Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

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1789 - La noblesse de Saintonge et d’Aunis prépare les États-généraux

mercredi 27 février 2008, par Pierre, 2445 visites.

De décembre 1788 à fin mars 1789 : la préparation des Etats Généraux par la noblesse locale, racontée par le baron de la Morinerie.

Voir la liste des nobles convoqués pour les assemblées préparatoires

Source : La noblesse de Saintonge et d’Aunis convoquée pour les Etats-Généraux de 1789 - Léon-Aubebert de la Morinerie. - Paris - 1861 - Books Google.

APERÇU HISTORIQUE

3 août 1788 Le 3 août 1788, Louis XVI ordonne la convocation des États-Généraux et fixe leur ouverture au 1er mai suivant.

Les deux provinces réunies de Saintonge et d’Aunis, formant un pays d’élection sous le titre de généralité de la Rochelle, étaient à cette époque administrées par M. de Reverseaux.
Une question d’un intérêt considérable préoccupait les esprits : celle des États Provinciaux mis à l’ordre du jour depuis l’édit de juin 1787. Le Poitou avait déjà essayé de ce nouveau mode d’organisation administrative. La Guyenne manifestait la prétention d’accaparer le territoire saintongeais pour la formation de ses États particuliers. Toutefois l’attitude du pays était calme ; l’intendant se félicitait tout haut de la tranquillité de son département au milieu des agitations qui bouleversaient plusieurs provinces du royaume. C’était de sa part une étrange illusion ; il allait bientôt s’en apercevoir. A la surface de cette tranquillité factice, on sentait les frémissements d’un trouble intérieur : l’orage n’était pas loin.
Sur ces entrefaites, le comte de la Tour du Pin est nommé commandant en chef de la Saintonge, de l’Aunis et du Poitou : on le sait partisan des idées nouvelles. L’heure semble favorable pour une manifestation. Du sein de la Noblesse part le signal de la croisade en faveur de la réforme administrative. A son appel, une réunion des principaux habitants est indiquée pour le 20 décembre ; elle doit avoir lieu à l’hôtel de ville de Saintes. Le maire, Gaudriaud, qui est aussi le subdélégué de l’intendant, n’a pu s’y opposer.

20 décembre 1788 Le jour de l’Assemblée, c’est un gentilhomme — M. de Richier, croyons-nous — qui le premier prend la parole : il vient demander l’affranchissement de la Saintonge, assujettie aux volontés d’un intendant. Ce que veut le pays, ce qu’il réclame aujourd’hui, c’est le droit de s’administrer lui-même, de voter ses impôts, de vivre de sa vie propre. Qu’il sollicite donc de Sa Majesté son érection en États particuliers sur le modèle de la constitution du Dauphiné, le type des organisations provinciales. Le moment est venu. M. de la Tour du Pin se prêtera de grand cœur à toutes les démarches qui auront pour but un tel objet.

On adopte la motion au milieu des cris et des applaudissements ; on vote une adresse à M. de la Tour du Pin ; on nomme des commissaires pour préparer les listes de convocation dans chaque Ordre : la Noblesse choisit le vicomte de Turpin, le comte de Mornac et le comte Pierre de Bremond d’Ars.

Le commandant réalise les espérances de l’Assemblée ; il lui donne l’autorisation de se réunir pour discuter et formuler librement son vœu.
31 décembre 1788 La seconde séance s’ouvre le dernier jour de l’année 1788. L’Assemblée conclut en définitive à refuser toute incorporation avec la Guyenne et à inviter les villes de Saint-Jean-d’Angely et de la Rochelle à faire cause commune avec Saintes pour la formation d’États Provinciaux comprenant toute la généralité. Le duc de la Rochefoucauld est spécialement prié de s’entendre à ce sujet avec le sénéchal d’Aunis.

Mais la réunion du 31 décembre n’est, à proprement dire, que préparatoire ; la discussion a été renvoyée au 5 février 1789, jour fixé pour la grande séance. D’ici là on attend la réponse de Saint-Jean-d’Angely et de la Rochelle ; on se prépare à la lutte contre l’administration aux abois ; on imprime des lettres de convocation, afin de donner à l’Assemblée future l’éclat et la solennité du nombre.

Voici un spécimen de la circulaire envoyée à cette occasion à chacun des membres de la Noblesse.
Nous avons pris soin de respecter la typographie de ce document et de noter en italiques les mots écrits dans notre exemplaire :

Monsieur

En conséquence de la délibération prise à l’Assemblée, tenue par les trois Ordres, dans la Salle de la Maison commune de la Ville de Saintes, le 31 décembre dernier, sous l’autorisation de MR : le Comte de la TOUR-DU-PIN, Commandant en Chef dans la Province, vous êtes invité, au nom des trois Ordres de la Ville, à vous trouver à Saintes pour assister à l’Assemblée Générale de la Province, qui aura lieu le Jeudi 5 du mois de Février prochain, à deux heures de relevée, pour délibérer sur l’avantage qu’il peut y avoir à obtenir de la bonté du Roi des États Provinciaux pour la Saintonge.

Nous avons l’honneur d’être,

Monsieur

Vos très-humbles et très-obéissans Serviteurs,

Le Victe de Turpin. le Cte de Bremond d’Ars.

Commissaires de la NOBLESSE.

Saintes, ce 12 Janvier 1789.

P. S. Veuillez bien que cette Lettre vous soit commune avec ceux de MM. les Gentils-Hommes, vos voisins, dont nous n’avons pu connoitre l’adresse [1].


