Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

Accueil > Chronologie de l’histoire locale > La Renaissance > 1533 - 1850 - Le protestantisme en Angoumois, Aunis et Saintonge > Des premiers jours à l’Edit de Nantes (1533-1598) > 1559 - Jean Calvin : La Confession de La Rochelle ou Confession (...)

1559 - Jean Calvin : La Confession de La Rochelle ou Confession gallicane

jeudi 22 janvier 2009, par Pierre, 3716 visites.

Toutes les versions de cet article : [English] [français]

Ce texte de Jean Calvin, document fondateur du protestantisme français, est appelé Confession de la Rochelle ou Confession gallicane. C’est peut-être parce que la version présentée ici, rédigée très probablement en 1559, a été adoptée par le Synode de La Rochelle de 1571.

Ses premières versions remontent probablement à 1557.

Sur cette page, sont rassemblés : Des éléments sur l’historique de la création de ce document, le texte de la Confession (1559 ?), le texte de l’adresse au Roi Henri II par Théodore de Bèze (en 1563), et un extrait des actes du 7ème Synode National de la Rochelle (1571), qui explique pourquoi on appelle ce texte « La Confession de la Rochelle »

En savoir plus sur Jean Calvin

Sources :
- Pour le commentaire sur les versions de ce texte : Nouvelle revue de théologie - Paris - Genève - 1859 - Books Google
- Pour l’adresse au roi et le texte de la Confession : The Creeds of Christendom : The Evangelical Protestant creeds - Philip Schaff - New York - 1877 - Books Google
- Actes ecclésiastiques et civils de tous les synodes nationaux des Eglises Réformées de France - Aymon - La Haye - 1710 - BNF Gallica

 A la recherche de la première version de la "Confession"

Les 40 petits articles de cette Discipline, comme parle Aymon, sont assez différents
de ce qu’ils devinrent plus tard ; c’est, comme dit Th. de Bèze, un premier
projet. Du reste, la Discipline donna lieu à bien des difficultés. Voy. une curieuse
lettre du consistoire de Paris à Chandieu, qui se trouvait à Genève en 1560 (Gaberel,
Hist. de Genève, t. II, p. 5). Il s’agissait d’une édition de la Discipline, préparée par
Chandieu et repoussée par plusieurs, entre autres le cardinal de Chatillon et son
ministre De la Haye. La Confession de foi a subi moins de changements ; cependant
bien des synodes subséquents l’ont révisée ; mais on évitait de parler de ces changements ; les synodes de Montpellier et de Privas défendirent de mettre dans le titre les
mots revue et corrigée. Les autorités dogmatiques ont toujours voulu être ou au
moins paraître immuables, et n’y ont jamais réussi.

L’art. 1er des Avertissements du Ve synode national, tenu à Paris en 1565, avertit
les imprimeurs de France et de Genève qu’ils ne doivent plus mettre à la suite des
Psautiers et catéchismes la Confession de foi « qui commence Parce que le fondement de croire, » mais celle « qui commence par ces paroles : Nous croyons, et cela,
est-il dit, quoiqu’elles soient toutes deux assez conformes en doctrine. »

Cette Confession plus ancienne, officiellement rejetée en 1565, a été signalée par
M. de Polenz (Geschichte des franzoesischen Calvinismus, t. I, p. 454 et 455). L’auteur de ce livre, après avoir relevé les différences nombreuses des textes de cette
Confession dans Bèze, Aymon, etc., décrit une très-rare plaquette de 7 feuillets in-8°,
intitulée : « Confession de Foy, faite d’un commun accord par les Eglises qui sont
dispersées en France et s’abstiennent des idolâtries Papales, avec une Préface
contenant response et defence contre les calomnies dont on les charge
. » Si l’on
peut en croire une note manuscrite que porte celte brochure, elle serait « la première
édition originale
, » quoique très-probablement cette autre indication également manuscrite : Paru 1559, ne soit point la date de l’impression, mais plutôt celle
de la rédaction. Cette Confession de foi n’a que 35 articles au lieu de 40, et au début,
au lieu de : Nous croions, ou, comme on lit ailleurs : Nous croions et confessons qu’il n’y a qu’un seul Dieu, il est dit : Pour ce que le fondement de croire, comme dit sainct Paul, est par la Parole de Dieu, nous croyons, etc.

Du reste, aucune de ces rédactions n’est la première. Calvin en avait adressé une en
forme de lettre au roi Henri II en novembre 1557 (publiée par M J. Bonnet, t. I,
p. 151. et reproduite par M. Goguel à la suite du portrait de Calvin dans son édition
partielle des Icones de Bèze, traduits par Simon Goulard, Vrais pourtraits, etc.
Strasbourg 1859). « Admirable lettre, dit M. Mignet, dont plusieurs passages sont
devenus les articles textuels de la Confession de foi dressée par le premier synode. »

Bèze en avait également rédigé une en français, qu’il publia en latin l’année suivante (Lettre inédite citée par Crottet, Petite Chron., p. 191).

Il est bien démontré aujourd’hui que Théodore de Bèze, dans son Histoire ecclésiastique, a cru devoir mettre a la suite de son récit du premier synode la Confession de foi, non telle qu’elle y fut votée, mais telle qu’elle était admise au moment où il écrivait.

Cette Confession, du reste, ne reçut sa forme définitive qu’après avoir subi, au
XVIIIe synode national, tenu à La Rochelle en 1607, une dernière révision en 15 articles.

Source : Nouvelle revue de théologie - Paris - Genève - 1859 - Books Google

 La Confession de Foi, faite d’un commun accord par les Églises Réformées du Royaume de France.

dite Confession de La Rochelle

- ARTICLE 1. Nous croions et confessons qu’il y a un seul Dieu, qui est une seule et simple essence, spirituelle, éternelle, invisible, immuable, infinie, incompréhensible, ineffable, qui peut toutes choses, qui est toute sage, toute bonne, toute juste, et toute miséricordieuse.

