, ut dominum suum hospitetur et procuret et quando canonico placuerit, ut servientem suum mittat, eum recipiat et fldeliter in omnibus adjuvet. Hac autem facta concordia, fecit Iterius Chareus nobis hominium et fidelitates pro feodo isto et sacramentum. Conceserunt etiam nobis ut in terra ista vineas plantare facerent. Hoc iterum nobis concesserunt quod pars illa hujus terrae, quae sine herede est, in potestate sit canonicorum, ut vel ipsi, si eis placuerit, colant, vel quibus placuerit colendum tribuant. Propterea habebamus nogerios in terra proprios quos concessimus Iterio et aliis pro duodecim denariis, in singulis annis, in festivitate sancti Michaelis. Si vero, praeter istos, alii orti fuerint vel complantati, nostri erunt sine parte illorum. De pratis quidem quae habebamus concesserunt nobis similiter duos solidos in eadem festivitate. Huic concordiae interfuerunt Arnaudus Ponchat sacrista, in cujus manu fecit hominium Iterius Chareus, ad commoditatem illorum qui tune in aecclesia erant et aliorum qui venturi erant, G. de Narcac, abbas Blanziaci, Julius, Poncius et allii plures.
† Iterii Chareu. † Guilelmi Chareu. † Johannis Chareu. † Ramnulfî Chareu. † Arnaldi Chareu. † Guillelmi Charel. † Geraldi Chareu. † Fulconis Chareu. † Petri, clerici. Chareu, clerici.
Concordat entre la famille Charel et les chanoines de Saint-Pierre d’Angoulême, au sujet de la prévôté de Macqueville. (1120-1160.)

D’autres termes fournis par le Cartulaire intéressent non seulement l’histoire de la langue, mais aussi celle des institutions et du droit.

...

Dans une pièce du XIIe siècle… est exposé le différend qui existait quant à la terre de Mancovilla entre les chanoines de Saint-Pierre et les nombreux représentants de la famille Chareu ou Charel. Ces derniers prétendaient avoir sur ladite terre des droits seigneuriaux qu’ils qualifiaient droits de prévôté, praepositura, et qui étaient divers et nombreux. C’étaient d’abord la dime du mil des panais, des gesses, des lentilles, du chanvre, du lin ; de plus le tiers des amendes gagées dont les chanoines (qui évidemment avaient la justice en ce lieu), ne voudraient pas faire remise ; enfin des droits sur le vin et les céréales, en parties reconnus, et en partie contestés. C’est sur ces derniers droits que je veux m’arrêter un instant. Voici le texte en ce qui les concerne :
« Dicebant enim se in terra illa praeposituram habere... et in vino undecimam partem et tercium refol, et ista satis recognoscebamus. Sed illi addebant se similiter habere in agrariis nostris solagium et collum et balaium ; sed nos dicebamus eos in agrariis nihil habere nisi undecimam partem tantum sicut in vino » .

On remarquera cette forme particulière de la dime du vin et des céréales qui en fait non plus la dixième partie, mais l’onzième partie du tout. Il y a d’autres exemples de ce mode de calcul. Il repose peut-être sur cette idée qu’alors celui qui subit la dime conserve dix fois plus que celui-ci qui la perçoit ; celle-ci est donc égale à la dizième partie de ce qui reste au décimé. Peut-être aussi, dans l’hypothèse, cela permettait-il aux chanoines, représentant l’Eglise, une fois l’onzième prélevé, de lever à leur profit, selon l’usage, le dixième de ce qui restait.

Quant aux autres droits sur les grains ou sur le vin, il est moins aisé de les identifier.

Pour le vin, les prétendants réclament, outre la undecima pars, le tercium refol. Il me paraît probable que refol veut dire refoulure ; ce serait alors ce qu’on obtient après avoir foulé ou pressé deux fois la vendange, en la foulant ou en pressant une troisième fois [8].

Quant aux droits sur les céréales qui s’ajoutent à la undecima pars, c’est-à-dire le solagium, le collum et le balaium, ils doivent être du même genre, mutatis mutandis ; ils doivent porter sur des résidus. Il résulte d’un texte cité dans Du Cange, que le solagium était un jus arie [9] ; cela peut faire entrevoir en quoi il consistait. Aria, en effet, signifie air [10] (et non pas aire qui vient d’atrium). Cela doit faire allusion au procédé traditionnel employé jadis pour vanner le blé. On le ventait (comme on disait en Charente), en le jetant au vent au moyen d’une large pelle de bois. Le grain retombait d’un côté et les balles de l’autre ; mais à l’extrême bord du cercle formé par la masse des grains retombés se plaçaient naturellement des grains imparfaitement dégagés de la balle ; ce sont peut-être ceux-là qui faisaient l’objet du solagium. Le balagium ou balaium paraît bien désigner quelque chose d’analogue, les fragments d’épis ou autres déchets que l’on balaie en dehors du cercle plus haut indiqué [11]. Enfin le collum fait allusion aux transport des sacs de blé à dos d’homme [12] ; c’était un droit (mais lequel ?) qui s’y rattachait.


[1Macqueville, aujourd’hui commune du canton de Matha en Charente-Inférieure.

[2Ballia : administration. De là Bajulus : baile, baillif.(Du Cange.)

[3Mesure agraire, sesterée. (Du Cange.)

[4Saint-Etienne est encore le vocable de l’église de Macqueville

[5Famille Charel, nombreuse et importante du pays de Macqueville.

[6Solagge, sorte de grain (du Cange).

[7Balais (du Cange).

[8On trouve bien dans le Dictionnaire de l’ancienne langue française de Godefroy, un mot analogue, Revolin, qui a le sens très net de reste ou résidu ; voici l’un des exemples cités : a au lieu de blé le grand moulin meult la paille et le révolein ». Mais, en parlant du vin, le sens que je donne au mot refol paraît tout naturel.

[9Du Cange, v° solagium agrarium. Cart. Matiscon, f° 220, v° : « Bernardus Blancus verpivit dictae ecclesiae jus ariae quod vulgo solagium vocant. »

[10Diez, Etymol Worterbuch, I, v° Aria.

[11Du Cange, v° balagium « Tributi species in bladis » ; addition de Carpentier : « Rectius, purgamenta frumenti quae scopis colliguntur. seu frumentum quod in infima parte remanet atque a decima eximitur. »

[12Du Cange, v° collum (addition des Bénédictins) : « Apud Stephanotum in Antiquit. Pict Habebit hominem qui explectabit ad collum nemus de Brodis ad omnia necessaria domus suae ». Cf. Godefroy Dictionnaire v° Collée, ce que l’on peut porter sur le col.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Se connecter
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Lien hypertexte

(Si votre message se réfère à un article publié sur le Web, ou à une page fournissant plus d’informations, vous pouvez indiquer ci-après le titre de la page et son adresse.)

Ajouter un document

Rechercher dans le site

Un conseil : Pour obtenir le meilleur résultat, mettez le mot ou les mots entre guillemets [exemple : "mot"]. Cette méthode vaut également pour tous les moteurs de recherche sur internet.