Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

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1372 - 1373 - Les défaites anglaises en Aunis, Saintonge, Angoumois et Poitou - 2

août-septembre 1372 : les villes de Saintonge et d’Angoumois tombent aux mains des Français

mercredi 4 janvier 2012, par Pierre, 1001 visites.

En août et septembre 1372, successivent, Soubise, Angoulême, Saint-Jean d’Angély, Taillebourg, Saintes et Pons tombent aux mains des Français. Jean de Grailly, captal de Buch, principal allié des Anglais, est capturé. Rien ne semble plus aller pour les troupes d’Edouard III.

Pour comprendre les mots oubliés de la langue de Froissart, on consultera utilement, sur le site Histoire Passion, le Glossaire du français du 14ème siècle, dans les chroniques de Froissart :
- 1ère partie : A - H
- 2ère partie : I - W

Source : Chroniques de J. Froissart. T. 8, 1 (1370-1377) / publiées pour la Société de l’histoire de France par Siméon Luce - Paris - 1869-1899 - BNF Gallica

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Chronologie de cette période


1372,

- 23 juin. Défaite de la flotte anglaise devant La Rochelle. Voir sur Histoire Passion cette page sur la bataille navale de La Rochelle

- Juillet. Siège de Moncontour et de Sainte-Sévère - Reddition de ces deux places aux Français.

- 7 août. Reddition de Poitiers.

Dans cette page

- Du 22 au 23 août. Défaite et capture de Jean de Grailly, Captal de Buch, connétable d’Aquitaine, et de Thomas de Percy, sénéchal de Poitou, devant Soubise - Reddition de cette place

- Reddition d’Angoulême (8 septembre) - de Saint-Jean-d’Angély (20 septembre), - de Taillebourg, de Saintes (24 septembre) et de Pons (28 septembre).


- Reddition des châteaux ce Saint-Maixent (4 septembre), de Melle et de Civray.

- 8 septembre, reddition de La Rochelle.

- 15 septembre. Prise du château de Benon et reddition de Marans.

- 19 septembre. reddition de Surgères.

- 9 et 10 octobre. reddition de la ville et prise du château de Fontenay-le-Comte.

- 1er décembre. reddition de Thouars et soumission des principaux seigneurs du Poitou et de la Saintonge. - Siège de Mortagne.

1373,

- mars. défaite des Anglais à Chizé.

- 27 mars. occupation de Niort. - Reddition des châteaux de Mortemer et de Dienné

En bleu : texte original de Jean Froissart - En noir : commentaires et notes.

§ 699. Quant li Gascon, li Englès et li Poitevin qui là estoient tout ensamble d’un acord et d’une alliance, entendirent ces nouvelles, si furent plus esmervilliet et esbahi que devant, et n’i eut baron [ne] chevalier qui ne fust durement pensieus et courouchiés, et bien y avoit cause, car il veoient les coses aler diversement. Si disent li Poitevin pour les Gascons et Englès reconforter « Signeur, sachiés de verité que il nous desplaist grandement des coses qui ensi vont en ce pays, se conseil ou remede y poions mettre. Et regardés entre vous quel cose vous volés que nous façons, nous le ferons ne ja en nous vous ne trouverés nulle lasqueté. » « Certainnement, signeur, ce respondirent li Englès, « nous vous en creons bien, et nous ne sons pas pensieu sur vous ne sus vostre estat et afaire, fors sus le infortuneté de nous ; car toutes les coses nous viennent à rebous. Si nous fault avoir sur ce avis et conseil comment à nostre honneur nous en porons perseverer. » Là regardèrent par grant deliberation de conseil et pour le milleur, que ce seroit bon que li Poitevin fesissent leur route à par yaus, et li Englès le leur, et li Gascons le leur et se retraisissent en leurs garnisons, et quand il vorroient chevaucier et il veroient bien ou à emploiier leur chevaucie, il le segnefieroient l’un à l’autre, et il se trouveroient apparilliet. Ceste ordenance fu tenue et se departirent moult amiablement li un de l’autre, et prisent li dit Poitevin le chemin de Touwars, et li Gascon le chemin de Saint Jehan l’Angelier, et li Englès le chemin de Niorth. Ensi se desrompi ceste chevaucie.

Li Englès qui chevauçoient tout ensamble, quant il cuidièrent entrer en le ville de Niorth, on leur cloy les portes, et leur disent li villain de le ville que point là il n’enteroient et qu’il alaissent d’autre part. Or furent li Englès plus courouchié que devant, et disent que ceste rebellion contre telz villains ne faisoit mies à souffrir. Si se appareillièrent tantost et misent en ordenance pour assallir et assallirent de grant corage ; et cil de le ville se deffendirent à leur pooir. Là eut grant assaut et dur, et qui se tint une longe espasse ; mes finablement chil de Niorth ne les peurent souffrir, car il n’avoient nul gentil homme, dont il fuissent conforté et consillié. Et se il se peuissent estre tenu jusques au vespre, il euissent esté secouru et conforté dou connestable, en quel istance il s’estoient clos contre li Englès. Mès li dit Englès le assallirent si virtueusement et de si grant volenté que de force il rompirent les murs et entrèrent ens et occirent le plus grant partie des hommes de le ville, et puis le coururent et pillièrent toute sans nul deport, et se tinrent là jusques à tant qu’il oïrent autres nouvelles.