- 2. Ce Dieu se manifeste tel aux hommes, premièrement par ses œuvres, tant par la création que par la conservation et conduite d’icelles. Secondement et plus clairement par sa Parole, laquelle au commencement révélée par Oracles, a été puis après rédigée par écrit aux Livres que nous appelons Écriture Sainte.

- 3. Toute cette Écriture Sainte est comprise aux Livres Canoniques du Vieux et Nouveau Testament, desquels le nombre s’ensuit.

  • Les cinq Livres de Moïse ; à savoir, Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome.
  • Item Josué, Juges, Ruth, le premier et second livre de Samuel, le premier et second livre des Rois, le premier et second livre des Chroniques, autrement dits Paralipomenon, le premier livre d’Esdras.
  • Item, Néhémie, le livre d’Esther, Job, les Psaumes de David, les Proverbes ou Sentences de Salomon, le livre de l’Ecclésiaste dit le Prêcheur, le Cantique de Salomon.
  • Item, le livre d’Ésaïe, Jérémie, Lamentations de Jérémie, Ézéchiel, Daniel, Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Michée, Nahum, Abacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie, Malachie.
  • Item, le Saint Évangile selon S. Matthieu, selon S. Marc, selon S. Luc, et selon S. Jean.
  • Item, le second livre de S. Luc, autrement dit les Actes des Apôtres.
  • Item, les Épîtres S. Paul aux Romains, une aux Corinthiens, deux aux Galates, aux Éphésiens une, aux Philippiens une, aux Colossiens une, aux Thessaloniciens deux, à Timothée deux, à Tite une, à Philémon une.
  • Item, l’Épître aux Hébreux, l’Épître S. Jacques, la première et seconde Épîtres de S. Pierre, la première, deuxième et troisième Épîtres S. Jean, l’Épître S. Jude.
  • Item, l’Apocalypse ou révélation S. Jean.

- 4. Nous connaissons ces livres être Canoniques, et règle très certaine de notre Foi ; non tant par le commun accord et consentement de l’Église, que par le témoignage et la persuasion intérieure du S. Esprit, qui nous les fait discerner d’avec les autres Livres Ecclésiastiques, sur lesquels, encore qu’ils soient utiles, on ne peut fonder aucun Article de Foi.

- 5. Nous croions que la Parole qui est contenue en ces livres, est procédée de Dieu, duquel seul elle prend son autorité, et non des hommes. Et d’autant qu’elle est la règle de toute vérité, contenant tout ce qui est nécessaire pour le service de Dieu et de notre salut, il n’est pas loisible aux hommes, ni même aux Anges, d’y ajouter, diminuer ou changer. D’où il s’ensuit que ni l’antiquité, ni les coutumes, ni la multitude, ni la sagesse humaine, ni les jugements, ni les arrêts, ni les édits, ni les décrets, ni les conciles, ni les visions, ni les miracles, ne doivent être opposés à cette Écriture Sainte, mais au contraire, toutes choses doivent être examinées, réglées et réformées selon elle. Et suivant cela nous avouons les trois Symboles, savoir des Apôtres, de Nicée, et d’Athanase, parce qu’ils sont conformes à la Parole de Dieu.

- 6. Cette Écriture Sainte nous enseigne qu’en cette seule et simple essence Divine, que nous avons confessée, il y a trois Personnes, le Père, le Fils, et le S. Esprit. Le Père, première cause, principe et origine de toutes choses. Le Fils, sa Parole et Sapience éternelle. Le S. Esprit, sa vertu, puissance et efficace. Le Fils éternellement engendré du Père. Le S. Esprit procédant éternellement de tous deux ; les trois Personnes non confuses, mais distinctes, et toutefois non divisées, mais d’une même essence, éternité, puissance, et égalité. Et en cela avouons ce qui a été déterminé par les Conciles Anciens, et détestons toutes sectes et hérésies qui ont été rejetées par les saints Docteurs, comme S. Hilaire, S. Athanase, S. Ambroise, et S. Cyrille.

- 7. Nous croions que Dieu en trois personnes coopérantes, par sa vertu, sagesse et bonté incompréhensible, a créé toutes choses, non seulement le Ciel, la Terre, et tout ce qui y est contenu ; mais aussi les esprits invisibles, desquels les uns sont déchus et trébuchés en perdition, les autres ont persisté en obéissance. Que les premiers s’étant corrompus en malice, sont ennemis de tout bien, par conséquent de toute l’Église. Les seconds ayant été préservés par la grâce de Dieu sont Ministres pour glorifier le nom de Dieu, et servir au salut de ses élus.

- 8. Nous croions que non seulement il a créé toutes choses, mais qu’il les gouverne et conduit, disposant, et ordonnant selon sa volonté de tout ce qui avaient au Monde ; non pas qu’il soit auteur du mal, ou que la coulpe lui en puisse être imputée, vu que sa volonté est la règle souveraine et infaillible de toute droiture et équité ; mais il a des moyens admirables de se servir tellement des diables et des méchants, qu’il fait convertir en bien le mal qu’ils font, et duquel ils sont coupables. Et ainsi en confessant que rien ne se fait sans la providence de Dieu, nous adorons en humilité les secrets qui nous sont cachés, sans nous enquérir par-dessus notre mesure ; mais plutôt appliquons à notre usage ce qui nous est montré en l’Écriture Sainte, pour être en repos et sûreté, d’autant que Dieu, qui a toutes choses sujettes à soi, veille sur nous d’un soin paternel, tellement qu’il ne tombera point un cheveu de notre tête sans sa volonté. Et cependant il tient les diables et tous nos ennemis bridés, en sorte qu’ils ne nous peuvent faire aucune nuisance sans son congé.

