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1763 - Description de l’Aunis et glossaire des sauniers et des marais salants (30 mots)

vendredi 16 avril 2010, par Pierre, 853 visites.

Cette présentation de l’Aunis est particulièrement intéressante : une description et une histoire sommaire de la province et surtout un glossaire très détaillé (30 mots) du métier de saunier, des outils et des différentes parties des marais salants. Les mots du glossaire sont indiqués en gras. Un document passionnant. En revanche, on n’est pas tenu de retenir la définition donnée du caractère des natifs de la province d’Aunis, "spirituels, polis, actifs & laborieux. Mais il n’en est pas de même de ceux qui habitent à la campagne ou le long des côtes : ceux-ci sont moins actifs & moins laborieux, on les accuse même d’être grossiers & paresseux." C’était en 1763.

Source : Dictionnaire géographique, historique et politique des Gaules et de la France - Article ’Aunis’ - Par l’abbé Jean-Joseph Expilly - Avignon - 1763 - Google Books

Voir aussi : Livre de marais et muid de bosse : les mesures des sauniers

AUNIS, Alnisium ou Tractus Alnetensis, Pays & Province (dont la Rochelle est la capitale située entre le 16e. degré 27. minutes & le 17e. degré 5. minutes de longitude, & entre le 45e degré 53. minutes & le 46e. degré 23. minutes de latitude ; bornée au N. par le Poitou , au S. par le Brouageais & la Saintonge , à l’E. encore par la Saintonge, & à l’O. par l’Océan. Cette Province a 9. lieues & un tiers de longueur & environ autant de largeur ; ce qui peut être évalué à 48. lieues quarrées. La Sevre ou Seure, la Charente & la Vendie sont les principales rivières qui arrosent ce pays. Le climat y est fort tempéré & en général assez sain. Mais le long des côtes, au Nord & au Sud , il y a quantité de marais qui occasionnent en été beaucoup de maladies, & principalement dans les mois d’Août, de Septembre & d’Octobre. A l’exception des contrées marécageuses, le terroir de cette Province est fort sec & peut-être même un peu trop. On y recueille néanmoins beaucoup de bled & beaucoup de vin. Les fruits, les légumes, le bois & les pâturages y abondent également. Le gibier & le poisson y sont aussi fort communs. On y fait quantité de sel dans les marais salans, & on estime que c’est le meilleur de l’Europe pour conserver la viande ou le poisson. Celui que l’on fait dans les pays plus chauds, est trop mordant ; & celui que l’on tire des pays moins tempérés, ne l’est pas assez.

Dans le pays d’Aunis, pour faire le sel on choisit dans les marais un terrein bas ; & après en avoir examiné le fond , on creuse au-dessus de la basse mer, en observant de pratiquer divers compartiments. Les terres qu’on tire de ces marais, forment les chaussées. Le premier réservoir du marais s’appelle Jas , & il est séparé de la mer par une petite digue de terre revêtue de pierres sèches. A un certain endroit de la digue, il y a une ouverture qui se nomme Varaigne , & qui se ferme avec une vertelle comme une bonde d’étang. On ouvre la Varaigne aux grandes marées de Mars, & c’est par-là que l’eau de la mer s’introduit dans les Jas. Quand la mer vient à baisser, on ferme la Varaigne, & on retient par ce moyen les Jas pleins d’eau. Cette eau se communique par des tuyaux de bois aux réservoirs ou conches . Moins il y a d’eau dans les conches, plutôt elle s’échauffe. L’eau qui entre de la mer par la varaigne dans les Jas, passe des jas dans les conches par le moyen d’un gros mât percé ; & après avoir parcouru quatre fois la longueur de la conche en divers sens, cette eau entre dans ce qu’on appelle le Mort , par un canal de bois qu’on nomme Ame d’eau . Le Mort est terminé par un Bossis ou élévation de terre, sur lequel on jette le sel & où l’on en forme de gros tas qu’on nomme Vaches de sel quand ils sont longs, & Pilots quand ils sont ronds. Du Mort l’eau passe dans la table, qui est un réservoir où on laisse échauffer cette eau avant que de la faire entrer dans ce que l’on appelle les Méans , où on l’introduit par les Pertuis . Ces pertuis sont des planchettes enfoncées dans le sol du marais , & percées de plusieurs trous que l’on bouche avec autant de chevilles. Lorsque l’eau commence à manquer dans les méans ou muans, on tire les chevilles les plus hautes, & ainsi de degré en degré jusqu’à ce qu’il soit entré une quantité d’eau suffisante. Le Méan ou Muan est un cinquième réservoir de vingt-deux pieds de large, divisé d’espace en espace par de petites chaussées de terre qu’on appelle Croisées . On laisse l’eau dans ces Méans, jusqu’à ce que le temps soit propre à faire du sel. Alors on la distribue dans les aires par les brassaux & par les bouches d’aires, jusqu’à la hauteur de deux pouces. Ces brassaux sont de petites rigoles pratiquées entre deux aires, & qui servent à faire passer l’eau des méans dans les aires par les bouches qu’on y fait avec la palette. Ces bouches se coupent obliquement sur la croix simple qui sépare les deux aires, & on les referme aussitôt après qu’on y a introduit l’eau.

