Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

Accueil > Grands thèmes d’histoire locale > Villes, bourgs et villages > 17 Fouras > 1753 - Claude-Félix Masse fait un rapport sur les fortifications de (...)

1753 - Claude-Félix Masse fait un rapport sur les fortifications de l’Ile d’Aix et de Fouras

samedi 10 décembre 2016, par Jean-Claude, Pierre, 372 visites.

La famille Masse, géographes de père en fils, a vécu et exercé de nombreuses années en Aunis, Saintonge et Guyenne, au 18ème siècle. Nous leur devons une abondante production de cartes, mémoires et reportages, principalement sur la partie côtière de cette région. A en croire Claude-Félix Masse, les fortifications de Fouras et de ses environs ne sont pas en très bon état.

Source : Mémoire abrégé sur l’état actuel des postes, de l’Isle d’Aix, Fouras, redoutte de l’Aiguille, et fort de la Pointe - BNF Gallica

- > documents de Claude Masse

 Isle d’Aix

Ce poste est sitüé sur le roch, à l’extrémité et au sud d’une petite isle dont il occupe toute la pointe, et tient en sûreté sous la protection de son feu les vaisseaux de guerre qui sont obligés de moüiller dans la rade de l’îsle d’Aix. Il est formé du côté de la mer par une enceinte irrégulière circulaire en maçonnerie de pierre sèche établie sur un rocher ou banche qui assèche toutes les marées et se délite par pluyes et gelées. Le côté de terre est occupé par un ouvrage à corne en belle et bonne maçonnerie dont les deux demy bastions sont à orillon [1] dans lesquels il y a des cazemates et de très beaux souterrains. Au milieu de la courtine, un donjon de figure octogonale entouré de fossés dans lesquels la mer mont. Sa capacité est occupée par un magasin à poudre, arcenal, corps de garde, et autres, et à son sommet une plate-forme percée d’embrazures au milieu de laquelle est la chapelle.

Devant le dit front et donjon est une demi-lune aussi en bonne maçonnerie mais d’une petite capacité avec un corps de garde dans sa gorge, tout ce front faisant face à la terre est envelopé de fossés et chemins couverts mais si imparfaits qu’il n’en paroist en quelque façon que la forme, les fossés n’étant escavés que pour l’emplacement des revêtemens. L’intérieur du fort n’est qu’un tas de pierres et moilons si mal arrangés et en mauvais ordre qu’à peine y peut-on démêler la figure d’une forteresse. Ces pierres proviennent de l’excavation des fossés dont on avoit fait des approvisionnemens pour mettre ce poste en sa perfection. Ses bâtiments ne consistent qu’en un seul corps de cazernes assez joly en apparence, mais trop petit pour loger la garnison qui ne consiste pourtant qu’en deux compagnies invalides. Le bas de ces cazernes est occupé en partie par le commandant qui y a un appartement assez complet, et devant son logement un petit hangard servant de bûcher, büanderie et latrines, ensuitte une chambre où il y a un four, et deux autres occupées par le boulanger, un cachot ou prison et au pignon de l’oüest des commodités dont on ne fait aucun usage, en suitte deux chambres occupées par un cantinier, une par l’ingénieur est une par le capitaine commandant, d’où il résulte que dans tout le rez-de-chaussée de ce bâtiment il n’y peut loger qu’une très petite partie des soldats, et pour contenir le reste on a été obligé de pratiquer des chambres dans les greniers qui ont le défaut d’être si bas que les soldats ne peuvent s’y tenir que courbés, et moitié des officiers sont dans la dure nécessité de loger à leurs frais dans la petite ville où Bourg qui est au pied du glacis. Il y a dans l’intérieur de ce fort un puys dont l’eau et salée au point qu’on en peut faire aucun usage et la garnison est obligée d’en aller chercher à deux puys qui sont sur l’esplanade.

On a proposé à diverses reprises d’augmenter les bâtiments, de reconstruire la batterie circulaire, achever le front du côté de terre, et généralement tout ce qui peut convenir à un poste qui à tous égards est de la dernière importance, puisque de luy dépend la conservation du port de Rochefort d’où les vaisseaux ne peuvent sortir qu’en passant sous son feu, qu’il protège l’embouchure de la rivière de Charente, celle de la Seudre, du havre de Broüage, les Isles de Ré, d’Olleron, Madame, et autres, et les côtes de Saintonge, Aulnis et Poitou. Et si malheureusement ce poste venoit à être abandonné et à tomber en la puissance des ennemis il ne pourroit paroître dans tous ces parages ny vaisseaux ny chaloupes, ce qui détruiroit entièrement le commerce, la marine du Roy, et occasionneroit la perte des provinces susdites. Il est actuellement en très mauvais état, tout le front de la mer qui comme il est dit n’est qu’en pierres seiches, est renversé en différentes parties en brèche sur la longueur d’environ 100 toises, et cella est si considérable qu’il est en quelque façon inutile de garder la porte, puisqu’il est très aisé d’entrer partout à la faveurs desdites brèches.