- 9. Nous croions que l’homme ayant été créé pur et entier, et conforme à l’image de Dieu, est par sa propre faute déchu de la grâce qu’il avait reçue. Et ainsi s’est aliéné de Dieu, qui est la fontaine de justice et de tous biens, en sorte que sa nature est du tout corrompue. Et étant aveuglé en son esprit, et dépravé en son cœur, a perdu toute intégrité sans en avoir rien de reste. Et bien qu’il ait encore quelque discrétion du bien et du mal, nonobstant nous disons, que ce qu’il a de clarté, se convertit en ténèbres quand il est question de chercher Dieu ; tellement qu’il n’en peut nullement approcher par son intelligence et raison. Et bien qu’il ait une volonté par laquelle il est incité à faire ceci ou cela , toutefois elle est du tout captive sous péché ; en sorte qu’il n’a nulle liberté à bien, que celle que Dieu lui donne.

- 10. Nous croions que toute la lignée d’Adam est infectée de telle contagion, qui est le péché originel, et un vice héréditaire, et non pas seulement une imitation, comme les Pélagiens ont voulu dire, lesquels nous détestons en leurs erreurs. Et n’estimons pas qu’il soit besoin de s’enquérir comme le péché vient d’un homme à l’autre vu que c’est assez, que ce que Dieu lui avait donné n’était pas pour lui seul, mais pour toute sa lignée ; et ainsi, qu’en la personne d’icelui nous avons été dénués de tous biens, et sommes trébuchés en toute pauvreté et malédiction.

- 11. Nous croions aussi que ce vice est vraiment péché, qui suffit à condamner tout le genre humain, jusques aux petits enfants dès le ventre de la mère, et que pour tel il est réputé devant Dieu ; même qu’après le Baptême, c’est toujours péché quant à la coulpe, combien que la condamnation en soit abolie aux enfants de Dieu, ne la leur imputant point par sa bonté gratuite. Outre cela, que c’est une perversité produisant toujours des fruits de malice et rébellion, tels que les plus saints, encore qu’ils y résistent, ne laissent point d’être entachés d’infirmités et de fautes pendant qu’ils habitent en ce monde.

- 12. Nous croions que de cette corruption et condamnation générale, en laquelle tous hommes sont plongés, Dieu retire ceux lesquels en son Conseil éternel et immuable il a élus par sa seule bonté et miséricorde en notre Seigneur Jésus Christ sans considération de leurs œuvres, laissant les autres en cette même corruption et condamnation, pour démontrer en eux sa justice, comme aux premiers il fait luire les richesses de sa miséricorde. Car les uns ne sont point meilleurs que les autres, jusques à ce que Dieu les discerne, selon son Conseil immuable qu’il a déterminé en Jésus Christ devant la création du Monde ; et nul aussi ne se pourrait introduire à un tel bien de sa propre vertu, vu que de notre nature nous ne pouvons avoir un seul bon mouvement, ni affection, ni pensée, jusques à ce que Dieu nous ait prévenus, et nous y ait disposés.

- 13. Nous croions qu’en icelui Jésus Christ tout ce qui était requis à notre salut nous a été offert et communiqué. Lequel nous étant donné à salut, nous a été quant et quant fait sapience, justice, sanctification et rédemption ; en sorte qu’en déclinant de lui, on renonce à la miséricorde du Père, où il nous convient avoir refuge unique.

- 14. Nous croions que Jésus Christ, étant la sagesse de Dieu, et son Fils éternel, a revêtu notre chair, afin d’être Dieu et homme en une personne, même homme semblable à nous, passible en corps et en âme, sinon en tant qu’il a été pur de toute macule. Et quant à son humanité, qu’il a été vraie semence d’Abraham et de David, bien qu’il ait été conçu par la vertu secrète du Saint Esprit. En quoi nous détestons toutes les hérésies qui ont anciennement troublé les Églises ; et notamment aussi les imaginations diaboliques de Servet, lequel attribue au Seigneur JÉSUS une divinité fantastique, d’autant qu’il le dit être idée et patron de toutes choses ; et le nomme Fils personnel ou figuratif de Dieu ; et finalement lui forge un corps de trois éléments incréés, ainsi mêle et détruit toutes les deux natures.

- 15. Nous croions qu’en une même personne, à savoir Jésus Christ, les deux natures sont vraiment et inséparablement conjointes et unies, demeurant néanmoins chacune nature en sa propriété distincte ; tellement que comme en cette conjonction la nature Divine retenant sa propriété est demeurée incréée, infinie et remplissant toutes choses ; aussi la nature humaine est demeurée finie, ayant sa forme, mesure et propriété ; et même combien que Jésus Christ en ressuscitant ait donné l’immortalité à son corps, toutefois il ne lui a ôté la vérité de sa nature. Et ainsi, nous le considérons tellement en sa divinité, que nous ne le dépouillons point de son humanité.

- 16. Nous croions que Dieu envoyant son Fils a voulu montrer son amour et sa bonté inestimable envers nous, en le livrant à la mort, et le ressuscitant pour accomplir toute justice, et pour nous acquérir la vie céleste.

- 17. Nous croions que par le sacrifice unique que le Seigneur JÉSUS a offert en la croix, nous sommes réconciliés à Dieu pour être tenus et réputés justes devant lui ; parce que nous ne lui pouvons être agréables, ni être participants de son adoption, sinon d’autant qu’il nous pardonne nos fautes, et les ensevelit. Ainsi nous protestons que Jésus Christ est notre lavement entier et parfait ; qu’en sa mort nous avons entière satisfaction pour nous acquitter de nos forfaits et iniquités dont nous sommes coupables, et ne pouvons être délivrés que par ce remède.

- 18. Nous croions que toute notre justice est fondée en la rémission de nos péchés, comme aussi c’est notre seule félicité, comme dit David. C’est pourquoi nous rejetons tous autres moyens de nous pouvoir justifier devant Dieu ; et sans présumer de nulles vertus ni mérites, nous nous tenons simplement à l’obéissance de Jésus Christ, laquelle nous est allouée, tant pour couvrir toutes nos fautes, que pour nous faire trouver grâce et faveur devant Dieu. Et de fait, nous croions qu’en déclinant de ce fondement tant peu que ce soit, nous ne pourrions trouver ailleurs aucun repos, mais serions toujours agités d’inquiétude ; d’autant que jamais nous ne sommes paisibles avec Dieu, jusques à ce que nous soyons bien résolus d’être aimés en Jésus Christ, vu que nous sommes dignes d’être haïs en nous-mêmes.