Découragés par la nouvelle de la prise de Poitiers, les principaux chefs qui composent le corps d’armée du captal de Buch estiment que ce qu’ils ont de mieux à faire, c’est de se séparer afin que chacun aille tenir garnison dans la forteresse confiée à sa garde ; lorsqu’une occasion favorable se présentera de se remettre en campagne, ils se le feront savoir les uns aux autres. En attendant, les Poitevins prennent le chemin de Thouars, les Anglo-Gascons se dirigent vers Saint-Jean-d’Angely et les Anglais vers Niort. Les manants de cette dernière ville veulent en refuser l’entrée aux nouveaux arrivants, mais les Anglais emportent d’assaut la place, qu’ils mettent au pillage après en avoir massacré les défenseurs. P. 62 à 64.


§ 700. Vous avés bien chi dessus oy recorder comment Yewains de Galles à l’ordenance et commandement dou roy de France ala en Espagne parler au roy Henri pour impetrer une partie de se navie. Li rois Henris ne l’euist jamais refusé ne escondi au roy de France, mes fu tous joians quant il peut envoiier. Si ordonna son mestre amiral dan Radigo de Rous à estre patrons, avoech le dessus dit Yewain, de toute ceste armée. Si se partirent dou port de Saint Andrieu en Galisse, quant la navie fu toute preste à quarante grosses nefs, huit galées et trese barges, toutes fretées et appareillies et cargies de gens d’armes. Si singlèrent tant par mer sans avoir empeecement ne vent contraire, qu’il arrivèrent devant le ville de le Rocelle, où il tendoient à venir et ancrèrent tout par devant, et s’i ordonnèrent et establirent par manière de siège. Cil de le Rocelle, quant il veirent celle grosse flotte là des Espagnolz venue, furent durement esbahi car il n’avoient point apris à estre assegié si poissamment par mer ne de telz gens. Toutes fois quel samblant que toute la saison il euissent moustré as Englès, il avoient le corage tout bon françois, mès il s’en dissimuloient ce qu’il pooient, et se fuissent ja très volentiers tourné françois, se il osassent ; mais tant que li chastiaus fust en le main des Englès, il ne pooient, se il ne se mettoient en aventure d’estre tout destruit. Quant cil de le Rocelle veirent que c’estoit tout acertes que on les avoit assegiés, si y pourveirent couvertement de conseil et de remède car il trettièrent secrètement devers Yewain de Gallez et dan Radigo de Rous trettiés amiables par composition tele que il voloient bien estre assegiet, mais il ne devoient riens fourfaire l’un sus l’autre ; si se tinrent en tel estat un terme.

Li connestables de France, qui se tenoit en le cité de Poitiers à tout grant fuison de gens d’armes, envoia a monsigneur Renault, signeur de Pons, en Poito, devant le chastiel de Subize, qui siet sus le Charente à l’emboukure de le mer, et ordonna desous le dessus dit bien trois cens lances, dont la plus grant partie estoient Breton et Pikart. Et y furent envoiiet doi escuier Breton vaillant homme durement, Thiebaus dou Pont et Alyot de Chalay. Si vinrent ces gens d’armes mettre le siège devant le dit chastiel de Subize, et le assegièrent à l’un des lés et ne mies partout. Dedens le forterèce n’avoit que une seule dame veve sans marit, qui s’appelloit la dame de Subize, et pour se loyauté tenir, elle demoroit Englesce ; si estoit là aseulée entre ses gens, et ne cuidoit mies avoir le siège si soudainnement que elle l’eut. Quant elle vei que ce fu acertes et que li sires de Pons et li Breton le cuvrioient telement, si envoia devers monsigneur le captal de Beus qui se tenoit en garnison en le ville de Saint Jehan l’Angelier, en lui priant humlement et doucement que il volsist entendre à lui conforter ; car li sires de Pons et Thiebaus dou Pont Breton et environ trois cens armeures de fier, l’avoient assegiet et le constraindoient durement. Li captaus de Beus, comme courtois et vaillans chevaliers, et qui tous jours fu enclins et en grant volenté de conforter dames et damoiselles, en quel parti que elles fuissent, ensi que tout noble et gentil homme de sanch doivent estre, et sicom il reconforta et aida jadis, et se mist en grant peril ou marchiet à Miaus contre les Jakebonhommes, pour la royne de France qui lors estoit ducoise de Normendie, respondi as messages, qui ces nouvelles li aportèrent « Retournés devers la dame de Subize, et li dittes de par moy que elle se conforte, car je n’entenderai à aultre cose, si l’arai secourue et levet le siège ; et me recommendés à lui plus de cent fois. » Li message furent moult liet de ceste response, et retournèrent à Subise devers leur dame, qui ossi en ot grant joie. Li captaus de Beus ne mist mies en noncalloir ceste emprise, mès envoia tantost devers le capitainne de Saintes, monsigneur Guillaume de Ferintonne et manda monsigneur Henri Haie, senescal d’Angouloime, monsigneur Renault, signeur de Maruel, neveut à monsigneur Raymon, et à Niort monsigneur Thumas de Persi, Jehan Cressuelle et David Holegrave ; et à Luzegnan monsigneur Petiton de Courton, monsigneur Gautier Huet, et monsigneur Meurisse Wis et pluiseurs aultres. Et s’assamblèrent tout ces gens d’armes en le ville de Saint Jehan. Tout ce couvenant et ceste ordenance sceut bien par ses espies, qu’il avoit alant et venant, Yewains de Galles, qui se tenoit devant le Rocelle et ossi le siège dou signeur de Pons qu’il avoit mis et tenoit devant Subize. Si imagina li dis Yewains, qui fu uns moult apers et vaillans homs d’armes, que ceste assamblée dou captal se faisoit pour lever le siège et ruer jus le signeur de Pons et se route. Si s’apensa que il y pourveroit de remède, se il pooit. Si pria tous les milleurs hommes d’armes de sa navie par election, et les trouva [si] appareilliés et obeissans à sa volenté, et fist son fet secretement et eut environ quatre cens armeures de fier ; si les fist tous entrer par ordenance ens es treise barges qu’il avoit amenet d’Espagne, et se mist en l’une, et puis nagièrent et rimèrent tant li notonnier, que il vinrent en l’emboukure de le Charente à l’opposite dou chastiel de Subize, sans ce que li sires de Pons ne la dame de Subize en seuissent riens, et là se tinrent tout quoi à l’ancre sus la ditte rivière.