24 janvier 1789 Le 24 janvier paraît une lettre de Sa Majesté avec un règlement à la suite, qui détermine le mode des convocations aux États-Généraux, divise le royaume en deux classes de bailliages ou sénéchaussées : les bailliages principaux, qui ont député directement aux États de 1614, adoptés pour base, et les bailliages secondaires, qui n’avaient pas alors la direction directe ; établit la forme des Assemblées et fixe les droits des électeurs.

Dans le tableau général inséré à la fin du règlement, les sénéchaussées de Saintonge et de la Rochelle sont classées de la manière suivante :

Le règlement contenait, à l’égard de la Noblesse, un grand nombre de dispositions dont nous rapporterons les plus saillantes.

Ainsi il fixait l’âge électoral à 25 ans ; il divisait les gentilshommes en deux catégories : ceux possédant fiefs, et ceux n’en possédant pas. Les premiers étaient directement assignés par le sénéchal, pour se rendre en personne à l’Assemblée principale de la sénéchaussée ou s’y faire représenter par un procureur pris dans leur Ordre ; les seconds ne recevaient point d’assignation ; ils devaient comparaître en personne et n’avaient pas le pouvoir de se faire représenter. Le règlement accordait la faculté aux gentilshommes possesseurs de fiefs dans plusieurs sénéchaussées d’assister par procureur à l’Assemblée de chacune de ces sénéchaussées, mais ne leur attribuait, toutefois, qu’un seul suffrage dans la même Assemblée, quel que fut le nombre de leurs fiefs. Il autorisait les femmes possédant divisément, les filles et les veuves, ainsi que les mineurs jouissant de la noblesse et détenteurs de fiefs nobles, à se faire représenter par des procureurs. La présidence de l’Assemblée des trois Ordres était dévolue au sénéchal ou à son lieutenant. Les comparants devaient jurer par serment de procéder fidèlement à la rédaction des cahiers de doléances et à la nomination des députés. Quant aux réunions particulières de la Noblesse, était appelé à les présider, soit le sénéchal, soit le président dont l’Ordre aurait fait choix. Le sénéchal, assisté de quatre gentilshommes, décidait des difficultés qui pourraient survenir à l’égard des qualifications et des justifications nobiliaires.

5 février 1789

Saintes

Arrive le 5 février. La ville de Saintes se pavoise le matin et s’illumine le soir, comme un jour de fête. La réunion a lieu au Palais-Royal, à trois heures de l’après-midi ; elle est présidée par M. le Berthon de Bonnemie, le lieutenant général de la sénéchaussée, qui compte 34 ans de services éminents dans cette charge élevée, que son père avait lui-même exercée plus de 30 ans avec honneur. Chacun des Ordres a élu son président : la Noblesse, M. le marquis d’Aiguières, lieutenant des maréchaux de France ; le Clergé, M. de Laage, doyen du chapitre, et le Tiers, M. Garnier, avocat du roi. On vote par acclamation l’érection de la Saintonge en États Provinciaux ; la Noblesse et le Clergé font spontanément l’abandon de leurs privilèges dans la répartition de l’impôt et consentent au doublement du Tiers. Le vote individuel, au lieu du vote par Ordre, amène seul quelques débats aplanis par des concessions mutuelles.

En résumé, après trois jours de séances, les trois Ordres ont pris les résolutions suivantes :
- 1° Qu’ils refusaient toute incorporation avec les États de Guienne, dont la constitution ne conviendrait à la province, sous aucun rapport ;
- 2° Qu’il sera adressé au Roi une supplique du procès-verbal contenant répétition des instances que forme la Saintonge pour n’être pas comprise dans les États de Guienne, laquelle supplique serait seulement signée par les commissaires nommés hier (le 6] par les trois Ordres, savoir : pour le Clergé, par MM. l’abbé de la Magdelaine, l’abbé Delord, Bonnerot et l’abbé de Beauregard ; pour la Noblesse, par MM. le vicomte de Turpin, le comte de Bremond d’Ars, le comte de Livenne et le comte de Mornac ; pour le Tiers, par MM. Lemercier, de Fonremis aîné, Guenon , Grégoireau, Choloux, Ratier, Roussard et Garéché ;
- 3° Que l’Aunis et la partie du Bas Angoumois qui se trouve comprise dans la généralité de la Rochelle seront invités de se rendre au désir unanime qu’a formé la province de Saintonge de les voir se réunir à elle pour ne former qu’un seul corps d’État ;
- 4° Que pour la correspondance et autres opérations qui seraient une suite et dépendance de la présente Assemblée dont le chef-lieu sera cette capitale, seront employés pour commissaires, savoir : pour le Clergé, MM. l’abbé de la Magdelaine, Delord, Bonnerot et Guillebot ; pour la Noblesse, MM. de Livenne, de Turpin, de Bremond d’Ars et de Mornac ; pour le Tiers, MM. Garnier, Lemercier, de
Fonremis aîné, Guenon, Chesnier-Duchaine, Bernard des Jeusines, Grégoireau et Charrier père ;
- 5° Que le procès-verbal sera imprimé par extraits et exemplaires envoyés à Mr le garde des sceaux de France, à Mr le directeur général des finances, à Mr de Villedeuil, ministre ayant le département de la province, à M. le comte de la Tour du Pin, commandant en chef, qui sera prié de mettre l’extrait dudit procès-verbal et la supplique qui y sera jointe sous les yeux de Sa Majesté ; à M. le duc de la Rochefoucauld, qui sera prié de l’appuyer de son crédit ; à Mgr l’évêque de Saintes ; aux municipalités de l’Aunis, du Bas Angoumois et autres qu’il appartiendra.