- 19. Nous croions que c’est par ce moyen que nous avons liberté et privilège d’invoquer Dieu, avec pleine fiance qu’il se montrera notre Père. Car nous n’aurions pas aucun accès au Père, si nous n’étions adressés par ce Médiateur. Et pour être exaucés en son Nom, il convient tenir notre vie de lui comme de notre chef.

- 20. Nous croions que nous sommes faits participants de cette justice par la seule foi ; comme il est dit, qu’il a souffert pour nous acquérir le salut, afin que quiconque croira en lui, ne périsse point. Et que cela se fait, d’autant que les promesses de vie qui nous sont données en lui, sont appropriées à notre usage, et en sentons l’effet, quand nous les acceptons, ne doutant point qu’étant assurés de la bouche de Dieu, nous ne serons point frustrés. Ainsi la justice que nous obtenons par foi, dépend des promesses gratuites, par lesquelles Dieu nous déclare et testifie qu’il nous aime.

- 21. Nous croions que nous sommes illuminés en la foi par la grâce secrète du Saint Esprit, tellement que c’est un don gratuit et particulier que Dieu départ à ceux que bon lui semble, en sorte que les fidèles n’ont de quoi s’en glorifier, étant obligés au double de ce qu’ils ont été préférés aux autres. Même que la foi n’est pas seulement baillée pour un coup aux élus, pour les introduire au bon chemin, mais pour les faire continuer aussi jusques au bout. Car comme c’est Dieu de faire le commencement, aussi c’est à lui de parachever.

- 22. Nous croions que par cette foi nous sommes régénérés en nouveauté de vie, étant naturellement asservis au péché. Or nous recevons par foi la grâce de vivre saintement et en la crainte de Dieu, en recevant la promesse qui nous est donnée par l’Évangile ; savoir que Dieu nous donnera son S. Esprit. Ainsi la foi non seulement ne refroidit pas l’affection de bien et saintement vivre, mais l’engendre et excite en nous, produisant nécessairement les bonnes œuvres. Au reste, bien que Dieu, pour accomplir notre salut, nous régénère, nous réformant à bien faire, toutefois nous confessons que les bonnes œuvres, que nous faisons par la conduite de son Esprit, ne viennent point en compte pour nous justifier, ou mériter que Dieu nous tienne pour ses enfants ; parce que nous serions toujours flottants en doute et inquiétude, si nos consciences ne s’appuyaient sur la satisfaction par laquelle Jésus Christ nous a acquittés.

- 23. Nous croions que toutes les figures de la Loi ont pris fin à la venue de Jésus Christ. Mais bien que les cérémonies ne soient plus en usage, néanmoins la substance et la vérité nous en est demeurée en la personne de celui auquel gît tout accomplissement. Au surplus, il nous faut aider de la Loi et des Prophètes, tant pour régler notre vie, que pour être confirmés aux promesses de l’Évangile.

- 24. Nous croions, puisque Jésus Christ nous est donné pour seul Avocat, et qu’il nous commande de nous retirer privément en son Nom vers son Père ; et même qu’il ne nous est pas licite de prier sinon en suivant la forme que Dieu nous a dictée par sa Parole, que tout ce que les hommes ont imaginé de l’intercession des Saints trépassés, n’est qu’abus et fallace de Satan, pour faire dévoyer les hommes de la forme de bien prier. Nous rejetons aussi tous autres moyens que les hommes présument avoir pour se racheter envers Dieu, comme dérogeant au sacrifice de la mort et passion de Jésus Christ. Finalement nous tenons le Purgatoire pour une illusion procédée de cette même boutique ; de laquelle sont aussi procédés les vœux monastiques, pèlerinages, défenses du mariage, et de l’usage des viandes, l’observation cérémonielle des jours, la Confession Auriculaire, les Indulgences, et toutes autres telles choses par lesquelles on pense mériter grâce et salut. Lesquelles choses nous rejetons non seulement pour la fausse opinion du mérite qui y est attachée, mais aussi parce que ce sont inventions humaines, qui imposent joug aux consciences.

- 25. Or, parce que nous, ne jouissons de Jésus Christ que par l’Évangile, nous croions que l’ordre de l’Église, qui a été établi en son autorité, doit être sacré et inviolable, et partant que l’Église ne peut subsister sinon qu’il y ait des Pasteurs qui aient la charge d’enseigner, lesquels on doit honorer et écouter en révérence quand ils sont dûment appelés, et exercent fidèlement leur office. Non pas que Dieu soit attaché à telles aides ou moyens inférieurs, mais parce qu’il lui plaît nous entretenir sous telle bride. En quoi nous détestons tous fantastiques, qui voudraient bien, en tant qu’en eux est, anéantir le Ministère et Prédication de la Parole de Dieu et des Sacrements.

- 26. Nous croions donc que nul ne se doit retirer à part, et se contenter de sa personne ; mais tous ensemble doivent garder et entretenir l’unité de l’Église, se soumettant à l’instruction commune, et au joug de Jésus Christ ; et ce en quelque lieu où Dieu aura établi un vrai ordre de l’Église, encore que les Magistrats et leurs édits y soient contraires, que tous ceux qui ne s’y rangent, ou s’en séparent, contrarient à l’ordonnance de Dieu.

- 27. Toutefois nous croions qu’il convient discerner soigneusement, et avec prudence, qu’elle est la vraie Église ; parce que par trop on abuse de ce titre. Nous disons donc suivant la Parole de Dieu, que c’est la compagnie des fidèles, qui s’accordent à suivre cette Parole, et la pure Religion qui en dépend, et qui profitent en elle tout le temps de leur vie, croissant et se confirmant en la crainte de Dieu, selon qu’ils ont besoin de s’avancer et de marcher toujours plus outre. Même quoiqu’ils s’efforcent, qu’il leur convient avoir incessamment recours à la rémission de leurs péchés, néanmoins nous ne nions point que parmi les fidèles il n’y ait des hypocrites et réprouvés, desquels la malice ne peut effacer le titre d’Église.