D. Enrique, roi de Castille, accueille favorablement la demande de Charles V transmise par Owen de Galles. Par l’ordre de ce prince, D. Radigo le Roux(1), grand amiral de Castille, réunit une flotte composée de quarante gros navires, de huit galées et de treize barges, et va jeter l’ancre devant la ville de la Rochelle qu’il soumet à un étroit blocus. Le château de cette ville est toujours occupé par une garnison anglaise, et la crainte de s’exposer aux représailles de cette garnison empêche seule les bourgeois, qui sont Français de cœur, de se soumettre au roi de France ; ils conviennent avec les Espagnols de s’abstenir, pendant la durée du blocus, de tout acte d’hostilité les uns envers les autres.

A peine maître de Poitiers, Bertrand du Guesclin envoie trois cents hommes d’armes bretons et picards sous les ordres de Renaud, seigneur de Pons et de Thibaud du Pont, mettre le siège devant le château de Soubise. La dame de Soubise fait demander du secours au captal de Buch qui tient alors garnison à Saint-Jean-d’Angely. Jean de Grailly concentre dans cette dernière ville des détachements des garnisons anglaises de Saintes, d’Angoulême, de Niort et de Lusignan pour aller renforcer la dame de Soubise et obliger le seigneur de Pons à lever le siège de cette place. Informé de ces préparatifs, Owen de Galles, embarqué sur un des navires de la flotte espagnole(2) à l’ancre devant la Rochelle, va s’embosser à l’embouchure de la Charente en face du château de Soubise(3) avec treize barges montées par quatre cents armures de fer. P. 64 à 67, 307 - 308.

1. D. Rui Diaz de Rojas.

2. Ce détail doit être exact, puisque nous lisons dans le Compte des recettes et dépenses de l’expédition navale des frères Jacques et Morelet de Montmor que les Espagnols prétendirent qu’ils avaient pris part à la capture du captal de Buch, « pour obvier au debat des Espaignolz qui à la prise du dit captal vouloient participer et reclamer droit (Arch. Nat., J 475, n° 1001). D’après l’auteur de la Chronique des quatre premiers Valois, dont le récit paraît émaner d’un témoin oculaire, des Espagnols de la compagnie d’Owen de Galles figurèrent avec honneur parmi les combattants « Et moult bien se portèrent les Espaingnolz qui en la compaignie de Yvain estoient. » Chronique des quatre premiers Valois, p. 240.

3. Le bourg jadis fortifié de Soubise (Charente-Inférieure, arr. Marennes, c. Saint-Agnant) est situé sur la rive gauche de la Charente, à peu de distance de l’embouchure de ce fleuve, entre Rochefort et la mer.


§ 701. Li captaus, qui se tenoit à Saint Jehan l’Angelier et qui avoit fait son mandement de quatre cens hommes, et de plus fu enfourmés ainsi son departement que li sires de Pons et toute somme n’avoit devant Subise non plus de cent lances, si crut ceste information trop legierement, dont il en fu decheus et renvoia le droite moitié de ses gens pour garder leurs forterèces, et se parti de Saint Jehan atout deus cens lances, tous des milleurs à son avis. Et chevauça tant ce jour que sus le nuit il vint assés priès de l’ost as François, qui riens ne savoient de sa venue, et descendi en un bosket et fist toutes ses gens descendre si restraindirent leurs armeures et rechenglèrent leurs chevaus, et puis montèrent sans faire nul effroi. Et chevaucièrent tout quoiement tant que il vinrent ou logeis dou signeur de Pons et des Bretons, qui se tenoient tout asseguret, et ja estoit moult tart. Evous monsigneur le captal et se route, qui entrent sans dire mot ne faire trop grant noise en ces logeis, et commencent à ruer par terre tentes et très et foelliès et à abatre gens, occire et decoper et à prendre. Là furent pris li sires de Pons, Thiebaus dou Pont, Alyos de Chalay et tout chil qui là estoient mort ou pris. Et en furent li Englès si mestre et si signeur, que tout fu leur pour ceste heure.

Yewains de Galles qui estoit à l’autre part à l’encontre de celle host oultre le rivière derrière le dit chastiel, tous pourveus et avisés quel cose il devoit faire et qui bien savoit le venue dou dit captal, avoit pris terre et toutes ses gens ossi, qui bien estoient quatre cens combatans. Et là estoient messires Jakemes de Montmore et Morelès, ses frères. Et portoient ces gens d’armes grant fuison de fallos et de tortis tous alumés, et s’en vinrent par derrière les logeis, où cil Englès se tenoient, qui cuidoient avoir tout fait et tenoient leurs prisonniers dalés yaus ensi que pour tous assegurés. Evous le dit Yewain et se route, qui estoit forte et espesse et en grant volenté de bien faire le besongne, et entrent en ces logeis, les espées toutesnues, et commencent à escriier leurs cris et à occire et decoper gens d’armes et ruer par terre et prendre et fiancier prisonniers et à delivrer chiaus qui pris estoient. Que vous feroi je lonch compte ? Là fu pris li captaus de Beus d’un escuier de Pikardie, qui s’appelloit Pières Danviller, apert homme d’armes durement desous le pennon Yewain. Là furent telement espars et ruet par terre li Englès que il ne se peurent ravoir ne desfendre, et furent tout li prisonnier françois rescous. Li sires de Pons premièrement, qui en fu très ewireus et au quel li aventure fu plus belle qu’à nulz des aultres ; car se li Englès l’euissent tenu jamais, il n’euist veu sa delivrance. Là furent pris messires Henris Haie, messires Meurisses Wis et pluiseur aultre chevalier et escuier, et ossi li seneschaus de Poito, messires Thumas de Persi ; et le prist uns prestres de Galles, chapellains dou dit Yewain, qui s’appelloit messires David House. Là furent priès que tout pris et mort, et se sauvèrent à grant meschief messires Gautiers Hues, messires Guillaumes de Ferrintonne et messires Petiton de Courton et Jehan Cressuelle, qui afuirent vers le forterèce par une estragne voie, ensi que uns varlès les mena, qui savoit le couvine de laiens, les entrées et les issues. Si furent recueilliet de la dame de Subise par une fausse porte, et leur jetta on une plance par où il entrèrent en leur forterèce. Si recordèrent à la ditte dame de Subise leur aventure et comment il leur estoit mesavenu par povre soing. De ces nouvelles fu la dame toute desconfortée, et vei bien que rendre le couvenoit et venir en l’obeissance dou roy de France.