Fait et arrêté sur les 8 heures, et ont tous les membres signé : etc., etc. »

A leur sortie de l’Assemblée, les trois Ordres trouvèrent les portes de l’hôtel de ville ornées de rubans et de guirlandes de fleurs.

6 février 1789

Saintes

Le lendemain, un Te Deum fut chanté dans la cathédrale, au milieu d’un immense concours de la population.

Comme on le pense bien, de semblables réunions, qui « mettaient la plus grande chaleur dans les esprits », n’étaient pas vues d’un bon œil par l’intendant. Celui-ci en porta plainte au garde des sceaux : « Ces assemblées illégitimes et sans objet, écrivait-il le 18 février, ont été autorisées par M. de la Tour du Pin, commandant de la province, qui ne m’en a point prévenu, quoiqu’il demeurât à sa terre de Tesson, à deux lieues de ma résidence. Il est venu passer à Saintes tout le temps qu’a duré l’assemblée qui a eu lieu dans cette ville. On s’est permis partout les déclamations les plus extravagantes et les plus dénuées de fondement contre l’administration actuelle ; tous ceux qui y tiennent ont été injuriés et maltraités à Saintes, notamment sous les yeux du commandant en chef... »

C’était principalement dans les rangs du Tiers que ces agitations se faisaient sentir. De tous côtés, les subdélégués de M. de Reversaux étaient insultés, chassés même des réunions comme suspects : ainsi, à Saintes, Gaudriaud ; à Barbezieux, Lamaurine ; à la Rochelle, Savary et Orceau [2].

Dès le mois de janvier, Saint-Jean-d’Angely avait refusé de s’unir à Saintes pour la formation des États particuliers de la province.

Peu de temps après, la Rochelle se décida à rejeter les propositions d’union qui lui avaient été adressées par l’intermédiaire du duc de la Rochefoucauld.

Marennes eut la velléité de s’isoler pareillement.

22 janvier 1789 Le 22 janvier, l’intendant écrivait au garde des sceaux, au sujet de ces dissentiments : « Je dois vous avertir de ce qui se passe à Saint- Jean... la demande de Saintes... n’a pas été accueillie... on est fortement décidé à ne pas vouloir se réunir à Saintes et à faire de l’élection de Saint-Jean une portion séparée... l’élection de Marennes ne veut point de réunion, parce qu’elle forme un pays abonné… »

Marennes se crut de plus autorisée à réclamer par l’organe d’un des personnages les plus influents du pays, M. le baron de Saint-Dizant, rentrée de son syndic aux États-Généraux pour défendre ses propres intérêts et présenter ses doléances. Voici une lettre curieuse écrite à cette occasion au ministre, M. de Villedeuil, par M. de Saint-Dizant :

13 février 1789 Ile d’Oleron, ce 13 février 1789.

En me rappelant à l’honneur de votre souvenir, oserai-je vous prier, comme ministre de la province de Saintonge que j’habite, de me permettre de vous (faire) observer qu’à tous les États-Généraux qu’il y a eu dans la monarchie, indépendamment des députés de la province, il y a toujours assisté un syndic général du pays dénommé le pays abonné de Saintonge, composé de 32 paroisses dépendantes des gouvernements de Brouage, île d’Oleron, Marennes et île d’Arvert de ladite province, en vertu des privilèges de cette contrée accordés par tous nos rois pour l’intérêt des salines de ce précieux pays, tant dans celui du souverain, de l’état, du commerce, que de leurs seigneurs et propriétaires. Moi-même, Monseigneur, j’ai été député il y a 20 ans à Paris pour un grand objet d’intérêt concernant cette administration où j’eus le bonheur de contribuer entièrement à l’avantage commun. C’est au roi à nommer le syndic général agréé par la province ; il se prend ordinairement parmi les gentilshommes du lieu, seigneurs de terres dans la localité, instruits des intérêts que je viens d’avoir l’honneur de vous exposer : ce qui est d’une conséquence encore plus importante à l’Assemblée des États-Généraux du royaume.

Voilà, Monsieur, mon observation que je prends la liberté de vous faire, comme à un bon ministre qui m’a témoigné souvent de l’amitié.

J’ai l’honneur, etc.
Le Baron DE ST : DIZANT.

Il y eut discussion au conseil d’État sur cette demande : elle ne fut pas admise [3].
Marennes finit par voter avec Saintes.

La publication du règlement royal s’effectua dans toute l’étendue de la sénéchaussée, le 20 février. Les jours suivants, l’Ordre de la Noblesse se réunit pour préparer son cahier de doléances, en vue de l’Assemblée du 16 mars. Son premier acte, renouvelé de la séance du 5 février, fut une déclaration unanime de contribuer comme le Tiers-État aux impositions foncières.

Reçu au parlement de Bordeaux dans sa charge de grand sénéchal de Saintonge dès le mois d’août 1753, le marquis de Nieuil avait négligé de se faire installer officiellement au présidial de Saintes ; son installation eut lieu à l’audience du 5 mars.

16 février 1789

Saintes

Le 16, à huit heures du matin, les trois Ordres entendent la messe du Saint-Esprit dans l’église des Dominicains ; de là ils se rendent au Palais-Royal, approprié pour la solennité.

A la droite du sénéchal se range le Clergé, à sa gauche la Noblesse, en face de lui le Tiers-État. On fait l’appel de tous les membres convoqués. Chacun de ceux qui assistent à la séance jure fidélité au roi et prête serment de procéder avec loyauté aux opérations électorales. Le sénéchal donne acte aux comparants de leur présence et prononce défaut contre les absents.