- 28. Sous cette créance nous protestons que là où la Parole de Dieu n’est reçue, et où on ne fait nulle profession de s’assujettir à elle, et où il n’y a nul usage des Sacrements : à parler proprement, on ne peut juger qu’il y ait aucune Église. Partant nous condamnons les assemblées de la Papauté, vu que la pure vérité de Dieu en est bannie, èsquelles les Sacrements sont corrompus, abâtardis, falsifiés, ou anéantis du tout ; et èsquelles toutes Superstitions et Idolâtries ont la vogue. Nous tenons donc que tous ceux qui se mêlent en tels actes, et y communiquent, se séparent et retranchent du Corps de Jésus Christ. Toutefois, parce qu’il reste encore quelque petite trace d’Église en la Papauté, et même que la substance du Baptême y est demeurée, joint que l’efficace du Baptême ne dépend pas de celui qui l’administre, nous confessons ceux qui y sont baptisés n’avoir besoin d’un second Baptême. Cependant à cause des corruptions qui y sont, on n’y peut présenter les enfants sans se polluer.

- 29. Quant est de la vraie Église, nous croions qu’elle doit être gouvernée selon la Police que notre Seigneur Jésus Christ a établie : C’est qu’il y ait des Pasteurs, des Surveillants et Diacres, afin que la pure doctrine ait son cours, que les vices soient corrigés et réprimés, et que les pauvres et tous autres affligés soient secourus en leurs nécessités ; et que les assemblées se fassent au nom de Dieu, èsquelles grands et petits soient édifiés.

- 30. Nous croions tous vrais Pasteurs, en quelque lieu qu’ils soient, avoir même autorité et égale puissance sous un seul chef, seul souverain et seul universel Évêque Jésus-Christ ; et pour cette cause, que nulle Église ne doit prétendre aucune domination ou seigneurie sur l’autre.

- 31. Nous croions que nul ne se doit ingérer de son autorité propre pour gouverner l’Église, mais que cela se doit faire par élection, en tant qu’il est possible et que Dieu le permet. Laquelle exception nous ajoutons notamment, parce qu’il a fallu quelque fois, et même de notre temps, (auquel l’état de l’Église était interrompu) que Dieu ait suscité des gens d’une façon extraordinaire pour dresser l’Église de nouveau, qui était en ruine et désolation. Mais quoi qu’il en soit, nous croions qu’il se faut toujours conformer à cette règle, Que tous Pasteurs, Surveillants et Diacres aient témoignage d’être appelés à leur office.

- 32. Nous croions aussi qu’il est bon et utile, que ceux qui sont élus pour être Superintendants, avisent entre eux quel moyen ils devront tenir pour le régime de tout le corps, et toutefois qu’ils ne déclinent nullement de ce qui nous en a été donné par notre Seigneur Jésus Christ. Ce qui n’empêche point qu’il n’y ait quelques Ordonnances particulières en chaque lieu, selon que la commodité le requerra.

- 33. Cependant nous exclurons toutes inventions humaines et toutes Lois qu’on voudrait introduire sous ombre du service de Dieu, par lesquelles on voudrait lier les consciences ; mais seulement recevons ce qui fait et est propre pour nourrir concorde, et tenir chacun depuis le premier jusques au dernier en obéissance. En quoi nous avons à suivre ce que notre Seigneur Jésus a déclaré quant à l’excommunication ; laquelle nous approuvons et confessons être nécessaire avec toutes ses appartenances.

- 34. Nous croions que les Sacrements sont ajoutés à la Parole pour plus ample confirmation, afin de nous être gages et méreaux de la grâce de Dieu, et par ce moyen aider et soulager notre foi, à cause de l’infirmité et rudesse qui est en nous ; et qu’ils sont tellement signes extérieurs, que Dieu opère par eux en la vertu de son Esprit, afin de ne nous y rien signifier en vain ; toutefois nous tenons que toute leur substance et vérité est en Jésus Christ ; et si on les en sépare, ce n’est plus rien qu’ombrage et fumée.

- 35. Nous en confessons seulement deux, communs à toute l’Église, desquels le premier, qui est le Baptême, nous est donné pour témoignage de notre adoption ; parce que là nous sommes entés au Corps de Christ, afin d’être lavés et nettoyés par son Sang, et puis renouvelés en sainteté de vie par son Saint Esprit. Nous tenons aussi, bien que nous ne soyons baptisés qu’une fois, que le profit qui nous est là signifié s’étend à la vie et à la mort, afin que nous ayons une signature permanente, que Jésus Christ nous sera toujours justice et sanctification. Or bien que ce soit un Sacrement de Foi et de Pénitence, néanmoins parce que Dieu reçoit en son Église les petits enfants avec leurs Pères, nous disons que par l’autorité de Jésus Christ les petits enfants engendrés des fidèles doivent être baptisés.

- 36. Nous confessons que la sainte Cène (qui est le second Sacrement) nous est témoignage de l’union que nous avons avec Jésus Christ ; d’autant qu’il n’est pas seulement une fois mort et ressuscité pour nous, mais aussi nous repaît et nourrit vraiment de sa chair et de son Sang, à ce que nous soyons un avec lui, et que sa vie nous soit commune. Or bien qu’il soit au Ciel jusques à ce qu’il vienne pour juger tout le monde ; toutefois nous croions que par la vertu secrète et incompréhensible de son Esprit il nous nourrit et vivifie de la substance de son Corps et de son Sang. Nous tenons bien que cela se fait spirituellement, non pas pour mettre au lieu de l’effet et de la vérité, imagination ni pensée ; mais d’autant que ce mystère surmonte en sa hautesse la mesure de notre sens, et tout ordre de nature. Bref, pour ce qu’il est céleste, ne peut être appréhendé que par Foi.

