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Châtelaillon (17) par Louis-Etienne Arcère (1698-1782)

samedi 31 janvier 2009, par Pierre, 2201 visites.

Châtelaillon, ancienne capitale de l’Aunis, avant la Rochelle. La présentation de l’histoire de cette ville est aussi l’occasion de faire connaître des coutumes fort anciennes à propos des épaves des navires en perdition sur les côtes de Saintonge et d’Aunis.

Voir : Carte satellite des lieux décrits par Louis-Etienne Arcère

Source : Histoire de la ville de la Rochelle et du Pays d’Aulnis - Louis-Etienne Arcère - La Rochelle - 1754 - Books Google

Chatel-Aillon

Chatel-aillon étoit autrefois la principale Ville du pays d’Aulnis. D’anciens Procès-verbaux [1] nous la représentent comme une Place forte, entourée de remparts revêtus de maçonnerie, flanqués de tours & environnés de fossés profonds. Le Havre de cette Ville étoit de grand abord. Les Navigateurs qui passoient auprès, devoient mettre pavillon bas ; & l’on punissoit l’omission de cette cérémonie par une peine pécuniaire. Chatel-aillon n’est plus qu’un vain nom aujourd’hui, car le Village de ce nom est fort-petit, & ne se trouve pas dans l’emplacement de l’ancienne Ville que la mer a engloutie : elle subsistoit encore par ses débris au commencement de ce siecle [NDLR : au début du XVIIIe siècle.] ; mais l’Océan qui fut si fort agité par les tempêtes durant le rude hiver de 1709, lui enleva ses ruines même.

Les anciens titres [2] donnent à Chatel-aillon le nom de Castellum Alloni, Alonis, de Castrum Allioins, Castrum Allionense, & quelquefois de Castrum Juilii. Quelques-uns, selon Maichin, croient que le nom Julii ajouté à Castrum, est un nom corrompu , & qu’il faut lire Castrum Aquila, parce que c’étoit autrefois le lieu où l’on mettoit les aigles & les enseignes Romaines.

Le nom Julii, qui retrace le souvenir du plus grand Capitaine de la République Romaine, a fait croire à cet Auteur que Jules-César étoit le fondateur de Châtel-aillon, & que les Romains entretenoient une garnison dans cette Place. Il est étonnant que le docte M. Begon ait adopté comme un fait certain, une conjecture improbable. Les fastes du célèbre Vainqueur des Gaules ne nous apprennent rien de Castrum Julii, aujourd’hui Chatel-aillon ; & l’on chercheroit en vain son nom dans les anciens Recueils géographiques.

Dans une notice de l’Empire, on trouve parmi les Cités de chaque Province, les lieux désignés par le mot Castrum. Si Chatel-aillon avoit eu cette dénomination, il tiendroit sa place dans cette notice, avec les Cités de la seconde Aquitaine ; & toutefois dans l’énumération des Cités de cette Province, il n’est fait mention d’aucun Castrum.

S’il y avoit eu un camp fortifié sur les côtes de l’Océan, dans le pays des Saintongeois, sans doute César l’auroit établi, ou quelques-uns de ses Lieutenans : or il ne paroît pas qu’il soit venu en Saintonge, ni que les Légions Romaines y ayent été mises de son temps en garnison. Maître des Gaules, César distribua des troupes dans la vaste étendue de sa conquête, afin de contenir les nouveaux sujets de la République. Les quartiers & les lieux de cantonnement sont désignés ; mais il n’est fait nulle mention du pays Saintongeois.

Jules César ayant retiré des Gaules les Légions Romaines, pour commencer la guerre civile, les Saintongeois, dit Lucain, furent bien aises de l’éloignement de ces étrangers, gaudetque amoto Santonus hoste. Il ne faut pas conclure de-là qu’il y eût des Légions en garnison dans leur pays. On doit entendre ce passage, des deux Légions qui étoient dans la Touraine, & de deux autres qui résidoient dans le Limousin , limitrophe de la Saintonge,

Suivant l’établissement [3] fait par Auguste, établissement qui se maintint jusqu’au règne de Constantin , il n’y avoit dans les Gaules que deux Provinces armées, c’est-à-dire , où l’on entretînt un corps de troupes réglées ; & ces Provinces étoient la Germanique supérieure & la Germanique inférieure. Il est donc faux qu’il y eût en Saintonge & à Chatel-aillon des troupes toujours subsistantes, & que les aigles Romaines y fussent gardées.