Le captal de Buch, apprenant que le seigneur de Pons n’a pas plus de cent lances devant Soubise, renvoie la moitié de ses gens et ne garde que deux cents lances ; il réussit à surprendre les assiégeants, les met en déroute et fait prisonniers le seigneur de Pons et Thibaud du Pont ; mais il se laisse à son tour surprendre par Owen de Galles, les frères Jacques et Morelet de Montmor(1), qui taillent en pièces les Anglais. Le captal de Buch est pris par un écuyer picard de la compagnie d’Owen de Galles, nommé Pierre d’Auvillers(2), et Thomas de Percy, sénéchal de Poitou, par le chapelain gallois d’Owen, nommé David House(3). Henri Hay, sénéchal d’Angoulême, Maurice Wis, homme d’armes de la garnison de Lusignan, sont également faits prisonniers. Gautier Hewet et Petiton de Curton, capitaines de Lusignan, Guillaume de Faringdon, capitaine de Saintes, Jean Cressewell, l’un des capitaines de Niort, se sauvent à grand’peine au moyen d’une planche que leur jettent les assiégés pour traverser le fossé et d’une poterne par laquelle ils parviennent à se réfugier dans la forteresse de Soubise. P. 67 à 69, 308.

1. Nous possédons aux Archives Nationales le compte détaillé des dépenses de Jacques de Montmor, chevalier, et de Morelet de Montmor, écuyer, frère de Jacques, depuis le 2 juillet jusqu’au 16 décembre 1372 « C’est le compte et parties des sommes de deniers que messire Jacques de Monmor, chevalier, et Morelet de Monmor, escuier, son frère, demandent, requierent et supplient au roy nostre sire estre à eulz paiées et satiffiées et es quelles sommes ilz dient et moustrent le dit seigneur estre tenu à eulz, tant pour cause des gaiges d’eulz et de certaine quantité de gens d’armes, arbalestriers, mariniers et autres, desserviz es guerres du roy nostre dit seigneur, par mer et par terre, comme deniers par eulz pour cellui seigneur frayez, mis, despendus et paiez de leur comptant pour faire en plusieurs manières et pour plusieurs causes le plaisir, service, volonté et commandement du dit seigneur et de son connestable de France, et meesmement par vertu de leurs lettres, c’est assavoir depuis le deuxiesme jour de juillet trois cent soixante et douze, que les dessus diz frères ou l’un d’eulz commencèrent à servir le dit seigneur pour les causes dessus dites, jusques au seiziesme jour de decembre en suivant » (Arch. Nat., J 475, n° 1001).

2. D’après l’auteur de la Chronique des quatre premiers Valois comme d’après Froissart, le gentilhomme auquel se rendit Jean de Grailly, captal de Buch, s’appelait Pierre d’Auvilliers ou d’Auvillers. Il appartenait à une famille plutôt normande que picarde, ainsi du reste que la plupart des hommes d’armes enrôlés dans l’expédition navale d’Owen de Galles, de Jacques et de Morelet de Montmor. « Morelet de Mommor et les Normans, lit-on dans la Chronique des quatre premiers Valois (p. 240), avoient forcloz les Anglois et tenoient le bout d’une rue. » On avait attaqué les Anglais au cri de Claquin ! Notre Dame ! Claquin ! La chronique que nous venons d’indiquer rapporte textuellement les paroles qui furent échangées entre Jean de Grailly et Pierre d’Auvilliers avant la reddition du captal. Il ne faut pas oublier qu’en sa qualité de comte de Longueville Bertrand du Guesclin était à la tête de la chevalerie normande.

3. Thomas de Percy, sénéchal de Poitou, fut pris en effet par un Gallois, mais ce Gallois ne portait pas le nom indiqué par Froissart ; il s’appelait en réalité Honvel Flinc. Par acte daté du château du Louvre le 10 janvier 1373 (n. st.), Thomas de Percy, chevalier d’Angleterre, reconnut qu’il était « prisonnier à Honvel Flinc, de Gales, lequel nous avoit pris en la bataille qui a esté ceste presente année où nous sommes (la pièce est datée de 1372 ancien style) devant la ville de Soubise, ou pais de Guienne, en laquelle bataille fut aussi pris par les gens de très noble et très puissant prince Charles, par la grace de Dieu roy de France, monseigneur Jehan de Gresly, appellé le captal de Buch » (Arch. Nat., J 362, n" 2).