Après la lecture de la lettre et du règlement de Sa Majesté, M. de Nieuil prend pour texte de son discours les préoccupations du moment ; il passe en revue, sous toutes les formes, la situation fâcheuse du pays ; mais il lui oppose les sentiments tendres et généreux du roi à l’égard de ses peuples, et il place sa confiance dans l’union de tous les citoyens pour ramener la prospérité, pour concourir à la gloire de l’état.

Les paroles de M. de Nieuil sont vivement applaudies.

Vient le duc de la Rochefoucauld. Son discours, plein d’habileté, semble fait en vue de sa candidature à la députa ti on. Il remercie d’abord la province de la confiance qu’elle a placée en lui à toutes les époques, et récemment encore en le priant d’appuyer auprès de Sa Majesté le vœu qu’elle a présenté pour la constitution de ses États Provinciaux. U donne sur ce point les espérances les plus flatteuses ; il rend compte de l’impression favorable qu’a produite à Paris et à la Cour l’entente parfaite qui règne entre les trois Ordres. S’il est un titre dont il se fasse toujours honneur, c’est celui de gentilhomme saintongeais ; il se dévoue donc tout entier au service de ses compatriotes et à l’accomplissement de leurs vœux les plus chers.

De chaleureuses démonstrations accueillent M. de la Rochefoucauld.

Les trois Ordres se séparèrent ensuite pour élaborer dans leurs réunions particulières le grand travail des cahiers et nommer les députés.

Le corps de la Noblesse tint ses séances dans la salle d’exercice du collège, depuis le 17 mars jusqu’au 26. Son premier soin fut de composer son bureau : il choisit pour président le marquis d’Aiguières ; pour commissaires le comte de Livenne, le comte de Bremond d’Ars, le vicomte de Turpin, le vicomte de Turpin de Jouhé, le vicomte du Mesnil-Simon, le comte de Blois de Roussillon [4], et pour secrétaire le vicomte de Saint-Légier.

Immédiatement après, il envoya une députation officielle complimenter les deux autres Ordres.

17 février 1789

Saintes

La séance du 17 fut signalée par l’arrivée du baron de Bonnefoy, député de la Noblesse du Bas Angoumois, qui donna connaissance à l’Assemblée d’un mémoire dans lequel les trois Ordres de ce pays demandaient l’annexion de leur territoire aux États Provinciaux de la Saintonge.
24 février 1789

Saintes

Le 24, le cahier de la Noblesse était achevé et adopté dans son ensemble.
25 février 1789

Saintes

Le lendemain commencèrent les opérations électorales. Le choix de l’Assemblée pour ses scrutateurs tomba sur le comte de Vaudreuil et sur M. du Pérou.

Au premier tour de scrutin, aucun des gentilshommes n’ayant obtenu la majorité des suffrages, il fallut renvoyer la séance au jour suivant, à huit heures.
26 février 1789

Saintes

Le 26, le second tour du scrutin mit en balance MM. de Richier et de la Tour du Pin ; au troisième, M. de Richier l’emporta.
Le soir, à six heures, on reprit les opérations. La nomination du second député exigea un égal nombre de tours de scrutin ; c’est seulement au troisième que le comte de la Tour du Pin fut élu. Son compétiteur avait été le comte Pierre de Bremond d’Ars.
27 février 1789

Saintes

Le 27, les trois Ordres se rassemblèrent de nouveau au Palais-Royal. Dans cette seconde réunion générale, le marquis de Nieuil reçut le serment des huit députés que la sénéchaussée de Saintonge envoyait aux États du royaume. Chacun jura de remplir fidèlement le mandat qui lui avait été imposé par ses commettants.

Voici les noms des députés :
- POUR LE CLERGE. — 1° Bernard Labrousse de Beauregard, prieur-curé de Champagnolles, de l’ordre de Chancelade ; — 2° Pierre-Louis de la Rochefoucauld, évêque de Saintes.
- POUR LA NOBLESSE. — 1° Jacques-Raymond de Richier de la Rochelongchamps, demeurant à Marennes ; — 2° Jean-Frédéric, comte de la Tour du Pin-Gouvernet, lieutenant général et commandant en chef pour le roi dans les provinces de Saintonge, Aunis et Poitou.
- POUR LE TIERS. — 1° Pierre-Isaac Garesché, négociant à Marennes ; — 2° Jean-Nicolas Lemercier, conseiller du roi, président, lieutenant criminel de la sénéchaussée et siège présidial de Saintes ; — 3° Philippe Augier, négociant, demeurant à Tonnay-Charente ; — 4° Ratier, avocat, demeurant à Cercou, près Montlieu.

Un discours du sénéchal termina la séance.

Au mois d’août suivant, la Noblesse de Saintes fut de nouveau convoquée, en vertu d’un règlement de Sa Majesté en date du 27 juin, pour procéder à la révocation des mandats impératifs donnés à ses députés et pour élire des députés suppléants.

3 mars 1789

Saintes

Le 3, en l’absence du sénéchal et du lieutenant général de la sénéchaussée, c’est le lieutenant particulier, l’infortuné M. de Fonremis, qui présida la réunion [5].

Le comte de Livenne, le comte de Blois de Roussillon et le vicomte de Turpin prirent place au bureau comme scrutateurs. Les suffrages se portèrent sur le comte Pierre de Bremond d’Ars et sur le vicomte de Turpin de Jouhé. M. de Bremond d’Ars vint remplacer à l’Assemblée constituante le comte de la Tour du Pin, appelé au ministère de la guerre."