Ce n’est pas que la lisiere de la Gaule occidentale fut absolument dénuée de gens de guerre ; mais ces Soldats ne composoient pas ces Légions qui étoient toujours sous les drapeaux, & qui se tenoient cantonnées dans une Place d’armes. La frontière maritime étoit protégée par une milice domiciliée sur la frontière même, & par des indigenes ou naturels du pays, lesquels vivoient dans leurs foyers particuliers, tels que nos Garde-côtes, & se rassembloient au premier signal. Ils sont connus dans l’Histoire, sous le nom de Milites limitanei & riparenses.

Dira-t-on qu’Auguste successeur de César, aura fondé le Castrum Julii après avoir subjugué l’Aquitaine, dont il recula les limites jusqu’aux bords de la Loire. Mais cette expédition militaire entreprise sous ses auspices, fut poussée en son absence & terminée sans lui. Le Poëte Tibulle, qui étoit à la suite de Messala, en attribue la gloire à ce Général, qui reçut les honneurs du triomphe, comme vainqueur des Peuples d’Aquitaine.

Non sine me est tibi partus honos. Tartella Pyrene
Testis & Oceani littora Santonici.

Gentis Aquitana celeber Messala triumphis. [4]

« Assez près du rivage de la mer, dit Thevet [5], se voit une grosse Tour de pierre, dite Chatel-aillon, joignant laquelle fut trouvé de mon temps des médailles antiques, & une pierre faite en ovale, de marbre blanc, contre laquelle étoient plusieurs lettres effacées, d’où l’on a tiré ces mots Castrum Julii. » La découverte dont parle Thevet, ne peut donner lieu qu’à une conjecture sans preuves. Nul détail sur ces médailles antiques. Que peut-on conclure sur-tout du témoignage du Géographe Thevet, menteur insîgne & écrivain fort ignorant ? » [6]

M. de Valois qui a percé avec tant de succès les ténèbres de la Géographie ancienne, a ignoré cette haute antiquité qu’on veut donner à Chatel-aillon.

On pourroit attribuer à Charlemagne, l’origine de ce lîeu. Ce grand Prince, selon Eghinard , fit fortifier tous les Ports de la Gaule Occidentale, pour assurer ses Etats contre les incursions des Normands. Il est donc probable qu’il étendit ses soins sur un Port qui facilitoit les descentes en Saintonge. Dans la suite, un Seigneur maître de ce Port & du Pays circonvoisin, aura reparé les anciens travaux, ou plutôt élevé un Château qu’il aura décoré de son nom. « Selon Duchesne [7], Chatel, Château, Rocher, Puy, Mont, Motte, Ferté, Bourg, sont tout pris pour forteresse, à chacune desquelles, le Seigneur qui les a le premier édifié, rétabli ou rendu signalés, a laissé son nom : de-là Chatelleraud, Chatel-achard, Chatel-aillon, Castellum Alonis » Je trouve dans l’Histoîre des Comtes de Poitou, des Seigneurs qui se nommoient Alon. Anno 995 S. Hugonis Vicecomitis. S. Alonis Fratris ejus. Et dans les Archives de l’Abbaye de Bourgueil, se voit un acte de donation qui commence ainsi, ego Alo, Alonis F, Alonisque Pater, anno 1005.

Les vestiges des fortifications que nous venons de supposer avec fondement avoir été faites par les ordres de Charlemagne, auront donné lieu de croire en des siecles peu éclairés que c’étoient des restes d’un ancien camp de César. On sait quelle étoit dans les huitième & neuvième siecles, l’ignorance des peuples. L’erreur éclose dans cet âge aura jette de profondes racines : de-là Castrum Julii, enfanté d’abord par l’ignorance, ensuite adopté par une fausse tradition, consacré enfin dans les Chartes où on le trouve quelquefois.