§ 702. Ceste nuit fu tantost passée, car c’estoit en temps d’esté, ou mois d’aoust, mais pour ce que il faisoit noir et brun, la lune estoit en decours. Si se tinrent li François et cil de leur costé tout liet et grandement réconforte, et bien y avoit cause ; car il leur estoit avenu une très belle aventure que pris le captal de Beus, le plus renommé chevalier de toute Gascongne et que li François redoubtoient le plus pour ses hautainnes emprises. De ceste avenue et achievement eut Yewains de Galles grant grasce. Quant ce vint à l’endemain dont la besongne avoit estet le nuit, li dis Yewains et cil qui prisonniers avoient, les fisent mener pour tous perilz eschiewer en leur aultre navie devant le Rocelle, car envis les euissent perdus ; et puis s’en vinrent rengié et ordonné devant le chastiel de Subise. Et mandèrent en leur navie encores grant fuison de Genevois et arbalestriers si fisent grant samblant d’assallir la forterèce, et s’en misent en bon arroi. La dame de Subise qui veoit tout son confort mort et pris, dont moult li anoioit, demanda conseil as chevaliers, qui là dedens estoient retrait à sauveté, monsigneur Gautier Huet, et monsigneur Guillaume de Ferrintonne et monsigneur Petiton de Courton. Li chevalier li respondirent « Dame, nous savons bien que à le longe vous ne vous poés tenir ; et nous sommes cheens enclos ; si n’en poons partir fors par le dangier des François. Nous traitterons devers yaus que nous partirons sauvement sus le conduit le signeur de Pons ; et vous demorrés en l’obeissance dou roy de France. » La dame respondi « Diex y ait part, puis que il ne poet estre autrement. » Adont li troi chevalier dessus nommet envolièrent un hiraut des leurs hors dou chastiel parler à Yewain de Galles et au signeur de Pons, qui estoient tout appareilliet et leurs gens pour assallir. Li dessus dit entendirent à ces trettiés volentiers et eurent grasce de partir tout li Englès qui dedens le fort estoient et de retraire par saufconduit là où mieus leur plaisolt, fust en Poito ou en Saintonge ; si se partirent sans plus attendre. Et la dame de Subize, ses chastiaus et toute sa terre, demora en l’obéissance dou roy de France. Et li dis Yewains [de Galles] se retray en se navie devant le Rocelle qu’il tenoit pour assegie, quoi que compositions fust entre li et chiaus de le ville, que point ne dévoient grever l’un l’autre. Et tint toutdis monsigneur le captal dalés lui, ne point n’avoit volenté d’envoiier en France devers le roy jusques à tant qu’il oroit aultres nouvelles.

Le lendemain de ce combat livré dans la saison d’été, au mois d’août(1), par une nuit fort obscure et pendant la décroissance de la lune(2), Owen de Galles fait donner l’assaut au château. La dame de Soubise consulte les capitaines anglais qui, jugeant la résistance impossible, se décident à entrer en négociations avec les assiégeants et se font délivrer des sauf-conduits pour se retirer en Poitou et en Saintonge. D’après leur conseil, la châtelaine rend sa forteresse aux vainqueurs et rentre sous l’obéissance du roi de France.

Après ce succès, Owen de Galles, qui ne veut se dessaisir du captal son prisonnier(3) que sur l’ordre exprès de Charles V, regagne le gros de la flotte ancrée devant la Rochelle, dont les Français et les Espagnols continuent le blocus. P. 69 à 71, 308.

1. D’après une pièce de comptabilité rédigée au lendemain même de l’affaire de Soubise, Jean de Grailly, captal de Buch, et Thomas de Percy, sénéchal de Poitou, auraient été défaits et pris le lundi
23 août 1372. « Depuis le XXIIe jour d’avril CCCLXXII après Pasques qu’il reçut par moustre les dictes gens à Harefleu jusques au XXIIIe jour d’aoust ensuivant qu’ilz furent arrivez en l’isle d’Oleron et que ce jour le captal de Buch, le seneschal de Poitou et le sire de Mareul (Renaud,
seigneur de Mareuil, neveu de Raymond de Mareuil) furent pris et les gens estans en leurs routes dèsconffiz en la besoingne qui lors fu... » (Arch. Nat., J 475, n° 100/1). Le surlendemain 25 août, la nouvelle de la prise du captal était parvenue à Poitiers, et le duc de Berry, qui depuis la reddition avait établi sa résidence dans cette ville, donna l’ordre de payer six livres tournois à Simon Champion, l’un de ses chevaucheurs, qu’il envoyait à Paris en le chargeant d’apporter cette nouvelle au roi son frère « A Symon Champion, chevaucheur monseigneur, pour faire ses fraiz et despens, en alent de Poitiers à Paris porter lettres de par monseigneur au roy contenant que le captal et plusieurs autres capitaines anglois ont esté desconffis. » (Arch. Nat., KK 251, f 90 v°). Le jeudi 26 août, Philippe, duc de Bourgogne, reçut l’heureuse nouvelle à Chinon, où il donna à cette occasion un grand dîner au comte d’Eu ainsi qu’aux principaux chevaliers du petit corps d’armée qu’il conduisait lui-même en Poitou (Bibl. Nat., Collect. de Bourgogne, t. XXI, f° 8 V°). Le dimanche 29 août, six jours seulement après l’affaire de Soubise, Charles V dépêcha un religieux augustin nommé Frère Jean de Montmor vers Jacques et Morelet, frères du dit Jean, pour les inviter à remettre entre les mains du roi le captal de Buch leur prisonnier. Ce religieux était porteur d’une lettre missive revêtue de la signature du royal expéditeur : Charles, datée du bois de Vincennes et adressée « à noz amez et feaulz Jaques de Monmor, chevalier, et Morelet de Monmor, escuier, frères » (Arch. Nat., J475, n° 100/6).