Nous avons dit plus haut que, lors de la manifestation de Saintes au sujet des États Provinciaux, Saint-Jean-d’Angely avait refusé de se réunir à la capitale de la Saintonge.

Siège d’un ressort particulier, elle entendait se constituer des États pour elle-même et pour le territoire soumis à sa juridiction.

Avant tout, c’est un sentiment de jalousie qui a dicté son refus : cette ville n’avait pas eu de députation directe aux États généraux de 1614 ; elle se trouvait par cela même occuper, dans le tableau des sénéchaussées inséré à la suite du règlement royal, un rang inférieur qui l’avait profondément humiliée.

Son mémoire au roi, dans cette circonstance, est un monument trop curieux et trop peu connu pour que nous résistions au désir de le publier en entier :

Mémoire à l’appui des droits réclamés par la sénéchaussée de Saintonge séante à Saint-Jean-d’Angely.

La sénéchaussée de Saintonge séante à Saint-Jean-d’Angely, comme la plus ancienne et la première sénéchaussée de la province, réclame le pas sur celle de Saintes.

Voici une partie de ses titres :

Depuis que les sénéchaux ont été rendus sédentaires dans leur lieu d’assises, Saint-Jean-d’Angely a toujours eu un grand sénéchal ; il y rendait constamment la justice. Suivant Maichin, en son Histoire de Saintonge, une suite de jugements par lui rendus confirme cette vérité et on trouve des actes émanés de ce grand sénéchal qui remontent à 1150. A cette époque Simon Roquier, revêtu de ce titre, donne une commission au juge-châtelain de Saintes dont la qualité seule annonce bien qu’il n’avait qu’une juridiction inférieure.

Saintes n’a pu d’ailleurs être érigée en sénéchaussée que bien longtemps après et lorsqu’elle fut conquise sur les Anglais et réunie à la France sous Charles VII, en 1458, ainsi que le rapporte Villaret, tome 40, page 495. Elle avait alors une juridiction seigneuriale appartenant aux Anglais et relevant de la sénéchaussée de Saint-Jean-d’Angely, qui a toujours été à la France. Maichin, Histoire de Saintonge, page 127, fait mention des droits du sénéchal de Saintonge sur les officiers du duc de Guienne à Saintes. Ce qui a formé la sénéchaussée de Saintes, c’est la jonction des sièges voisins depuis sa réunion à la couronne.

Rien ne prouve mieux son peu d’importance et la supériorité de Saint-Jean-d’Angely avant cette jonction, que ce qui se passa lors de la rédaction des Coutumes en 1520.
« François Ier donna à cette époque des lettres patentes nécessaires pour y procéder, et Saint-Jean y est nommé avant Saintes.

Il fut rédigé pour la première desdites villes une Coutume portée au Coutumier général et connue dans tous les auteurs sous le titre de Coutume de la sénéchaussée de Saintonge aux siège et ressort de Saint-Jean-d’Angely. Les corporations de Saintes assistèrent par commissaires à cette rédaction.

Les commissaires du Roi traversèrent Saintes pour se rendre à Bordeaux, et jugèrent sans doute son territoire trop peu important alors pour lui créer une loi particulière. Elle n’en a pas encore, et, tandis que la Coutume de Saintonge est observée et maintenue par le siège de Saint-Jean-d’Angely, celui de Saintes suit un Usage que le temps seul a consacré, et dont il demande même l’érection en loi positive.

Saint-Jean-d’Angely possède donc effectivement la plus ancienne sénéchaussée : à ce titre elle doit avoir le premier rang, quoique les diverses réunions et l’érection d’un siège épiscopal aient donné à Saintes le titre de capitale. Riom a obtenu sur Clermont l’avantage que Saint-Jean-d’Angely sollicite, et laissant à Clermont le titre de capitale, on n’a moins jugé en faveur de Riom que son droit d’aînesse lui assurait la première place.

Saint-Jean-d’Angely ayant le même avantage ne peut qu’obtenir le même succès. Cette ville a d’ailleurs député directement avant 1614, et notamment aux États de Tours en 1467, ainsi que le rapporte Savaron en sa Chronologie, page 29, édition de 1788. Elle aurait donc dû être placée dans l’état dressé pour les États actuels au rang des sénéchaussées qui ont député avant 4644, et si elle ne députa pas alors, c’est que cette ville tenait pour le prince de Condé et était un point de réunion des protestants.

Nous trouvons cette excuse finale assez singulière : la Rochelle, la ville protestante par excellence, n’a-t-elle pas eu sa députation aux États de 1614 ?

Saint-Jean-d’Angely se débat à coup de citations historiques pour prouver qu’elle avait dès le XIIe siècle la suprématie judiciaire sur sa rivale. Elle se garde bien de remonter plus haut. Dans les annales du passé, elle aurait trouvé la grande capitale des Santons, la ville romaine, Mediolanum Santonum. C’était là un droit d’aînesse autrement sérieux que les titres à la prééminence mis en avant dans le mémoire de 1789, dont l’érudition archéologique est si contestable. L’auteur de ce factum, — probablement Antoine Valentin, le maire de Saint-Jean-d’Angely, « qui prétend, au dire de M. de Reverseaux, être un des premiers écrivains du siècle [6], » — ignorait sans doute que la sénéchaussée de Saintes existait longtemps avant la reprise du territoire saintongeais par Charles VII. L’antériorité de celle de Saint-Jean-d’Angely ne nous est pas démontrée. La sigillographie vient même à l’appui de nos doutes : on connaît le sceau de la sénéchaussée de Saintes, remontant à l’année 1300 ; le plus ancien que l’on ait signalé de la sénéchaussée de Saint-Jean-d’Angely lui est postérieur : il date de 1319.