La Seigneurie de Chatel-aillon est une Baronnie [8] considérable, relevant immédiatement du Roi. C’étoit anciennement une terre inféodée, dépendant du Duché d’Aquitaine qui étoit le Fief dominant. On a donné quelquefois à cette Baronnie, le nom de Principauté. « Mais comme il n’y a ni titre ni inféodation de cette qualité, dit Amos Barbot, il paroît que le nom de Principauté ne lui a été donné qu’à cause de la qualité personnelle de Prince, que possedoient ceux qui en ont été les Seigneurs, & sur-tout les Ducs de Longueville ». Dans la déclaration des anciennes Seigneuries de la Maison de Longueville [9], les Princes de ce nom ont été titrés de Princes de Chatel-aillon.

Selon Besly, c’étoit l’usage des anciens Seigneurs de se qualifier Domini ou Principes.

« La Principauté de Chatel-aillon est de l’hommage du Roi, & se releve par lui par tel mot, à savoir, quand le Roi est en lieu où ledit Seigneur peut voir le Château de Chatel-aillon, ledit Prince est tenu lui dire : Sire voyez ma tour de Chatel-aillon, que je tiens avec ses appartenances, à cause de votre Couronne de France »

La manière de rendre cet hommage est un peu différente dans un titre du 22 Mars 1401, « Jean l’Archevêque, Sire de Partenai, tient & avoue tenir du Roi à cause de son Chastel, Ville & Châtellenie de la Rochelle à foi & hommage lige, & au debvoir d’un baiser pour tout debvoir de morte-main, son Chatel, Châtellenie & Ville de Chatel-aillon » [10].

Quelques-uns prétendent que les anciennes armes du Château de Chatel-aillon étoient d’azur à un Château sommé d’une tour de même à une aigle issant de geules. Quand ce fait seroit vrai, il n’en résulteroit rien en faveur des aigles Romaines, dont on a parlé ci-dessus. Il y a apparence que ces armes étoient celles des premiers Seigneurs de Chatel-aillon, ce qui me détermine à le croire, ç’est qu’en 1236 Eble de Rochefort, lequel étoit de cette Maison, portoit dans ses armes, suivant Dom Etiennot dans ses Antiquités ms. « une aigle éployée, chargée d’un lambel de quatre pendans, surmonté en chef de deux croissans ».

Les premiers Seigneurs de Chatel-aillon étoient puissans, & s’allioient avec des Princes. Fouques IV. du nom, Comte d’Anjou, sur-nommé Rechin ; c’est-à-dire, le dur, le rude, épousa en troisième noces Arengarde, fille d’Isambert de Castellion ou Castel-aillon [11]. L’illustre & ancienne Maison de Chatel-aillon s’éteignit par la mort d’Isambert au douzième siecle. Les Mauleons en qualité de parens devinrent alors Seigneurs de la Baronnie, que Savari de Mauleon en 1290 donna par engagement à Geofroi de Nuaillé, pour la somme de 3049 liv [12].

Ce Domaine passa dans la suite, dans la Maison de l’Archevêque Partenai. Guillaume de Partenai donna un aveu & dénombrement [13] de cette Terre au Prince d’Aquitaine & de Galles, Duc de Cornouaille, le 1er. jour de Juin 1363. Jean l’Archevêque, en 1401, en fit hommage à Charles VI. Ce Seigneur sous le règne du même Roi, vendit Chatel-aillon à Charles, Dauphin & Comte de Poitou, lequel en disposa en faveur d’Artus , Comte de Richemont, Connétable de France. Celui-ci devenu Duc de Bretagne, remit Chatel-aillon au Roi, & Charles VII. en fit don avec une clause de réversion, à Jean Comte de Dunois chef de la Maison de Longueville [14].