Les aires ou foyers font des quarrés de quinze, seize, dix-sept ou dix-huit pieds, dans lesquels se forme le sel. Le nombre de ces quarrés dépend de l’étendue du marais. Quand il y a deux doubles rangs d’aires avec des méans entre-deux, on appelle ces marais, Marais à champ double .

Tous les petits chemins, ainsi que les chaussées de ces marais ont leur nom particulier. On appelle Vettes les deux chemins qui bordent les tables du côté des aires. L’Anternau est la petite chaussée qui sépare les méans d’avec les aires. La Vie ou Vée est la chaussée qui sépare les deux rangs d’aires, & sur laquelle on met égoutter le sel qu’on tire des aires par petits monceaux appelles pilots. Ce chemin est un peu plus large que les autres. Les Croix sont les chemins qui traversent & divisent les aires. Le Lignon est le double rang de quarrés pratiqués d’un bout à l’autre du marais. Le demi-Lignon est un rang de quarrés simples.

On compte la valeur & le revenu des marais par Livres. La Livre de marais est composée de vingt aires. Chaque Livre produit par an six livres de revenu, le fort portant le foible.

L’eau de la mer ayant été introduite dans les aires, le soleil & le vent de Nord-Est ou de Nord-Ouest agissent sur cette eau qui est déjà fort échauffée : de sorte qu’en trois ou quatre heures de temps, le fond des aires rougit & il s’élève une écume sur l’eau. Sous cette écume, qui se dissipe insensiblement, se forme un voile mince composé de petits quarrés. Ces quarrés sont autant de grains de sel qui commencent à se former, & qui restent sur la surface de l’eau, jusqu’à ce qu’on brise le voile. Ce voile, qui est une espece de glace, étant brisé, se précipite au fond. Pour avoir du sel très-blanc, il faut enlever ce voile, comme on fait quand on écrème du lait. Dans ce moment, le sel sent si fort la violette, que cette fleur elle-même n’est pas plus sensible ni plus agréable.

Quand les Sauniers veulent tirer du sel pour l’entasser, ils rompent chaque jour le voile , dont il a été parlé, le brassent dans les aires, & font de manière que les grains se joignent, se réunissent & se grossissent. Ensuite ils tirent le sel sur la levée où ils le mettent en vache ou en pilot. Pour avoir du sel plus blanc & plus net, les Sauniers observent de ne pas laisser convertir en sel toute l’eau qui est dans l’aire. Cette précaution est d’ailleurs nécessaire pour accélérer la besogne, attendu que l’eau qui reste sert de ferment pour dissiper l’eau nouvelle qu’on introduit dans les aires, & l’oblige à se convertir plutôt en sel.

Les noms des outils dont les Sauniers se servent pour former leurs marais, les raccommoder & en tirer le sel, méritent que nous en donnions ici l’explication. La Bogue , le Bouquet , & la Ferrée servent à enlever les boues qui se sont amassees pendant l’hiver, à couper les terres inutiles, & enfin à dresser les marais quand on en construit de nouveaux. L’ Etole , dont le manche est appellé Simoche , sert aussi à tirer la boue quand on lime le marais. La planche de l’étole a environ deux pieds de longueur sur six pouces de largeur. La Palette sert à couper les bouches d’aires. Le Roable est destiné à tirer le sel sur la vée ou levée. L’usage du Surucon est le même que celui du roable, mais le premier de ces instruments ne sert que pour tirer la fleur de sel , qu’on nomme Sel blanc . Les Essageoires servent à prendre le sel sur la vée & à le charger dans le panier porte-sel, avec lequel il est porté sur les bossis.

Au reste, ainsi que l’hiver n’est pas propre pour faire le sel, de même en été les temps pluvieux ou nébuleux sont très-contraires à cette besogne. Pour l’exécuter avec succès, il faut absolument un temps sec, chaud & décidément beau. Si, pendant l’opération, il survient de la pluye, tout est gâté. Alors on est obligé de recommencer le travail, & avant toute chose de faire écouler l’eau douce. Mais les Sauniers ne s’exposent pas imprudemment. Comme ils connoissent aussi-bien que les marins, quelle est la variété de la saison & du temps & quelle est aussi sa fiabilité, ils attendent pour commencer leur opération que le temps leur paroisse propre à la consommer. Nonobstant cette attention de leur part, ils se trompent quelquefois, mais cela arrive rarement. Outre le bled , le vin , le sel, le gibier, la volaille & le poisson, le pays d’Aunis fournit encore quantité de bétail, & les habitants de ce pays en font un commerce considérable, aussi-bien que de leurs eaux-de-vie.