2. Ce détail est parfaitement exact et prouve que Froissart devait tenir d’un témoin oculaire le récit qu’il nous a transmis de l’affaire de Soubise. En effet, pendant le mois d’août 1372, il y eut nouvelle lune le 3, premier quartier le 9, pleine lune le 16 et dernier quartier le 24 de ce mois. J. P. Escoffier, Calendrier perpétuel, Périgueux, 1880, p. 25 et 351. L’auteur de la Chronique des quatre premiers Valois rapporte l’affaire de Soubise à la nuit du samedi 21 au dimanche 22 août : « Et de là alèrent à Soubise, une forte ville, et s’appareillèrent pour l’assaillir, et estoit jour de samedi... Et lors estoit plus minuyt. » Chron. des quatre premiers Valois, p. 238, 239. - Owen de Galles et les frères de Montmor vinrent attaquer Soubise le samedi 21 ; mais Jean de Grailly, captal de Buch, capitaine de Saint-Jean-d’Angely, informé immédratement de l’attaque des Français, n’a pu accourir au secours des assiégés que dans l’après-midi du dimanche 22. Le combat de Soubise a donc dû se livrer, comme le porte la pièce de comptabilité indiquée plus haut, dans la nuit du 22 au 23 août 1372.

3. Une querelle très vive ayant surgi entre les Français et les Espagnols à l’occasion de la capture de Jean de Grailly, les frères de Montmor firent embarquer le captal de Buch et les autres prisonniers sur une galiote montée par un équipage de 80 mariniers et défendue par 20 arbalétriers et les transportèrent, dès le 23 août, en pleine mer, dans les eaux de l’île d’Oléron, dont les dits frères venaient d’être nommés gouverneurs (Arch. Nat., J 400, n° 67).


§ 703. Vous devés savoir que se li rois d’Engleterre et li Englès furent courouciet de le prise le captal de Beus, li rois de France et li François en furent moult resjoy et en tinrent leur guerre à plus belle, et à plus foible le poissance des Englès. Tantost apriès ceste avenue, li sires de Pons, li sires de Cliçon, li viscontes de Roem, li sires de Laval, li sires de Biaumanoir, Thiebaus dou Pont, Alyot de Calay et une grande route de Bretons et de Poitevins d’une alliance, qui bien estoient cinc cens hommes d’armes, chevaucièrent caudement par devers Saint Jehan l’Angelier, dont li captaus avoit estet chapitainne, et esploitièrent tant que il vinrent devant et fisent grant samblant de l’assallir. Cil de Saint Jehan furent tout esbahi de leur venue, car il n’avoient nul gentil homme, qui les consillast, et si veoient leur chapitainne pris, et le plus grant partie des Englès ; et ne leur apparoit confors de nul costé. Si se rendirent et ouvrirent leurs portes as dessus dis, parmi tant que on ne leur devoit nul mal faire. De ce leur tint on bien couvent. Et il jurèrent foy et seurté et toute obeïssance de ce jour en avant à tenir au roy de France. Quant il eurent ce fait, il s’en partirent et chevaucièrent ossi caudement par devers le cité d’Angouloime, qui est belle et forte, et y apent uns biaus chastiaus ; mais il avoient perdu leur seneschal, monsigneur Henri Haie, et n’estoit là dedens de le partie des Englès, qui les consillast ne confortast. Si furent si esbahi, quant li sires de Cliçon et li sires de Pons et li dessus dit approcièrent leur cité, que il n’eurent nulle volenté d’yaus tenir, et entrèrent en trettiés devers les dis François ; et les aida à faire li sires de Pons, pour tant qu’il y avoit plus grant fiance que ens es Bretons. Si jurèrent feaulté et obeïssance au roy de France et entrèrent li Breton dedens le ditte cité, et là se rafreschirent par un jour, et l’endemain s’en partirent ; si chevaucièrent viers Taillebourch, sus le rivière de Charente, qui se tourna françoise ossi. Et puis chevaucièrent devers le cité de Saintes en Poito, où messires Guillaumez de Ferrintonne, seneschaus de Saintonge, estoit retrais, li quelz dist qu’il ne se renderoit mies si legierement, et fist clore la cité et toutes manières de gens aler à leurs deffenses, fust envis ou volenté. Quant li Breton veirent ce, si se ordonnèrent et apparillièrent de grant manière et commencièrent à assallir la ditte cité de Saintes, et cil dedens à yaus deffendre par le conseil dou dit monsigneur Guillaume et de ses gens, qui pooient estre environ soissante armeures de fier. Et y eut un jour tout entier grant assaut, mès riens n’i perdirent. Si se retraisent au soir li Breton tout las et travilliet en manechant durement chiaus de le ville, et leur disent au partir « Folle gent, vous vos tenés et cloés contre nous, et si ne poés durer que nous ne vous aions. Et quant vous serés pris de force, vostre ville sera toute courue et reubée et arse, et serés tout mort sans merci. » Ces parolles entendirent bien aucun homme de le ville, si les notèrent grandement et les segnefiièrent à l’evesque dou lieu, qui en fist grant compte, et leur dist « Se il avient ensi que li Breton vous prommettent, vous n’en arés mies mains : par le oppinion de monsigneur Guillaume porions nous estre tout perdu sans nul recouvrier. » Lors demandèrent cil de le cité à l’evesque conseil, comment il poroient ouvrer pour le mieulz sus cel estat. Li evesques leur dist, qui desiroit à estre françois : « Prendés monsigneur Guillaume de Ferrintonne et les plus notables de conseil, et les mettés en prison, ou dittes que vous les occirés, se il ne s’acordent à rendre le cité. » Ensi que li dis evesques le consilla, fu fait. De nuit cil de Saintes prisent de force leur senescal à son hostel et huit de ses escuiers, et leur disent « Signeur, nous ne nos sentons mies fort assés pour nous tenir contre le poissance de ces Bretons, car encores doient il i estre de matin rafreschi de nouvelles gens de par le connestable qui se tient à Poitiers. Si volons que vous rendés ceste cité ançois que nous y recevons plus grant damage, ou briefment nous vous occirons. » Messires Guillaumes et si compagnon veirent bien que deffence n’i valoit riens ; si leur dist « Signeur, je vous lairai couvenir, puis que ensi est que vous avés volenté de vous rendre, mès mettés nous hors de vostres trettiés, si ferés courtoisie et vous en sarons gré ; et chil respondirent : « Volentiers. »

