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17e siècle - Papier et eaux-de-vie : produits traditionnels de l’Angoumois

lundi 21 janvier 2008, par Pierre, 2347 visites.

Sous forme de conversation, un académicien et un chevalier oubliés décrivent deux des productions locales traditionnelles, et leur méthode de fabrication au XVIIe siècle.

Source : Histoire des Français des divers états, ou Histoire de France aux cinq derniers siècles - Amans-Alexis Monteil – Paris - 1853 - Books Google

Papeterie
Source : Encyclopédie
L’académicien, grand consommateur de papier, avait préparé ses questions sur les PAPETERIES D’ANGOULÊME. Il les fit avec ordre. Le chevalier y répondit de même :

Nous conservons, dit-il, les livres du siècle passé imprimés par les plus riches et les plus célèbres imprimeurs. Nous conservons aussi les lettres des princes et d’autres grands personnages de ces temps. Les meilleurs papiers étaient alors mauvais ; tous les nôtres sont aujourd’hui bons ; c’est que nos devanciers faisaient ce que nous ne faisons pas et qu’ils ne faisaient pas ce que nous faisons. Nous portons le plus grand soin aux divers triages des chiffons et à leur lavage. Nous taillons et retaillons les chiffons. Nous les laissons macérer dans les cuves le temps convenable. Nous laissons sous les maillets des moulins la pâte de chiffons jusqu’à sa parfaite trituration. Nous donnons à l’eau de la cuve, qui tient en dissolution cette pâte, le degré de chaleur le plus convenable. Nous employons pour puiser dans la cuve cette pâte, un moule carré ou forme, dont la claire voie de fil de laiton est plus propre à lâcher ou à retenir la pâte nécessaire à chaque feuille. Nous manions plus dextrement cette forme, et les feuilles que nous en retirons sont d’une épaisseur plus égale. Nous azurons mieux ces feuilles. Nous nous servons de carrés de feutres plus unis pour les séparer entre elles, une à une, au sortir du moule. Nous les pressons mieux, nous les séchons mieux. Nous les collons dans une colle de rognures de cuir de parchemin mélangée d’alun et couperose. Nous les lissons avec une pierre légèrement graissée de suif [1]

C’est à Angoulême, ajouta le chevalier, que j’ai vu faire ces opérations avec toute la perfection possible. A la papeterie où j’entrai le salleran ou chef de la salle [2] me fit voir aussi comment on dorait le papier sur tranche [3], et comment on le parfumait [4].

Autrefois papier de Troyes [5] ! ensuite papier de Clermont [6] ! aujourd’hui papier d’Angoulême [7] ! papier d’Ambert ! papier de Thiers ! papier de Limoges ! papier d’Essonne [8] !
Alambic d’autrefois
Source : Encyclopédie
A souper, au dessert, Monsieur Monfranc dit au chevalier : Personne mieux que vous ne pourra nous apprendre si cette eau-de-vie est vraiment de L’EAU-DE-VIE DE COGNAC et si c’est de la bonne. Le chevalier ne manqua pas de la trouver vraie et excellente eau-de-vie de Cognac [9], et il en prit occasion de parler de la manière dont on la faisait. Lorsque j’entrai dans les ateliers de tapisseries d’Aubusson, dit-il, je trouvai, ainsi que je vous l’ai raconté, les ouvriers d’une gaité surprenante. Je m’attendais à trouver ceux des fabriques d’eau-de-vie de Cognac encore plus gais ; mais ce fut tout le contraire : ils étaient tristes et silencieux comme leurs alambics.

Je m’aperçus que l’eau-de-vie, devenue boisson habituelle, altérait l’humeur et le caractère. Les distillateurs ont mille fois plus de disputes que les tisserands de tapisseries, et leurs disputes sont mille fois plus vives : le genre des aliments surtout le genre des boissons, est une des causes du genre du caractère.

A Cognac, les distillateurs croient faire de meilleure eau-de-vie que celle de Nantes, qui passe pour la meilleure [10] : ils ont raison. Ils croient même la faire meilleure que dans tout le reste de la France : ils auront raison tout aussitôt que l’Espagne aura conquis notre extrême lisière, où sont les vignobles d’Andaye [11] [NDLR : Hendaye].

Dans les celliers de Cognac, je vis distiller aussi l’esprit de vin, qu’on devrait plutôt appeler esprit d’eau-de-vie, car ce n’est que de l’eau-de-vie distillée. Autrefois on faisait une double distillation : d’abord celle du vin, pour le réduire en eau-de-vie, ensuite celle de l’eau-de-vie, pour la réduire en esprit de vin. Aujourd’hui on n’en fait qu’une. On n’a fait d’autre changement à l’appareil que celui d’allonger le cou du matras ; ce qui empêche la partie aqueuse ou flegme de l’eau-de-vie de monter en vapeur ou de se mêler à l’esprit de vin [12].

[1Dictionnaire de commerce de Savary, v° Papier

[2Ibid v° Salleran

[3123 Roman comique de Furetière, histoire de Lucrèce

[4Lettres de madame de Sévigné, lettre du mercredi 19 août 1671

[5Quinzième siècle, Histoire IX , l’Artisan note 421

[6Description de la France par Desrues, chap. Clermont

[7Voyez les lettres de Balzac datées d’Angoulême

[8Dictionnaire de commerce de Savary, v° Papier

[9Description de la France par Piganiol, Saintonge et Angoumois

[10Dictionnaire de commerce par Savary, v° Eau-de-vie

[11Dictionnaire géographique de Baudrand, v° Andaye

[12Chimie de Lémery, art. Esprit-de-vin

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