Quant au génie & au caractère, on remarque que les habitants des villes de la Province d’Aunis sont spirituels, polis, actifs & laborieux. Mais il n’en est pas de même de ceux qui habitent à la campagne ou le long des côtes : ceux-ci sont moins actifs & moins laborieux, on les accuse même d’être grossiers & paresseux. Au reste, ils sont les uns & les autres, bons soldats & fort entendus dans le commerce.

Tout le pays d’Aunis est du Diocese & de la Généralité de la Rochelle, & du Parlement de Paris. La Justice se rend dans cette Province conformément à la coutume particulière qui fut rédigée. & réformée par les trois États du pays, assemblés à la Rochelle, le 26. de Septembre 1614.

Le Gouvernement général militaire du pays d’Aunis & dépendances, comprend, outre l’Aunis, les isles de Ré, d’Oleron , d’Aix, &c. Mais le Gouvernement particulier de Brouage, qui en dépendoit aussi, a été réuni au Gouvernement général de Saintonge & Angoumois.

Le pays d’Aunis est un démembrement de la Saintonge, qui faisoit elle-même autrefois partie du Poitou. Voyez Saintonge & Poitou.

Du temps de César, l’Aunis étoit habité par une partie des Santones. Sous Honorius, ce pays étoit compris dans la seconde Aquitaine.

De la domination des Romains, l’Aunis passa sous celle des Goths. Ces derniers en furent chassés par Clovis I. après la bataille de Voclade ou Vouillé, donnée l’an 507, Depuis ce temps, le fort du pays d’Aunis fut attaché à celui de la Province de Saintonge. Mais la Terre des Aulnes, qui a donné son nom au pays, eut des Seigneurs particuliers de la Maison de Mauleon ; & c’est sur ces Seigneurs que Guillaume X., dernier Duc d’Aquitaine & Comte de Poitou, mort en 1137., usurpa l’Aunis qui, dès ce temps, commençoit à porter un nom distinctif. En 1152. ce pays passa aux Anglois avec le reste de la Guyenne, par le mariage d’Eléonor, Duchesse de Guyenne, avec Henri II., Roi d’Angleterre.

Pendant les guerres presque continuelles du douzième & du treizième siecle, que les François soutinrent contre les Anglois, l’Aunis, ainsi que la Saintonge & le Poitou, fut souvent pris & repris. Mais alors l’Aunis ne formoit point une Province particulière comme à présent, & il étoit partagé entre les deux Provinces voisines que nous venons de nommer, & dont il faisoit partie.

Louis VIII., Roi de France, se rendit maître de la Rochelle eu 1224. ; mais nous ignorons si le District que ce Prince forma de cette ville & des Paroisses qui en dépendoient, portoit le nom de pays d’Aunis.

Les successeurs de Louis VIII. conserverent la Rochelle jusqu’en 1360., que, par le Traité de Bretigny, cette ville fut cédée aux Anglois avec trois millions d’écus d’or pour la rançon du Roi Jean, qui avoit été fait prisonnier à la bataille de Poitiers, le lundi 19. de Septembre 1356.

En 1371. les Rochellois se donnèrent au Roi de France, Charles V., qui leur accorda de si beaux privilèges, que dès lors leur ville parut prendre la forme de République. La Rochelle se conserva dans cette espece de Gouvernement jusqu’au temps des troubles de Religion, arrivés dans le seizieme siecle. Les habitants de cette ville voulurent alors se rendre absolument indépendans. Ils se révoltèrent en i568., & se déclarèrent pour le parti Protestant. Le Duc d’Anjou (Henri III.) assiégea la Rochelle pour le Roi Charles IX., son frère, en 1573., le 11. Février ; mais le 24. Juin de la même année, ce Prince empressé d’aller prendre possession du Royaume de Pologne, auquel il avoit été élu, termina le siege de cette ville, & fit avec les Rochellois un Traité par lequel ces derniers demeurèrent maîtres absolus de leur ville. Depuis ce temps la Rochelle se maintint dans l’indépendance jusqu’en 1628. qu’après un siege de treize mois, l’un des plus fameux dont parle l’Histoire, le Roi Louis XIII. força les Rochellois à se soumettre & à le reconnoître pour leur légitime Souverain. Voyez la Rochelle.

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