Le Comte de Dunois étant entré dans la ligue du bien public, fut dépouillé de ses biens par Louis XI. lequel en donna la jouissance au Comte du Maine son oncle. Le Traité de S. Maur, en 1465 , ayant assoupi les troubles de l’Etat, le Roi qui pardonna aux coupables, remit le Comte de Dunois en possession de la Terre de Chatel-aillon.

En 1541 le 20 Mars, Philippe Chabot, Chevalier de l’ordre du Roi, Amiral de France, Comte de Bezancois & de Charny, acheta la Baronnie de Chatel-aillon & la Seigneurie de Salles [15], de François d’Orléans Rothelin. Il faut que ce Domaine soit rentré dans la Maison de Longueville, puisqu’en 1596, il fut vendu par Marie de Bourbon, Duchesse de Longueville & d’Estouteville, veuve d’Eleonor Duc de Longueville, à Antoine Courault Procureur du Roi au Présidial de la Rochelle. Après la mort de Courault, Chatel-aillon fut saisi réellement sur ses héritiers, & vendu le dernier Août 1615.

Daniel Green de S. Marsault, Gentilhomme [16] du Pays d’Aulnis, & originaire d’Angoumois, acquit alors cette Baronnie par décret [17] : c’est celui vraisemblablement qui commandoit en 1622 les troupes de la Rochelle. Jean Louis Charles d’Orléans de Longueville, dernier mâle de cette Maison, étant décédé le 4 Février 1694, le Fermier du Domaine demanda la réunion de Chatel-aillon à la Couronne. La réunion fut ordonnée le 9 Mars de la même année ; mais les enfans de Pharamond Green de S. Marsault, Chevalier, Seigneur de Chatel-aillon, ayant supplié Sa Majesté d’agréer un échange, le Roi accepta la Seigneurie de Dompierre près de la Rochelle, & le contrat fut passé le 5 Février 1699 [18].

« Selon Maichin, ceux qui assisterent à la rédaction de la Coutume de la Rochelle, y firent adroitement couler cet article, que nul n’a de jurisdiction à la Rochelle que le Roi, & par ce moyen privèrent les Seigneurs de Chatel-aillon du droit qu’ils y prétendoient ». Ce conte absurde ne méritoit pas de tenir une place dans l’Histoire. Comment cette fourrure se seroit-elle glissée dans les cahiers de la Coutume sans que le député du Seigneur de Chatel-aillon reclamât contre une innovation d’une si grande conséquence ? Et comment le Duc de Longueviile auroit-il souffert qu’une indigne supercherie lui ravît ses droits ?

Maichin auroit dû savoir que long-temps avant la rédaction de la Coutume, les Rochellois étoient soumis immédiatement au Roi, sans reconnoître d’autres Seigneurs, & que depuis plusieurs siecles les Seigneurs de Chatel-aillon avoient cédé le Domaine direct de la Rochelle. En effet, Eleonor en 1199, donna à Rodolphe de Mauleon, Seigneur de Chatel-aillon, la Terre & Seigneurie de Benon avec 500 liv. de rente, en échange de la Rochelle [19]. Praenominatus Rodulphus de Maloleone, pro praescripto escambio , quid quid juris habebat in Rupella, nobis & militibus nostris, in perpetuum quittavit & transmisit. Apud Londinum crastino natalis, ab incarnatione Domini millesimo centesimo nonagesimo nono. Charles VI. par ses Lettres patentes données à Senlis en 1380, déclare qu’il retient la Rochelle, in specialem cameram Franciae.

Les Seigneurs de Chatel-aillon jouissoient autrefois d’un droit fort singulier. Il se faisoient payer la tierce partie de toutes les dettes que contractoient ses tenanciers entr’eux, de sorte qu’il devenoient ainsi eux-mêmes créanciers dans toutes les conventions de ces tenanciers, & en cette qualité ils intervenoient nécessairement dans toutes les actions réelles & personnelles, pour obtenir la délivrance du tiers de la somme adjugée. « Les Rochellois, dit Amos Barbot [20], firent tant par leurs intercessions, qu’ils obtinrent de Guillaume l’Archevêque qu’il se désistât & départît de ce droit, se réservant seulement l’amende de 7 fols 6 den. celle de 60 sols 1 den. & les autres amendes selon les Us & Coutumes du Pays ». On trouve encore en certains lieux des traces de ce droit rigoureux. Lorsqu’on exécute quelque débiteur en ses biens, dit M. de Richebourg, il est dû en Hainault, au Seigneur du lieu , le cinquième denier de la somme pour paiement de laquelle on fait l’exécution ; & c’est ce qui se nomme service du quint [21].