Il y a dans l’Isle un seul moulin à vent à l’usage de la garnison et des habitans, le Roy en a toujours gratifié Mrs les commandans sous la charge de l’entretenir. Ils en ont jusqu’à présent touché le revenu, mais négligé les réparations et entretiens de façon qu’on n’en peut presque plus faire usage tombant en ruine ainsi que le logement du meunier. Le grand pont qui traverse le fossé vis-à-vis du donjon est en très mauvais état, il sera indispensable de le refaire à 9 l’année prochaine.

 Château de Fouras

Le château de Fouras - Dessin de Jean-Claude Chambrelent

Sitüé près de l’embouchure et à la rive droite de la rivière de Charente, sur un rocher au bord de la mer, il consiste dans un donjon de figure quarrée flanqué de trois tours rondes et du côté de la mère d’une enceinte basse ou fausse braye, le tout percé d’embrazures et de parapets à Barbette [2]. Au milieu du tout une tour quarrée qui a à son sommet une platte-forme percée d’embrazures. De deux côtés il est entouré de fossez à un desquels fait face et joint une avant-cour quarrée longue bordée de deux corps de cazernes, et une en face de ladite cour où est la porte est percée de créneaux. Le coté de cette avant-cour faisant face à la mer est bordée d’une enceinte percée d’embrazures, et les deux autres ne le sont que par des excavations de fossez très imparfaits dans lesquels les soldats invalides ont pratiqué et cultivent de petits jardins. Ses bâtiment consistent dans la cour quarrée où on a pratiqué un logement pour le commandant, lequel ne l’habitant point, se tenant à l’île d’Aix, y a établi pour gardien son cantinier qui fait usage des caves, cuisine, et autre. Et au sommet sous la plate-forme deux chambres servant de prisons. Deux tours de l’enceinte du donjon sont occupées par l’artillerie qui s’en sert pour magasin à poudre et arsenal. La troisième tour n’est occupée que par un escalier qui descend à la fausse braye. Il y a auprès des latrines, une chambre avec un four, et un grand corps de garde pour les soldats. Les deux corps de cazerne dans la basse-cour sont occupés par la garnison qui consiste dans une compagnie d’invalides, par les officiers de cette troupe qui ont peine à y loger, n’y ayant place que pour quatre de ces Mrs, par le capitaine commandant, par l’ingénieur et par le cantinier qui occupe une chambre. Au milieu de la cour est un puys dont l’eau n’est pas bonne, et dont on ne se sert que faute d’autre.

Ce poste a pour principale utilité de protéger l’embouchure de la rivière de Charente et croise ses feux avec la Redoute de l’Aiguille, le fort de la Pointe, et l’Isle Madame. Il est encore en assez bon état et on demande pour dépenses extraordinaires le pont du donjon et le surhaussement du mur de profil de la côte.

 Fort de la Pointe

C’est une batterie circulaire, partie à barbette et partie percée d’embrazures, bâti sur des vazes au sud du château de Fouras à l’embouchure de la rivière de Charente, sur sa rive droite. Les maçonneries sont bonnes, il ne manque à ce poste que d’être fermé par sa gorge. On propose cette année de le faire en ouvrant un fossé dont les terres formeront une digue ou parapet au moyen duquel on arrêtera les eaux de la mer qui dans les malines passe par-dessus la batterie et dégradent les remparts ainsi que le petit logement dans lequel le roi entretient un gardien qui a 100# de gages.

 Redoute de l’Aiguille

La redoute de l'Aiguille à Fouras - Photo : P. Collenot - 2016

Située dans une péninsule dont le fond est sable au nord-ouest du château de Fouras, avec lequel il croise ses feux. Sa figure est carrée, les parapets percés d’embrazures, et autres à barbette, le tout revêtu de bonne maçonnerie, son intérieur occupé de tous les logements convenant à la capacité du poste. Le Roy y entretient un gardien qui a aussi 100# de gages.

Le pont de cette Redoute est en fort mauvais état : il sera indispensable de le refaire à neuf l’année prochaine.

À Fouras le 25ème aoüst 1753

Masse


[1Orillon : FORTIF. ,,Saillie arrondie que forme sur le flanc la face d’un bastion`` (Chabat 1881). Inventé par les Italiens, le système des orillons a été appliqué par Vauban, mais on y a renoncé aujourd’hui parce qu’il gêne les feux de flanc (Chabat 1881). - CNRTL

[2Barbette : Plate-forme ou épaulement d’où une pièce d’artillerie peut tirer dans tous les sens.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Se connecter
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Lien hypertexte

(Si votre message se réfère à un article publié sur le Web, ou à une page fournissant plus d’informations, vous pouvez indiquer ci-après le titre de la page et son adresse.)

Ajouter un document

Rechercher dans le site

Un conseil : Pour obtenir le meilleur résultat, mettez le mot ou les mots entre guillemets [exemple : "mot"]. Cette méthode vaut également pour tous les moteurs de recherche sur internet.