Le mémoire que nous venons de citer était accompagné d’une supplique au garde des sceaux et au directeur général des finances, revêtue des signatures de toutes les notabilités du Clergé, de la Noblesse et du Tiers-État.

Saint-Jean-d’Angely, à l’imitation de Saintes, eut son Assemblée Provinciale.

La première réunion est du mois de janvier 1789.

4 février 1789

St-J-Y

La grande séance se tint le 4 février ; elle fut présidée par M. de Bonnegens, le lieutenant général du siège. La Noblesse élut pour commissaires le marquis de Charras et le marquis de Beauchamps. On proclama l’érection de la sénéchaussée de Saint-Jean-d’Angely en États particuliers sur le modèle de ceux du Dauphiné.
7 février 1789

St-J-Y

Trois jours après, MM. de Charras et de Beauchamps, les abbés Deforis et Saint-Médard se présentèrent à l’Assemblée de Saintes et remirent sur le bureau la déclaration suivante :

_ « Nous, les représentants des trois Ordres du Clergé, de la Noblesse et du Tiers-État de la sénéchaussée de Saint-Jean-d’Angely, sommes chargés d’avoir l’honneur de vous faire connaître notre vœu.

« Quoique d’accord avec le vôtre pour la demande au roi d’États Provinciaux, il en diffère par l’organisation que nous avons arrêtée.

« Comme nous sommes, Messieurs, les représentants de 115,000 habitants qui font partie de la Saintonge sous le nom de sénéchaussée de Saint-Jean-d’Angely, nous vous demandons dans la rédaction de votre vœu de ne pas nous y comprendre, en parlant seuls pour la province de Saintonge, et de faire toujours la distraction dans vos arrétés des territoire et sénéchaussée de Saint-Jean-d’Angely.

« Nous vous demandons également, Messieurs, que le Clergé et les possesseurs de fonds dans notre territoire ne puissent pas délibérer avec vous sur ce qui regarde ce même territoire [7]. Nous protestons contre tout ce qui sera fait de contraire parmi vous au présent arrêté, dont nous vous demandons acte et consignation sur le registre de votre Assemblée.

Mr De Charras , commissaire de la Noblesse et chargé des intérêts du Tiers-État, — le Mr De Beauchamps, député de la Noblesse, — F. Jn-Bpte Deforis, député du Clergé, — St. Médard, curé de Nantillé, député du Clergé.

28 février 1789

St-J-Y

La séparation en deux parties de la province de Saintonge aussi nettement prononcée, arrivons à l’Assemblée qui a pour objet les États-Généraux.

Voici d’abord un spécimen des assignations imprimées adressées aux membres de la Noblesse :

ASSlGNATlON

aux Ecclésiastiques et Gentilshommes.

L’an mil sept cent quatre-vingt-neuf, le vingt-huit jour du mois de février, A la requête de M. le Procureur du Roi de la Sénéchaussée de Saintonge établie en la Ville de St Jean-d’Angély, pour lequel domicile est élu au Greffe dudit Siège, en vertu des Lettres du Roi, données à Versailles le 24 janvier 1789, pour la convocation et assemblée des États généraux de ce Royaume, du Règlement y joint, et de l’Ordonnance de M. le Lieutenant-général de ladite Sénéchaussée, rendue en conséquence le 20 Février de cette année, j’ai, Jean Gratiot, huissier Royal, huissier audiancier exploitant par tout le Royaume, soussigné, receu, ymatrlcullé en la sénéchaussée et siège Royal de la ville de Saint-Jean-d’Angely, demeurant en la ville dudit lieu, soussigné, donné assignation A Mre Jacque-Honoré-François de Sartres, encien mousquetaire des gardes du Roy, capitainne de cavallerie, demeurant en son château, paroisse de Vénérant, en parlant à sa personne comme seigneur dudit Vénérant, audit domlcile, en parlant à, comme dit est, à sa personne, à comparoir en personne, ou par Procureur de son Ordre, fondé de pouvoirs suffisans, pardevant M. le Bailli de lad. Sénéchaussée, et en son absence, pardevant M. son Lieutenant-Général, pour assister à l’Assemblée des Trois-états, qui sera tenue dans la Ville de St. Jean-d’Angély le 16 Mars prochain, et concourir, avec les autres Députés de son Ordre, à la rédaction des cahiers de doléances, plaintes et remontrances, et autres objets exprimés en ladite Ordonnance et procéder à la nomination des Députés qui seront envoyés aux États généraux : le tout conformément et en exécution desdites Lettres du Roi, Réglement y annexé, et ordonnance de mondit Sr le Lieutenant-général ; lui déclarant que faute de s’y trouver, ou Procureur pour lui, il sera donné défaut ; et afin qu’il n’en ignore, je lui ai, audit domlcile, en parlant comme dessus, laissé copie de mon présent exploit, et il m’a été payé 12 sous pour le coût d’icelui.

Gratiot, hr. audcier »

"Si le Bénéficier réside dans son bénéfice, l’Huissier lui donnera l’assignation en parlant à sa personne, ou à son Domestique ; s’il n’y réside pas, il laissera la copie imprimée au Régisseur ou Fermier dudit assigné.

"Et pour les Nobles possédant fiefs, l’Huissier les assignera en leur château ou chef-lieu, de la même manière que ci-dessus.