- 37. Nous croions (ainsi qu’il a été dit) que tant en la Cène qu’au Baptême, Dieu nous donne réellement et par effet ce qu’il y figure. Et partant nous conjoignons avec les signes la vraie possession et jouissance de ce qui nous est là présenté. Et par ainsi, tous ceux qui apportent à la table sacrée de Christ une pure foi comme un vaisseau, reçoivent vraiment ce que les signes y testifient ; c’est que le Corps et le Sang de Jésus Christ ne servent pas moins de manger et boire à l’âme, que le Pain et le Vin font au Corps.

- 38. Ainsi nous tenons que l’eau étant un élément caduc, ne laisse pas de nous testifier en vérité le lavement intérieur de notre âme au Sang de Jésus Christ, par l’efficace de son Esprit, et que le Pain et le Vin nous étant donnés en la Cène nous servent vraiment de nourriture spirituelle, d’autant qu’ils nous montrent comme à l’œil, la chair de Jésus Christ nous être notre viande, et son sang notre breuvage. Et rejetons les Fantastiques et Sacramentaires, qui ne veulent point recevoir tels signes et marques, vu que notre Seigneur Jésus prononce, Ceci est mon Corps, et Cette Coupe est mon Sang.

- 39. Nous croions que Dieu veut que le monde soit gouverné par Lois et Police, afin qu’il y ait quelque bride pour réprimer les appétits désordonnés du monde. Et ainsi, qu’il a établi les Royaumes, Républiques, et toutes autres sortes de Principautés, soit héréditaires ou autrement et tout ce qui appartient à l’état de justice, et en veut être reconnu Auteur ; à cette cause il a mis le glaive en la main des Magistrats pour réprimer les péchés commis non seulement contre la seconde Table des Commandements de Dieu, mais aussi contre la première. Il faut donc à cause de lui, que non seulement on endure que les Supérieurs dominent, mais aussi qu’on les honore et prise en toute révérence, les tenant pour ses Lieutenants et Officiers, lesquels il a commis pour exercer une charge légitime et sainte.

- 40. Nous tenons donc qu’il faut obéir à leurs Lois et Statuts, payer Tributs, Impôts, et autres devoirs, et porter le joug de sujétion d’une bonne et franche volonté, encore qu’ils fussent infidèles, moyennant que l’Empire souverain de Dieu demeure en son entier. Ainsi nous détestons ceux qui voudraient rejeter les Supériorités, mettre communauté et confusion de biens, et renverser l’ordre de la justice.

 1563 - L’adresse au Roi

Le document qui suit a été rédigé par Théodore de Bèze, pour présenter la profession de foi protestante au Roi Henri II. Il a choisi un moment favorable à une telle démarche : nous sommes en 1563, et la paix d’Amboise vient d’être signée entre catholiques et protestants.

La Paix d’Amboise, ou édit d’Amboise, Voir le texte de cet Édit a été signée le 19 mars 1563 par Louis de Condé, chef des protestants, et Anne de Montmorency, chef de l’armée catholique. Elle confirme la liberté de conscience accordée par l’édit de Saint-Germain (janvier 1562), accorde l’amnistie aux calvinistes, mais restreint l’exercice du culte protestant en dehors des villes et sur les terres de certains seigneurs.

Si elle marque la fin de la première guerre de religion, cette paix n’est que peu durable, puisque les affrontements reprennent quatre ans plus tard.
(source Wikipédia)

 Les François qui désirent vivre selon la pureté de l’Evangile de Nostre Seigneur Iésus Christ.

Au Roy.

Sire, nous rendons grâces a Dieu de ce que n’ayans eu iusques icy aucun accès a vostre Maiesté, pour luy faire entendre la rigueur des persécutions que nous avons endurées, et endurons iournellement pour vouloir suyvre la pureté de l’Evangile, et le repos de nostre conscience : maintenant il nous fait cet heur de veoir qu’avez la volonté de connoitre le mérite de nostre cause, suyvant l’Edit dernier donné à Amboise au moys de Mars, /’an present 1559, qu’il a pleu a vostre Maiesté faire publier. Qui est la cause qu’à présent nous osons ouvrir la bouche : laquelle nous a esté parcidevant fermée par l’iniustice et violence de plusieurs voz officiers, estans plustost incitez de haine contre nous, que de bonne affection à vostre service. Et à fin, sire, que nous puissions pleinement informer vostre Maiesté de ce qui concerne cette cause, nous vous supplions très-humblement de voir et entendre nostre Confession de Foy, laquel/e nous vous présentons : espérans qu’elle nous sera défence suffisante centre tous les blasmes et opprobres, dont iusques icy avons esté chargez à grand tort par ceux qui ont tousiours fait mestier de nous condamner, premier que nostre cause leur fust conneuë. En laquelle, Sire nous pouvons protester qu’il n’y a aucune chose qui repugne à la parole de Dieu, ne qui contrevienne à I’hommage que nous vous devons.

Car les articles de nostre Foy qui sont descrits assez au long en nostre Confession, reviennent tous a ce poinct, que puisque Dieu nous a suffisamment declaré sa volonté par ses Prophètes et Apostres, et mesmes par la bouche de son fils nostre Seigneur lesus Christ, nous devons cet honneur et révérence a la parole de Dieu de n’y rien aioutter du nostre : mais de nous conformer entierement a la reigle qui nous y est prescritte. Et pour ce que l’Eglise Romaine, laissant l’usage et coustume à la primitive Eglise, a introduit nouveaux commandemens et nouvelle forme du service de Dieu, nous estimons estre tres-raisonnable de préférer les commandemens de Dieu, qui est la vérité mesme, aux commandemens des hommes : qui de leur nature sont enclins a mensonge et vanité. Et quoy que noz adversaires prétendent à l’encontre de nous, si pouvons nous dire devant Dieu et les hommes, que nous ne souffrons pour autre raison que pour maintenir nostre Seigneur lesus Christ estre nostre seul Sauveur et Redempteur, et sa doctrine seule doctrine de vie et de salut.

