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1845 - Notice sur la ville de Barbezieux (16)

mercredi 23 janvier 2008, par Pierre, 2332 visites.

Source : Histoire des villes de France. - Aristide Guilbert – Paris - 1845

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Barbezieux - Le château
Photo : P. Collenot - 2006

À neuf lieues de Saintes, et à l’extrémité orientale de la Saintonge, dans un excellent pays agricole, où se fait en outre un assez grand commerce, s’élève, sur le penchant d’une colline, la jolie petite ville de Barbezieux (Barbisellum), défendue autrefois par une bonne ceinture de murailles et un château fort. On y voyait deux maisons religieuses, un couvent de Cordeliers et un prieuré de l’ordre de Cluny. Le commerce du pays roulait principalement sur les grosses toiles qu’on y fabriquait en abondance, et qui avaient un facile débouché tant en France qu’en Angleterre. Depuis la révolution, Barbezieux est un des quatre chefs-lieux de sous-préfecture du département de la Charente. Sa population évaluée sous l’ancien régime à 1,200 habitants, dépasse aujourd’hui 3,000 âmes ; l’arrondissement en compte 56,077. Ses toiles sont toujours renommées, et l’on trouve dans les environs des tanneries considérables. Ces deux industries alimentent le commerce dont les autres articles les plus importants consistent en grains, truffes, volailles et bestiaux.

Nous ne savons rien sur l’origine de Barbezieux ni sur la fondation du château au pied duquel on bâtît insensiblement cette petite ville, comme un nid à l’ombre d’un roc. Longtemps avant le XIIe siècle, il y avait eu sans nul doute un village ou une bourgade du même nom ; ce domaine appartenait à une ancienne famille seigneuriale très-considérée dans le pays, sinon fort riche. Agnès, dame de la maison de Barbezieux, était abbesse du célèbre monastère de Sainte-Marie à Saintes dès l’année 1153 ; les bourgs, les villages, les domaines, les terres et les bois de l’abbaye, espèce de principauté monastique, se comptaient par centaines et s’étendaient dans toute la Saintonge et jusque dans l’Ile d’Oléron ; mais presque tous ces biens avaient été usurpés sur les bénédictines de Sainte-Marie, lorsqu’Agnès prit la crosse abbatiale. La nouvelle abbesse s’attaqua à tous les usurpateurs triompha de leur résistance par sa rare habileté, et leur imposa des restitutions ou des transactions également avantageuses pour le monastère, qui, sous sa direction spirituelle, s’éleva au plus haut point de prospérité. Ce fut elle aussi qui racheta et rendit à l’abbaye le privilège de la fabrication des monnaies, pour tout l’évêché de Saintonge, qu’elle tenait de la libéralité de son fondateur, le comte d’Anjou Geoffroy Martel. Agnès mourut en 1182.

Vers la fin de sa longue et active carrière vivait Richard de Barbezieux, poète et chevalier d’armes renommé, qui tout au contraire de l’abbesse de Saintes, ne songeait guère à agrandir ses domaines, assez médiocres, puisque l’auteur de sa vie le qualifie de pauvre Vovasseur. Le châtelain de Barbezieux ne fut assurément pas de son temps la terreur du pays ; mais ses tensons écrits en dialecte roman provençal l’entourèrent d’un éclat bien supérieur à celui des armes. Rien de plus curieux que l’histoire des vicissitudes de sa passion amoureuse pour la femme du seigneur de Tonnay-Charente. Elle exerçait une sorte de fascination sur lui par les charmes incomparables de son esprit et de sa personne, et il tremblait sous son regard « comme le poussin sous les serres du milan ». Ayant eu le malheur d’encourir sa disgrâce, il alla vivre pendant deux ans dans une cabane perdue au fond d’une forêt ; et il y serait mort si, par compassion pour son martyre, il ne s’était trouvé cent dames et cent chevaliers « s’aimant par amour » pour aller demander sa grâce à madame de Tonnay-Charente. Elle avait déclaré qu’elle ne se laisserait pas toucher à moins ; encore fallut il que les cent chevaliers et les cent dames vinssent la prier à genoux et les mains jointes. Tiberge, femme d’un autre seigneur de Barbezieux, qui paraît avoir réuni à ce domaine les terres de Chasles et de Montansier, inspira à la même époque un vif amour au fameux troubadour Bertrand de Born, seigneur de Hautefort (1182-1204).

L’histoire de la ville de Barbezieux peut se résumer en quelques mots. Henri III se replia sur cette place après la défaite de son armée à Taillebourg (1242). L’année suivante nous voyons Itier de Barbezieux désigné par Louis IX, comme un des plaiges de la trêve conclue entre lui et le roi d’Angleterre (1243). Par le traité de 1259, la ville et le territoire de Barbezieux passèrent sous la domination de Henri III. Après un silence de trois siècles, nous retrouvons le nom de cette ville mentionné par les historiens à propos de l’insurrection des Pitaux. Barbezieux appartenait alors à Charles de La Rochefoucauld, qui s efforça de la maintenir sous l’autorité du roi et y recueillit la compagnie d’ordonnance d’Henri d’Albret, gouverneur d’Aquitaine, après sa défaite par les insurgés ; mais ceux-ci ne tardèrent pas à se rendre maîtres de Barbezieux, et ce fut dans cette ville qu’ils se donnèrent pour chef Puymoreau, châtelain du pays et le proclamèrent couronnal de Saintonge. En 1562, les protestants pillèrent la vieille basilique dédiée à saint Matthieu, et mirent en pièces le chef de cet apôtre, pieusement conservé dans un reliquaire. Après sa défaite par Burie, lieutenant général du duc de Montpensier, le baron de Duras se replia sur Barbezieux, d’où il se dirigea vers Saintes (1562). Louis XIII, lors de son voyage à Bordeaux, passa par Barbezieux, où il fut reçu par le lieutenant général baron d’Ambleville, qui était allé au devant du roi avec un corps de cavalerie (1615).

En 1789, la juridiction de Barbezieux s’étendait sur vingt-cinq paroisses. Cette seigneurie avait passé de la maison de La Rochefoucauld dans celle de Louvois. A part le troubadour Richard de Barbezieux, dont nous venons de parler, cette ville a vu naître Èlie Vinet, l’auteur des Antiquités de Saintes et de Barbezieux, et d’un livre très-savant sur Ausonne, Solin et Pomponius Mela. [1]


[1Massiou, Histoire de la Saintonge et de l’Aunis – Raynouard, Poésies originales de trou badours - Millot Histoire littéraire des troubadours.

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