Encouragée par ce succès, une troupe de Bretons et de Poitevins, forte de cinq cents hommes d’armes et placée sous les ordres de Renaud, seigneur de Pons, d’Olivier, seigneur de Clisson, de Jean, vicomte de Rohan, de Gui, seigneur de Laval, de Jean, seigneur de Beaumanoir, et de Thibaud du Pont, s’empare successivement d’Angoulême(1), de Saint-Jean-d’Angely(2), de Taillebourg(3), et va mettre le siège devant la cité de Saintes. Guillaume de Faringdon, sénéchal de Saintonge, se met en mesure d’opposer une vigoureuse résistance aux assiégeants mais les bourgeois de Saintes, sur le conseil de leur évêque, partisan du roi de France(4), menacent de tuer Guillaume s’il ne les laisse conclure un arrangement avec les ; Français le sénéchal y consent à la condition qu’on ne le fera point figurer dans l’acte de capitulation. P. 71 à 73, 308.

1. Angoulême se rendit vers le 8 septembre à Geoffroi de la Roche et à Raymond de Mareuil auxquels l’Anglais Robin Sely livra l’une des tours de la ville (Arch. Nat., JJ 104, n° 2). Jean, duc de Berry, emprunta quatre livres tournois à Jacquet d’Ableiges, son secrétaire, le futur compilateur du Grand coutumier, pour en faire cadeau à un habitant d’Angoulême qui avait apporté au duc cette heureuse nouvelle. « A Jaquet d’Ableiges, secretaire de monseigneur (le duc de Berry), qu’il avoit presté à mon dit seigneur pour baillier à un des habitans d’Angoulesme, lequel avoit apporté novelles que les habitans d’icelle ville se rendoient à monseigneur, pour faire ses despens en soy retournant yci, par quittance du dit secretaire donnée le XXVIIe jour du dit mois (octobre 1372) rendue à court : IIII livres tournois. » (Arch. Nat., KK 251, f° 91). Jean Prevost du Pellegrain,d’Angoulême, receveur de cette ville et du pays d’Angoumois, gardien du château de « Thouré », s’étant efficacement entremis pour faire ouvrir les portes d’Angoulême aux Français, obtint de Charles V des lettres de quittance générale datées de Paris le 27 mars 1374 (Arch. Nat., JJ 105, n° 224, f° 125 v°). Deux ordonnances, la première accordant à Angoulême une commune
semblable à celle de Saint-Jean-d’Angely (Ordonn., V, 581 et 582), la seconde octroyant des lettres de sauvegarde à l’abbaye de Saint-Cibar, située dans les faubourgs d’Angoulême (Ibid., 591 et 592), sont datées du mois de janvier 1373 et sont postérieures d’environ quatre mois à la reddition de cette ville au roi de France.

2. Saint-Jean-d’Angely ne se rendit aux Français que le lundi 20 septembre, jour où Jean, duc de Berry, par lettres datées « de nostre ville de Saint Jehan d’Angeli », donna a Jean Ysoré, seigneur
de la Varenne, et à Regnaut Chevin, seigneur de Mauzé, chevaliers, les terres confisquées sur Guichard d’Angle, partisan des Anglais, dans les sénéchaussées de Poitou, Saintonge et Angoumois (Arch. Nat., JJ 104, n° 331, f° 137). Philippe, duc de Bourgogne, Bertrand du Guesclin, Olivier, seigneur de Clisson, se trouvaient devant cette ville au moment de la reddition. « A monseigneur (le duc de Bourgogne), tant pour faire sa volenté comme pour lui esbattre au jeu des dés, tant au
Bourgneuf lez la Rochelle comme à Saint Jehan d’Angely, en la compaignie du seigneur de Clisson, du connestable du Guesclin et autres. » (Arch. de la Côte-d’Or B 1438, f° 19). Voyez la brochure intitulée Campagne de Philippe le Hardi en 1372, par Ernest Petit, p. 10.

3. Charente-Inférieure, arr. Saint-Jean-d’Angely, c. Saint-Savinien. Par acte daté de Saintes le 24 septembre 1372, Jean, duc de Berry, donna à Louis Larchevêque, seigneur de Taillebourg, les terres sises depuis le pont de Taillebourg, « ainsi comme le cours de l’ayve de la Charante emporte en alant envers Xaintes », jusqu’à un fossé près de Bussac (Arch. Nat., JJ 104, n° 56, f° 26 v°).

