Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

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1199 - L’île de Ré est envahie par les daims : charte de Raoul de Mauléon

mardi 4 août 2009, par Pierre, 861 visites.

L’île de Ré est envahie par les daims et les cerfs, à tel point que les habitants songent à abandonner leur île où les champs de blé et les vignes sont ravagés. Raoul de Mauléon leur octroie exceptionnellement le droit de chasse sur ces animaux, moyennant redevance, bien sûr.

Source : Bibliothèque de l’Ecole des Chartes - Paris - 1858 - Books Google

1199 - Les habitants de l’Ile de Ré et les cerfs du sire de Mauléon

(Charte de l’année 1199.)

Le droit de chasse qu’un grand nombre de seigneurs s’étaient réservé, non-seulement sur leurs propriétés immédiates, mais encore sur les terres de leurs vassaux et de leurs tenanciers, entraînait des abus monstrueux, contre lesquels les populations réclamèrent souvent, et dont elles obtinrent quelquefois l’abolition à prix d’argent. Les dégâts commis par les chasseurs étaient un des moindres inconvénients des garennes ouvertes.

D’effroyables ravages étaient causés par le gibier, qui, réservé pour les plaisirs d’un seul, se multipliait dans des proportions inouïes. Les travaux agricoles se trouvaient arrêtés, et les campagnes menaçaient de devenir incultes et désertes.

On trouve à cet égard de curieux renseignements dans un acte inédit, dont l’original est déposé aux Archives de l’empire, sous le n° R. 1262, et qui mérite de fixer l’attention à différents titres. C’est une charte-partie, endentée à gauche ; elle était munie autrefois d’un sceau pendant ; il ne reste plus que les lacs formés par un de ces cordonnets de soie ouvragés, qu’on ne retrouve plus passé les premières années du treizième siècle, et qui donnent une idée avantageuse de la textrine au moyen âge.

Ce document, qui est de l’an 1199, apprend que les habitants de l’Ile de Ré avaient résolu d’abandonner leur île par suite des tribulations que leur faisaient subir les daims, et qui étaient arrivées à ce point qu’ils ne pouvaient ni recueillir leurs moissons ni faire leurs vendanges. L’abbé de Notre-Dame de Ré vint, accompagné des habitants éplorés, supplier le sire de Mauléon, seigneur de l’île, de renoncer à son droit de chasse ; ce que Raoul de Mauléon, de l’avis de sa femme Alix , de son fils Savari et de sa fille Eustachie, leur accorda gracieusement, pour le salut de son âme, et moyennant le payement de dix sous par chaque quartier de vigne, et de pareille somme pour chaque setier de terre. Il s’engagea à ne souffrir dans l’île d’autre gibier que les lièvres et les lapins.

A cette faveur il en joignit une autre spéciale à l’abbaye de Chasteliers, nom que portait aussi l’abbaye de Notre-Dame de Ré ; il promit de n’élever aucune forteresse ou autre construction militaire sur une éminence située près du monastère. Notre charte permet aussi de faire une addition à la liste des abbés de l’île de Ré, telle que l’ont donnée les auteurs du Gallia christiana [1]. Les bénédictins passent subitement de l’abbé Jean, en 1190, à un abbé qui vivait en 1440. L’abbé qui porta au sire de Mauléon la demande des habitants de Ré s’appelait Alphonse. C’était, selon toute vraisemblance, le successeur immédiat de Jean.

In nomine sancte et individue Trinitatis, Dei omnipotentis, Patris et Filii et Spiritus Sancti. Ego Radulphus de Mauleum, cum consensu et voluntate uxoris mec Aalid, et filii mei, Salvarici, et filie mee, Eutachie, pro salute anime mee, et parentum meorum omnium, qui fuerunt ante me et post me futuri sunt, dedi venationem meam, dammas scilicet de Re, eo videlicet quod terra periclitaretur earum infestatione. Tanta quidem erat earum persecutio, ut hommes conspirarent fugere de insula, et insulam dimittere desertam ; inde siquidem quia, neque de agris poterant segetes colligere, neque de vineis vindemiam. Horum gratia, Alfonsus, tunc temporis abbas de Re, una cum conventu suo, una cum omni terre populo, supplici devotione pioque affectu me petierunt, quatinus terre susciperem redemptionem, secundum quod unusquisque tam in vineis quam in terris poterat habere ; ita ut, et de singulis vinearum quarteriis unusquisque decem solidos preberet, et de singulis terre sextariis, eque X.

Ad quorum utilem, piam et devotam petitionem, ego R. una cum uxore mea Aalid, et filio meo S. et filia mea Eustachia, cum consilio nichilominus militum et amicorum meorum, consulendo nostre et illorum utilitati, assensum prebui et integram terre et populo libertatem dedi, ne de cetero talia silvestria preter cuniculos et lepores in insula habeantur, per que terra a sua ubertate valeat deperire. Quicumque igitur hanc meam pro Deo donationem, et terre libertatem aliqua presumtione irrumpere vel perturbare attemptaverit, primo, quicquid nobis collatum est, volumus, precipimus, et optamus, ut persolvat illis qui sua nobis dederunt vel heredibus eorum ; inde ut iram et indignationem Dei omnipotentis incurrat, et in die judicii dampnationem ; postremo, quod intenderit agere contra meam donationem, obstantibus omnibus fidelibus, ad effectum non deducat, nec obtineat. Que enim patres voluerunt inviolata et integra permanere, filii vel nepotes non debent destruere nec sua audacia perturbare. Preterea volumus et auctoritate premissa ex parte Dei omnipotentis et nostra prohibemus ne in mota que monasterio nostro de Castellariis adjacet vicina, ulla rnunicio fiat vel aliquid aliud quod illi monasterio possit esse dampno vel ulli impedimento.

Hec pro anima nostra donamus monasterio et volumus ut a filiis nostris eternaliter observetur.

Actum anno ab incarnatione Domini M° CXC° IX°, in manu Alfonsi, tunc temporis abbatis de Re, et Willelmi Guarmitelli, capellani Sancti Martini, et Hugonis de Nualiaco, et P. de Voluria et Renaldo Guiano militum, et Willelmi de Vitre, senescalci et prepositi de Re, et aliorum plurimorum.

Emile Campardon.


[1T. II, p. 1403.

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