Les Seigneurs de Chatel-aillon prétendoient encore jouir du droit d’épave. Antoine Courault, Seigneur de cette Terre, en 1599 réclama un Navire qui avoit sombré faute de lest, entre l’isle d’Aix & les côtes de la Baronnie de Chatel-aillon ; mais François Tallemand l’un des Pairs de la Rochelle, remontra qu’un privilège accordé à Calais le 25 Octobre 1360, par Edouard III. Roi d’Angleterre, exemptoit les Rochellois du droit de naufrage.

Ce droit que l’humanité réprouve, tiroit peut-être sa source de l’humeur féroce des anciens Gaulois qui mettoient à mort les étrangers, selon Pomponius Mela. Il est plus vraisemblable que ce fut d’abord un droit de représailles contre les pirates du Nord, qui dans leurs expéditions rapides & fréquentes désolerent la Gaule Occidentale. Lorsque ces brigands étoient jettes sur les rivages, qu’ils étoient les moins forts, ou qu’ils se laissoient surprendre, les habitans des côtes, après les avoir pillés, leur faisoient expier par la mort leurs rapines & leurs cruautés. Ce procédé rigoureux autorisé par la raison contre des voleurs, dégénéra en abus. L’amour du butin & l’intérêt, presque toujours barbares dans les ames viles, ne distinguerent plus l’innocent du coupable. Des malheureux dont le Navire se brisoit sur des rochers , après avoir été long-temps le jouet des tempêtes, n’échappoient aux périls des mers, que pour essuyer de nouyeaux dangers sur la terre. Des hommes sans entrailles & sans pitié, leur enlevoient leurs effets & souvent les égorgeoîent.

Un usage injuste changé en loi, adjugeoit aux Ducs de Bretagne [22] le bris des Navires, les marchandises & les personnes même qui avoient fait naufrage. Sur les côtes de Saintonge & d’Aulnis, le droit de bris fut long-temps en vigueur : mais on le faisoit valoir d’une manière moins cruelle qu’en Bretagne. Les Seigneurs prenoient le tiers ou le quart des effets, & ceux qui avoient sauvé les marchandifes en-prenoient autant. Le reste étoit abandonné aux propriétaires, & l’on n’attentoit pas sur la liberté des matelots. Ce tempérament qui a doucissoit un droit si odieux, ne fut pas généralement suivi. S’il faut s’en rapporter à Belleforet, « le bris & tout ce que d’iceux pouvoit être sauvé par la loi du Pays (Bretagne) étoit confisqué au Prince, & d’un pareil droit jouit le Sire de Pons en l’isle de Marepnes » [23].

En 1226, Henri Roi d’Angleterre & Duc d’Aquitaine, ordonna [24] que la cargaison, en cas de naufrage, sur les côtes d’Angleterre, de Gascogne, du Comté de Poitou, & par conséquent du Pays d’Aulnis & de la Rochelle, serait rendue aux gens du Vaisseau : que [25] si l’équipage entier s’étant noyé, un animal échappoit du naufrage, ou se trouvoit dans le Navire plein de vie, ses Baillis ou les Baillis des Seigneurs mettroient les effets en sequestre, entre les mains de quatre personnes de confiance, afin que ces effets fussent rendus aux propriétaires, s’ils les répétoient dans l’espace du temps fixé pour la revendication : mais que si tout avoit péri, hommes & bêtes, ce qui restoit de la cargaison, reviendroit au Domaine ou au Seigneur à qui appartiendroit cette étendue de mer où le Navire auroit fait naufrage. La clause qui assure aux propriétaires leurs biens, mais qui fait dépendre cet avantage de la vie d’une vile bête, me paraît remarquable par sa singularité. Il semble que le crayon qui a tracé les règles d’équité dans cette Ordonnance, n’ait pas achevé le trait. Il étoit raisonnable d’ordonner la restitution des effets, & souverainement ridicule de l’attacher à la vie d’un animal.