4. Le prélat, qui occupait alors le siège de Saintes, s’appelait Bernard du Sault (Gallia Christiana, II, col. 1078).


§ 704. Quant ce vint l’endemain au matin, !i sires de Cliçon, h sires de Pons, li viscontes de Rohem, et li baron qui là estoient fisent sonner leurs trompètes pour assallir et armer et appareillier toutes gens et traire avant et mettre en ordenance d’assaut. Evous autres nouvelles qui leur vinrent envoiies de par chiaus de Saintes. A ces trettiés entendirent li signeur de l’ost pour tant que ce leur sambloit honneurs de conquerre une tele cité que Saintes est, et mettre en l’obeïssance dou roy de France, sans travillier ni blechier leurs gens, qui leur estoit grans pourfis. Et ossi il tiroient toutdis à chevaucier avant. Si furent cil trettié oy, retenu et acordé et se departirent messires Guillaumes de Ferintonne et ses gens sauvement sus le conduit le signeur de Pons, qui fist les dis Englès conduire jusques en le cité de Bourdiaus. Ensi eurent li François la bonne cité de Saintes, et en prisent le feauté et l’ommage ; et jurèrent li homme de le ville à estre bon et loyal françois de ce jour en avant. Et puis s’en partirent, quant il s’i furent rafreschi trois jours, et chevaucièrent devant Pons, qui se tenoit encores englesce, quoi que li sires fust françois, et en estoit chapitainne messires Aymenions de Bourch.

Mais quant chil de le ville se veirent ensi enclos de tous lés des François, et que cil de Poitiers, de Saintes et de Saint Jehan l’Angelier s’estoient rendu et tourné françois et que li dit Englès perdoient tous les jours, et que li captaus estoit pris, par le quel toutes recouvrances se peuissent estre faites, il n’eurent nulle volenté d’yaus tenir ; mais se rendirent par composition que tout chil qui le opinion des Englès voloient [tenir et] soustenir, se pooient partir sans damage et sans peril, et avoient conduit jusques à Bourdiaus. Si se parti sus cel estat messires Aymenions, qui l’avoit gardée plus d’an et demi, et avoech lui toute se route, et se traist à Bourdiaus, [et li sire de Pons entra] en sa ville, où il fut recheus à grant joie. Et là fist on grans dons et biaus presens, afin que il leur pardonnast son mautalent, car il avoit dit et juret en devant que il en feroit plus de soissante de ses gens meismes trenchier les testes ; et pour celle doubte s’estoient il tenu si longement. Mais anchois que il y peuist entrer ne que il vosissent ouvrir leurs portes, il leur quitta et pardonna tout à le priière dou signeur de Cliçon et des barons, qui estoient en se compagnie. Or parlerons nous de chiaus de le Rocelle.

Le jour même où les vainqueurs font leur entrée dans la cité de Saintes (1), Guillaume de Faringdon et ses gens prennent le chemin de Bordeaux. Après s’être reposés trois jours, les Français se dirigent vers la forteresse de Pons, restée anglaise, quoique Renaud, qui en est le seigneur, se soit rallié au roi de France, et défendue par une garnison dont Amanieu du Bourg est capitaine. Cette place se rend sans résistance sous la seule condition que le capitaine Amanieu et tous ceux qui voudront rester Anglais pourront se retirer à Bordeaux. Renaud, seigneur de Pons, qui s’était promis de faire trancher la tête à soixante de ses gens pour les punir de leur désobéissance, leur pardonne à la prière du seigneur de Clisson. P. 74, 75, 308.

1. Saintes ouvrit ses portes aux Français le vendredi 24 septembre, puisque la donation, faite par Jean, duc de Berry, à Louis Larchevesque, dont nous venons de donner l’analyse, est datée de « nostre ville de Xantes, le XXIVe jour de septembre l’an mil trois cens soixante et douze ». Le jour même de la reddition, par un autre acte dressé à Saintes à la même date que la donation susdite, Simon Burleigh, chevalier anglais, se reconnut redevable envers Louis, duc de Bourbon, d’une somme de 1000 francs qu’il s’engagea sur la foi de son corps à payer à Tours à la mi-carême suivante (Arch. Nat., P. 13581, n° 567 Inventaire des titres de Bourbon, I, 567). Cette somme était peut-être, comme nous l’avons supposé naguères (voyez le tome VII de cette édition, sommaire, p. XCV, note 3 et p. XCVI), une avance faite par le duc de Bourbon à Simon Burleigh comme acompte sur la rançon de la duchesse sa mère, tenue prisonnière dans la Tour de Broue (Charente-Inférieure, arr. et c. de Marennes, commune de Saint-Sornin), rançon qui avait été réglée deux mois auparavant par un traité intervenu le 23 juillet 1372, mais en réservant le cas où la dite duchesse serait délivrée « par force d’armes ». Or, ce cas que l’on avait ainsi prévu se produisit, comme l’atteste expressément l’auteur de la Chronique des quatre premiers Valois (p. 244). A une date que l’on ne saurait fixer avec une précision absolue, mais certainement entre le 7 août, date de la reddition de Poitiers, et le 22 du même mois, jour où le captal de Buch fut battu et fait prisonnier devant Soubise, Louis, duc de Bourbon, puissamment secondé par Bertrand du Guesclin, réussit à emporter d’assaut la Tour de Broue et délivra ainsi, sans bourse délier, la duchesse douairière sa mère. Au lendemain même de la reddition de Saintes, dès le samedi 25 septembre au matin, Philippe, duc de Bourgogne, partit de cette ville et s’avança dans la direction de Cognac (E. Petit, Campagne de Philippe le Hardi en 1372, p. 11) mais Jean, duc de Berry, prolongea son séjour dans la capitale de la Saintonge au moins jusqu’au mardi 28. « A Pelerin, messaigier de madame (la duchesse de Berry) envoié de Xaintes à Saint Jehan d’Angeli pourter lettres de monseigneur (le duc de Berry) à Ymbaut du Peschin ; yci, le dit XXVIIIe jour (de septembre 1372), XX sols tournois. » (Arch. Nat., KK 251, f° 91).


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