"N. B. Il faudra assigner les Commandeurs de l’Ordre de Malte dans leurs Commanderies, comme les autres Bénéficiers. »
16 mars 1789

St-J-Y

Le 16 mars, les trois Ordres se réunirent dans l’église des Dominicains, sous la présidence du lieutenant général, par suite, — est-il dit au procès-verbal, — de l’absence du bailli de la sénéchaussée, M. le marquis de Nieuil.
du 17 mars au 23 mars 1789

St-J-Y

Les sept jours suivants, du 17 au 23, furent consacrés aux réunions particulières de chaque Ordre et employés à la rédaction des cahiers. Le Clergé fit choix pour son président de Jacques Mallat, curé de Puy-du-Lac ; le Tiers-État de M. de Bonnegens. La Noblesse, retirée au chapitre de l’abbaye, procéda ainsi à la composition de son bureau : président, le marquis de Saint-Mandé ;—commissaires : le marquis de Charras, M. d’Aubenton, le vicomte de Brie, le comte de Cherisey, M. du Bois de Saint-Mandé fils, et M. de Begeon de Sainte-Mesme : — secrétaire, M. Perraudeau, le fils du célèbre jurisconsulte.
23 février 1789

St-J-Y

Le 23, l’Ordre s’occupa d’élire son député. Dès le 20, le marquis de la Baume-Pluvinel et le chevalier de Brilhac avaient été nommés scrutateurs.

Au premier tour de scrutin aucun gentilhomme n’atteignit la moitié des suffrages ; le plus grand nombre s’étaient portés sur MM. de Charras et de Beauchamps, qui luttèrent ensemble au deuxième tour. C’est le troisième qui assura le triomphe de M. de Beauchamps.

Celui-ci remercia vivement l’assemblée de l’honneur insigne qu’elle voulait bien lui faire ; il la pria, en terminant son allocution, d’avoir égard au mauvais état de sa santé et de lui adjoindre un suppléant.

Le marquis de Charras et M. de Sainte-Mesme entrèrent en lice ; tous deux obtinrent un nombre de voix égal, mais le premier avait sur son compétiteur l’avantage de l’âge, et il fut élu.
24 février 1789

St-J-Y

Le 24 eût lieu la seconde réunion des trois Ordres pour la réception du serment des députés. Voici leurs noms :
- CLERGE. — Simon Landreau, curé de la paroisse de Moragne.
- NOBLESSE. — Charles-Grégoire de Beauchamps, marquis de Beauchamps, mestre de camp de cavalerie, chevalier de Saint-Louis, seigneur de Grandfief et de Champfleuxy, demeurant à Saint-Jean-d’Angely.
- TIERS-ETAT. — 1° Jean-Joseph de Bonnegens, conseiller du roi, lieutenant général de la sénéchaussée de Saintonge séante à Saint-Jean-d’Angely, demeurant en ladite ville ;— 2° Michel-Louis-Étienne Regnaud, avocat en parlement et en la sénéchaussée de Saintonge séante à Saint-Jean-d’Angely, demeurant en ladite ville.

La lettre du duc de la Rochefoucauld à M. de Châtel-Aillon au sujet de la réunion de l’Aunis aux États de Saintonge n’avait pas eu un meilleur sort que-la demande adressée à Saint-Jean-d’Angely.

21 février 1789

27 février 1789

La Noblesse de la Rochelle, dans ses assemblées du 21 et du 27 février, déclara refuser toute annexion avec la Saintonge et vota l’établissement d’États particuliers pour l’Aunis.

Le règlement royal n’avait attribué qu’une seule députation à la province. L’Ordre de la Noblesse rédigea à cette occasion une adresse au gouvernement dans laquelle il exprimait le regret de n’avoir pas été mieux partagé, exposant qu’aux États de 1614, alors que la ville et le port de Rochefort n’existaient point, la Rochelle avait eu quatre représentants. La requête se terminait par la demande de deux députations.

Rochefort, de son côté, sollicitait avec instance la députation directe. Cette ville s’appuyait principalement sur ce qu’elle était le siège d’une justice royale.
Toutes ces réclamations demeurèrent sans effet.

16 mars 1789

Saintes

L’Assemblée générale des trois Ordres s’ouvrit le 16 mars, à 8 heures du matin, dans la grande salle du Palais-Royal, sous la présidence du sénéchal, M. de Saint-Marsault, comte de Chatel-Aillon. L’appel nominatif dura trois jours consécutifs, les 16,17 et 18.
19 mars 1789

Saintes

A partir du 19, chaque Ordre, réuni dans le local qui lui avait été assigné, prépara ses cahiers et nomma ses députés.

Les commissaires de la Noblesse furent : MM. Goguet, de Chassiron, de Chambon, Rougier, Cacqueray de Valmenier, Baudouin de la Noue, Froger et Griffon de Romagné ; les secrétaires : le vicomte de Malartic et M. de Longchamps.
26 mars 1789

Saintes

Le 26, l’Ordre arrêta définitivement son cahier, discuta les termes du mandat impératif qu’il devait remettre à son député et fit choix de M. de Malartic pour le représenter aux États-Généraux ; il nomma M. Ancelin de Saint Quentin député suppléant.
27 mars 1789

Saintes

Le 27, les trois Ordres de nouveau rassemblés, le sénéchal reçut le serment des députés, c’étaient :
- POUR LE CLERGE. — Charles-Jean-Baptiste Pinelière, prêtre, docteur en théologie, curé de la ville et paroisse de Saint-Martin, île de Ré ;
POUR LA NOBLESSE. — Ambroise-Eulalie, vicomte de Malartic, lieutenant-colonel, commandant du bataillon de garnison de Poitou, chevalier de Saint-Louis ;
POUR LE TIERS-ETAT. — 1° Pierre-Étienne-Lazare Griffon, seigneur de Romagné, des Mothez, Mezeron, Ponthezière, et autres lieux, conseiller du roi, maître ordinaire en la chambre des comptes de Paris, lieutenant général de la sénéchaussée et siège présidial de la ville et gouvernement de la Rochelle ; — 2° Charles-Jean-Marie Alquier, premier avocat du roi en la sénéchaussée et siège présidial, procureur du roi au bureau des finances, maire et colonel de la ville de la Rochelle.
11 juillet 1789 Le 11 juillet suivant, la Noblesse prononça la révocation du mandat impératif contenu dans l’instruction particulière qu’elle avait remise à M. de Malartic.