Ce fut à la prière des habitans de la Rochelle & de Bordeaux [26], que les Ducs de Bretagne, durant le règne de Saint Louis, se désisterent du droit odieux de bris & d’épave, & laissèrent le commerce libre, moyennant une certaine taxe de brieus ou brefs de sauveté & de conduite, c’est-à-dire de congé, à tous ceux qui vouloient naviger sur leurs côtes. Pour faciliter l’usage de ces congés ou passeports, ces Ducs tenoient des Bureaux & des Receveurs à la Rochelle & à Bourdeaux.

Il paroit que la taxe que les Ducs de Bretagne [27] percevoient à l’occasion des congés de mer, leur fut contestée dans la suite, puisqu’en 1362 Edouard, à la sollicitation de Jean Duc de Bretagne, ordonna au Sénéchal de Saintonge & à son Receveur de la Rochelle, de faire enquête, & de rétablir le Prince en possession de ses droits, s’ils étoient solidement fondés. [28]


[1Barbot

[2Hist. de Saintes

[3Hist. critiq. de la monarchie Fr.

[4Tîb. 2 lib. eleg 3, & 1a lib. 2.

[5Cosmogr. tom. 2, liv. 12.

[6Lelong. Bibliot. pag. 8. Le P. Niceron , Mém. tom. 23.

[7Généal. Des Chateign. Préface

[8( a ) Barones nullo medio pendehant a Rege vel quatenus Rege, vel à Rege quetenus Duce vel Comite Provinciarum quas acquisiverat. Gloss. du Droit Franc. de Laurière

[9Hist. de Charles VII. Godef. pag. 838

[10Cartul. des Pères Minim. de Surg. fol 129 & suiv.

[11Gr. Offic. de la Cour. t. 6 , p. 15. Note VII.

[12Huet Comment, sur la Cout.

[13Maichin , p. 24.

[14Blanchard ,tom. I col. 245.
Dupuy , droits du Roi, p. 92i.

[15Mélanges, vol 183, fol. 302. Cabinet de M. de Cleremb.

[16La Maison de Green & non Grain, comme on lit dans le 7 vol. de l’Histoire de Malthe, est originaire d’Ecosse, d’où elle sortit pour venir s’établir en France. La liste des Chevaliers du Prieuré d’Aquitaine Histoire de Malthe par M de Vertot, tom. 7, nous présente sous l’année 1582, Pierre Grain de S. Marsault du Parcoul : de gueules à trois demi-vols d’or, ceux du chef affrontés. André Grain de S. Marsault son frère,.. Sous l’année 1603, Jean Grain de S. Marsault & Henri Grain de S. Marsault. Le P. Daniel fait mention de N. S. Marsault fait prisonnier à la journée de Pavie en 1525.

[17Lett. Patent. de Louis XIII. pour l’agrandiss. de la Roch.

[18Contr. d’échange de la Terre de Dompierre.

[19Aug. Galland

[20Sous l’an 1284

[21Cout. de Hainault, art. 11, ch. 49.

[22Us & cout. de la mer

[23Tom. 1, p. 447.

[24Us & çout.

[25Quotiescumque contigerit de Navi taliter periclitata, nullo homine vivente, qualemcumque bestiam vivam evadere, vel en Navi illa vivant inveniri, tunc bona & catalla deponantur.... Si vero nullus homo vivus evaserit, nec alia bestia, sicut praedictum est, tunc bona in Navi contenta nostra sint.....

[26Us & cout.

[27Hist. de Bretagne, Lobineau, tom. 1 pag. 531.

[28Rymer, tom. 6, p. 382.

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