Et cette est la seule cause, Sire, pour laquelle les bourreaux ont en tant de fois les mains souillées du sang de voz poures suiets, lesquels n’espargnent point leurs vies pourmaintenir cette mesme confession de Foy, ont bien peu faire entendre a tous qu’ils estoyent poussez d’autre esprit que de celuy des hommes, qui naturellement ont plus de soucy de leurs repos et commoditez, que de l’honneur et gloire de Dieu.

Et partant. Sire, suyvant, la bonté et douceur de laquelle promettez user envers voz poures suiets, nous supplions tres-humblement vostre Maiesté nous faire cette miséricorde, que de prendre en main la connoissance de la cause, pour laquelle estans poursuyvis a toute heure ou de mort, ou de bannissement, nous perdons par ce moyen la puissance de vous faire le tres-humble service que nous vous devons. Qu’il plaise donq a vostre Maiesté, Sire, a lieu des feus et glaives dont on a usé parcidevant, faire decider nostre confession de Foy par la parole de Dieu : donnant permission et seureté pour ce faire. Et nous espérons que vous-mesme serez iuge de nostre innocence, connoissant qu’il n’y a en nous ny hérésie, ny rebellion aucune : mais que nous tendons seulement à ce but, de pouvoir vivre en saine conscience, servans à Dieu selon ses commandemens, et honorans vostre Maiesté en toute obéissance et servitude.

Et par ce que nous avons nécessairement besoin d’estre, par la prédication de la parole de Dieu, retenus en nostre devoir et office tant envers luy : qu’envers vous : nous vous supplions très-humblement, Sire, qu’il nous soit permis d’estre quelquefois assemblez tant pour estre exhortez par la parole de Dieu à sa crainte, que pour estre conformes par I’administration des Sacremens que nostre Seigneur Iésus Christ a instituez en son Eglise. Et s’il plaist a vostre Maiesté nous donner lieu, auquel un chacun puisse voir ce qui se fait en noz assemblées, la seule veue nous absoudra de l’accusation de tant de crimes énormes, dont nosdittes assemblées ont esté diffamées parcidevant. Car on n’y pourra veoir que toute modestie et chasteté, et on n’y pourra ouyr que louanges de Dieu, exhortations à son service, et prières pour la conservation de vostre Maiesté et de vostre Royaume. Que s’il ne vous plaist nous faire tant de grâce, au moins qu’il nous soit permis de poursyvre particulièrement entre nous avec repos l’ordre qui y est estably.

Vous supplions très-humblement, Sire, de croyre, que oyant lire cette supplication qui vous est maintenant présentée, vous oyez les cris et gémissemens dune infinité de voz poures suiets qui implorent vostre miséricorde : a ce qu’elle esteigne les feus que la cruauté de voz iuges a allumez en vostre Royaume. Et ainsi qu’il nous soit loisible, servans à vostre Maiesté de servir à celuy qui vous a élevé en vostre dignté et grandeur.

Et s’il ne vous plaist, Sire, d’ouyr nostre voix, qu’il vout plaise d’ouyr celle du Fils de Dieu, lequel vous ayant donné puissance sur nos biens, sur noz corps et sur nostre propre vie : vous demande que la puissance et domination sur noz ames et consciences (lesquelles il s’est acquises au prix de son sang) luy soyent réservées.

Nous vous supplions, Sire, qu’il vous conduise tousiours par son Esprit, accroissant avec vostre aage, vostre grandeur et puissance, vous donnant victoire contre tous voz ennemis, establissant pour iamais en touteen toute équité et iustice le throsne de vostre Maiesté : devant laquelle aussi il luy plaise nous faire trouver grâce, pour resentir quelque fruit de nostre présente supplication, à fin qu’ayons changé nos peines et afflictions à quelque repos et liberté, nous changeons aussi noz pleurs et larmes à une perpétuelle action de grâces à Dieu, et à vostre Maiesté, pour avoir fait chose a luy très-agréable, très-digne de vostre bonté et iustice, et très-nécessaire pour la conservation de voz plus humbles et plus obéissans suiets et serviteurs.

 Extrait des Actes du VIIème synode des Eglises Réformées tenu à la Rochelle du 2 au 11 avril 1571

Le synode national protestant de 1712

Septième synode national des Eglises Réformées de France

Tenu à la Rochelle le 2. d’Avril & les 9. jours suivans, l’an de Grâce M. D. LXXI. Et l’onzième Année du Règne de CHARLES IX. Roi de France.

Dans lequel Synode Théodore de Beze, Ministre de l’Eglise de Généve, fut élu pour Modérateur, & Nicolas de Galars avec Jean de la Rocheraye choisis pour Scribes.

Matières générales.

- Article I. Parce que les bons Réglemens de Discipline Ecclesiastique viennent de la pureté de la Doctrine bien établie, & soigneusement conservée dans l’Eglise ; il a été resolu de commencer par la Confession de Foi des Eglises Reformées de France.

- II. D’autant que nôtre Confession de Foi est imprimée de différentes manières, le Synode déclare que celle-là est la véritable Confession de Foi de nos Eglises Reformées de France, qui commence par ces paroles, Nous croions qu’il n’y a qu’un seul Dieu : laquelle Confession a été dressée au premier Synode National tenu à Paris le 25. Mai de l’An 1559.

- III. Surquoi Monsieur Théodore de Beze a donné avis qu’il y a des Hérétiques dans la Transilvanie & la Pologne qui sement des erreurs contre la vérité de la Nature Divine & de la Nature Humaine, toutes deux unies en la personne de Jesus-Christ : & qu’ils nient cette verité, pour renouveller les faux dogmes de la plupart des anciens Hérésiarques, & specialement ceux de Samosatenus, Arrius, Photinus, Nestorius, Eutiches & autres, entre lesquels on doit aussi ranger Mahomet le plus redoutable de tous les Antitrintaires. Cet avis a été trouvé de si grande importance par tous ceux qui sont assemblés dans ce Synode, qu’ils protestent avoir en horreur ces abominables Hérésies, & déclarent unanimement qu’ils detestent toutes les erreurs sur lesquelles plusieurs faux Docteurs voudraient les établir : & en consequence de cela tous les Pasteurs, Anciens, Diacres, & généralement tous les fidèles sont exhortés par ce Synode d’empêcher que ces Hérésies ne s’introduisent en aucune manière dans les Eglises Reformées de France.