Nous n’avons point donné place dans cette ébauche à l’examen des cahiers de la Noblesse de nos provinces : une telle étude sortait du cadre étroit que nous avions adopté. Il nous suffira d’en indiquer rapidement les points principaux.

C’était le patriotisme le plus sincère, le désintéressement le plus pur qui dictaient ces larges concessions aux idées de progrès et de liberté : vote des impôts par les représentants de la nation, — égalité dans leur répartition, — suppression de la gabelle et des droits d’aides, — retour périodique des Assemblées du pays, —liberté de la presse, — abolition des lettres de cachet,— inviolabilité delà propriété, sauf pour cause d’utilité publique absolue, — nomination aux charges municipales par le suffrage des citoyens, — suppression des offices attribuant la noblesse, — droit conféré aux États Provinciaux de dresser la liste des citoyens qui, par les services rendus à l’état dans les armées, les tribunaux, les arts, l’agriculture, le commerce, les sciences, les découvertes, ont mérité la noblesse,— établissement des justices de paix, — réglementation de l’éducation nationale,—réclamation de l’état civil en faveur des protestants et leur admission aux charges publiques,— abolition du concordat, — garanties des libertés de l’Église Gallicane, — suppression des dîmes ecclésiastiques et des droits casuels, etc.

La Noblesse ne marchandait pas son concours à la grande œuvre de la régénération de la France ; elle le donnait avec cet entraînement, avec cet enthousiasme qu’elle apportait sur les champs de bataille. Ils furent en nombre considérable les gentilshommes qui se mirent à la tête du mouvement ; ce sont ceux-là que la guillotine a fauchés de préférence, côte à côte avec les plus illustres représentants de la Bourgeoisie.

Un historien de nos provinces, dont nous aimons le talent d’écrivain, — plume élégante, esprit passionné, — M. Massiou a écrit : « Ces hommes occupant le premier degré de l’échelle sociale marchaient à l’arrière de la civilisation : supérieurs par le rang aux autres classes de citoyens, ils leur étaient inférieurs en capacité, en savoir et en intelligence. »

L’ogre de la Noblesse, Dulaure, n’aurait pas mieux dit.

Quant à nous, qui admirons naïvement tout ce qui est grand, n’importe où la grandeur se trouve, qui avons des applaudissements pour les belles choses, dans toutes les régions ; — que ces belles choses viennent d’en haut, qu’elles viennent d’en bas, — qui ne comprenons pas ces systèmes préconçus, des mesquineries d’opinion, ces dénigrements de parti, les appréciations injustes nous étonnent.

En ce temps-là, au plus magnifique moment de la Révolution, c’est la Noblesse qui, sous des drapeaux différents, offrait à la France son plus puissant orateur : Mirabeau ; — son plus grand publiciste : Condorcet ; — son plus honnête homme : Malesherbes ; — son plus illustre savant : Lavoisier ; — son plus charmant poète : André Chénier ; — son champion le plus pur de la liberté : La Fayette ; — c’est elle aussi qui venait d’enfanter son plus brillant écrivain : Chateaubriand, et son plus fameux général : Bonaparte.


[1Mettons en note, pour compléter notre document, sa suscription particulière ;
A Monsieur,
Monsieur de Bonsonge chevalier de l’Ordre militaire de St-Louis.
A Marennes.

[2C’est en pleine séance du Tiers-État, le 7 mars, que fut résolue l’expulsion d’Orceau sur la proposition d’Alquier, président de l’Assemblée. Ainsi que Gaudriaud, Lamaurine et Savary, Orceau était subdélégué de l’intendant : cette qualité l’avait rendu suspect aux yeux de ses collègues du Tiers, et il fut renvoyé a comme gênant les délibérations ». C’est sur la Noblesse que M. Massiou rejette l’odieux de cette mesure.

[3La correspondance échangée entre M. le baron de Saint-Dizant et M. de Villedeuil, celle de ce ministre avec son collègue, M. de Lessart, les conclusions du conseil d’Etat se trouvent aux Archives impériales (B II. 72).

[4Nous n’avons pu savoir exactement si M. de Blois de Roussillon a rempli les fonctions de commissaire ou celles de secrétaire de l’Ordre avec M. de Saint-Légier. Le procès-verbal qui nous a servi de guide offre sur ce point de l’ambiguïté.

[5Pierre-Ignace Methez de Fonremis de la Mothe, conseiller du roi, lieutenant particulier principal de la sénéchaussée de Saintonge et présidial de Saintes. Il fut guillotiné à Rochefort, en I794.

[6Lettre du 22 janvier 1789, aux Archives impériales.

[7Aussi presque tous les gentilshommes du bailliage secondaire de Taillebourg, que le règlement incorporait dans la sénéchaussée principale de Saintes, quoique du ressort de Saint-Jean-d’Angely, se sont rendus à l’Assemblée de cette dernière ville.

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