- IV. Le Ministre de Normandie a pareillement averti cette Assemblée des erreurs du Sieur Lozain ; surquoi il a été resolu que Messieurs de Chandieu & de l’Estang examineront la doctrine dudit Lozain, pour en faire le raport : cependant on a déclaré qu’on la rejette & déteste, & que les Evêques d’Angleterre seront avertis du transport des Livres des susdits Hérétiques, qui se fait en leur païs, afin qu’ils y en défendent la lecture, s’ils ne peuvent pas en empêcher l’entrée ni la vente dans leurs Diocéses.

- V. Le 29. Article de la Confession de Foi, & les autres concernant la discipline de l’Eglise , aiant été lus & proposés, le Ministre de Bourdeaux a donné avis qu’un Médecin soutient que le Magistrat est le Chef de l’Eglise, & que ce que les Ministres entreprennent n’est que tirannie, & qu’il a donné un Ecrit contenant ses raisons, signé de sa main. Surquoi il a été dit que l’Assemblée ratifie le susdit Article, & que nôtre Confession rejette l’erreur dudit Médecin, & de tous autres qui veulent abolir la Discipline de l’Eglise, en la confondant avec le Gouvernement Civil & Politique des Magistrats, & qu’elle condanne aussi toutes les erreurs qui procèdent de cette fausse opinion.

- VI. De plus ladite Assemblée a chargé Monsieur de Beze de faire une Réponse qui impugne lesdits Articles, contraires à notre Confession, touchant le Gouvernement & la Discipline de l’Eglise, & de réfuter aussi ce Médecin nommé par ledit frère de Bourdeaux, lequel fournira à Monsieur de Beze tout ce qui a été écrit sur cette matière pour faire ladite Réponse, laquelle il communiquera aux frères de Genève.

- VII. Sur le 36. Article de ladite Confession au lieu de l’Unité, il faut mettre Union. Sur quoi il a été remontré par les Députés de l’Isle de France & de Berry, qu’il seroit besoin d’expliquer lesdits articles en ce qu’ils parlent de la participation a la Subbstance de Jesus-Christ en la Cene ; mais après une assés longue conférence, il a été resolu que le Synode aprouvant nôtre Confession, rejette l’opinion de ceux qui ne veulent pas recevoir le mot de Substance contenu audit Article : par lequel mot ledit Synode n’entend aucune conjonction, ni mélange, ni changement, ni transmutation de quoi que ce soit d’une façon charnelle & grossiére qui ait du raport à la matière des corps ; mais une conjonction vraie, très-étroite, & d’une façon spirituelle, par laquelle Jesus-Christ lui-même est tellement fait nôtre, & nous siens, qu’il n’y a aucune conjonction de corps, ni naturelle, ni artificiele, qui soit si étroite ; laquelle néanmoins n’aboutit point à faire que sa Substance, ou sa Personne jointe avec nos personnes, en compose quelque troisième ; mais seulement à faire que sa vertu, & ce qui est en lui de salutaire pour les hommes, nous soit, par ce moien, plus étroitement donné & communiqué. C’est pourquoi nous ne sommes pas du sentiment de ceux qui disent que nous participons seulement à ses mérites, & aux dons qu’il nous communique par son Esprit, sans que lui-même soit fait nôtre : mais au contraire nous adorons ce grand Mystere surnaturel & incomprehensible de l’opération réelle & très-efficace de Jesus-Christ en nous, comme l’Apotre St. Paul le témoigne dans son Epitre aux Ephesiens. Nous croions donc pour cet effet que nous sommes faits participans du Corps de Jesus-Christ livré pour nous, & de son sang répandu pour nous, & que nous sommes chair de sa chair, & os de ses os, en le recevant & tous ses dons avec lui, par Foi engendrée en nous par l’éficace & la vertu incompréhensible du Saint Esprit : Et nous entendons ainsi ces passages de l’Evangile : Celui qui mange la chair & qui boit le sang de Jesus a la Vie éternelle, Jesus Christ est le cep & nous sommes les sarmens, & qu’il nous faut demeurer en lui, afin de porter du fruit, que nous sommes membres de son corps : & que tout ainsi que nous tirons nôtre mort du premier Adam, en tant que nous participons à sa Nature, ainsi-faut-il que nous participions vraiement au second Adam, afin d’en tirer nôtre vie. C’est pourquoi tous les Pasteurs & généralement tous les fidèles feront exhortés de ne donner aucun lieu aux opinions contraires à ce que dessus, qui est très-expressement fondé sur la Parole de Dieu.

- VIII. Finalement après que la lecture de la Confession de foi a été achevée, on a resolu que, sans y rien ajouter, trois Copies en seront faites en Parchemin, dont l’une sera gardée en cette Ville de la Rochelle, l’autre en Bearn, la troisième à Genève, & qu’elles seront toutes trois signées par les Ministres & Anciens de ce Roiaume, au nom de toutes les Eglises ; comme aussi qu’on supliera la Reine de Navarre & Messieurs les Princes de Navarre & de Condé & les autres Seigneurs, de les signer.


Voir en ligne : Sources documentaires sur Jean Calvin

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Se connecter
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Lien hypertexte

(Si votre message se réfère à un article publié sur le Web, ou à une page fournissant plus d’informations, vous pouvez indiquer ci-après le titre de la page et son adresse.)

Ajouter un document

Rechercher dans le site

Un conseil : Pour obtenir le meilleur résultat, mettez le mot ou les mots entre guillemets [exemple : "mot"]. Cette méthode vaut également pour tous les moteurs de recherche sur internet.