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1606 - La Rochelle : Traité contre les danses, par Jean Boiseul

jeudi 19 juin 2008, par Pierre, 1084 visites.

Un vigoureux plaidoyer contre les méfaits de la danse, mère de tous les vices, par un protestant, publié à la Rochelle au début du XVIIème siècle.

Source :TRAITTE CONTRE LES DANSES. Par Jean Boiseul. - A LA ROCHELLE, Par les héritiers de Hierosma Haultin . 1606. - Archive.org

Tout ce qui plaist au sens de la chair ne doit pas pourtant estre iugé bon, j’ai dit du ris (dit Salomon) tu es hors du sens, & de la liesse que sert-elle ? C’est ce que nous en nos Eglises iugeons des danses : que ce n’est qu’une liesse charnelle, folie,& vanité.

Mais pource qu’il y a beaucoup de gens qui sesbahissent pourquoi nous ne trouuons les danses bonnes, & voudroyent sçavoir les raisons que nous avons de les reprouver. Ie ferai ici voir (moyennant la grace de Dieu) si elles doivent estre permises, ou non : & les raisons que nous avons pour ne les pouvoir approuver.

Et afin que le tout aille mieux d’ordre, il sera parlé premierement du mal qui est ès danses, puis on verra les oniections qu’on peut faire au contraire, qui sont les raisons & excuses qu’ont ceux qui les soustiennent, en troisieme lieu i’ameneray les effects des danses, ou on gera encor si elles doiuent estre permises, ou non. Apres cela ie ferai voir quelques lieux de l’Escriture saincte, prins du vieux & nouueau Testament, ou & par ou elles nous sont & doiuent estre defendues. Apres cela ie montreray que nous ne sommes pus seuls en nos aduis, ains qu’il y a de nostre part de bons Docteurs, puis des Conciles & des Loix Ciuiles, auec le iugement des plus entendus & sages d’entre les anciens Payens, desquels encor qu’ils n’eussent pas la droite crainte de Dieu, neantmoins nous apprenons beaucoup de choses bonnes & honnestes pour la police & pour les moeurs es choses qui ne repugnent point a la parole de Dieu, ains y conuiennent.

 Chap. I. - Le mal qui est aux danses.

Pour donc venir au premier poinct, la raison que nous auons de condamner les danses : c’est qu’elles aportent elles mesmes & donnent scandale & occasion d’offenser Dieu : parce que les cœurs y sont & peuuent estre attires & incites a lubricates, concupiscences, sales paillardises, & autres telles vilenies. Et partant comme occasion quelles sont que Dieu est offense, ou le peut estre, & la chastete violee, nous les condamnons : ioint qu’aussi elles ne seruent a aucun bien, & que ce n’est que vanite.

Or qu’il en soit ainsi, il conste, car outre la lasciuete de plusieurs chansons impudiques, qui sont la chantees, ou iouees sur [???]instrument pour faire danser, que sont les danses qu’attraits, & amorces de paillardise que signifient ces yeux vagues & impudiques ? Que signifient ces voltes, ces sauts, gestes & mouuemens qui se font es danses, tant des pieds que des autres membres, & de tout le corps ? Que monstre ce branlement compasse si iustement & curieusemet a la cadance d’vne chanson lubrique ou de quelque courante, bal, ou balet, volte, ou autre branle ?

Qu’est tout cela qu’orgueil, piasse ou ostentation d’vne gaillarde disposition ? Qu’est tout cela que vanite ? que pecher & offenser Dieu ? Parmi tous tels obiects que peuuent estre les yeux sinon que des fenestres par lesquelles le peche se peut letter en nous, s’y insinuer, seschauffer, & nourrir en nous ? Mais qu’est ce qu’ouurir la porte a Satan pour se saisir denosames, & y allumer vn feu de fates concupiscences ? Certes Dauid ne prioit pas sans cause que Dieu destournast son oeil qu’il ne regardast a vanite ; Mais ou en y ait-il plus qu’en la danse ? Si Dauid ne peut regarder der seuremet Bersabee quand elle se baignoit, moins peut-on regarder seurement sans estre tante les filles & les femmes en la curiosite, luxure, & lasciuete de la danse, ou elles composent leur face, & leurs mouuemens a la cadance auec tant d’artifices, & leurs yeux mesmes, qu’on ne peut dire autre chose, sinon que Satan chasse la aux ames. Ie demande que peut faire lors la danse, sinon qu’allumer ès poitrines de plusieurs le feu de paillardise vray feu d’enfer ?

Et les oreilles que peuuent elles estre parmi tant de propos vains & esbaudissemens, chansons lasciues & semblables lubricites, (les yeux en estant desia ensorceles) sinon que des entonnoirs par lesquels Satan peut entonner en nos coeurs son poison & venin mortel, pour corrompre les bonnes moeurs, comme S. Paul escrit des mauuais propos : Et cela tant en ceux qui dansent qu’en ceux qui prennent plaisir a voit danser les autres.

Ie scai bien que beaucoup nous trouueront en ceci trop austeres : Mais si est ce que toutes ces choses sont honteuses, voire tant que les putains de Rome auoyent honte de cela deuat Caton le Censeur ; & en sa presence pour la honte de la chose, & pour le respect & reuerence d’icelui.

Aussi nous ne disons rien que les Payens n’ayent cofesse deuoir estre en toute personne modeste & honneste, a scauoir de ne se contenir du fait de paillardise seulement, mais n’auoir pas aussi [???]oeil & le regard impudique, ni les autres actions. Or puis que les Payens mesmes en sont venus iusques-la, qu’elle honte est-ce aux Chrestiens d’approuuer les danses ou [???]honnestete & la pudicite sont aussi prostituees.

Partant veu que les danses sont nourrices de telles conuoitises (car Dieu scait en quel lieu la conscupiscence peut auoir plus grand vogue que la) nous les condamnons comme ce qui vitie la chastete en [???]ame : Et de vrai,il est impossible, quoi qu’on die, qu’on ne s’en retourne de la danse pire qu’on ni est alle, veu [???]infimite est en nous tous. Et certes il n’y a que le defaut de la crainte de Dieu qu’on ne le voye & qu’on de le iuge ainsi.

Si on replique, que nous y regardons de trop pres, nous respondons, que si cela est trop dur pour la volupte de la chair, que neantmoins c’est pour le salut de l’ame : ce que Iesus Christ nous commande en disant, Si ton oeil dextre te scandalize arrache-le ; Car il te vaut mieux entrer borgne en la vie eternelle uec deux yeux estre iette en la gehenne. Et si ton pied te scandalize coupe-le, car il te vaut mieux entrer boiteux en la vie, qu’auec les deux pieds estre iette en [???]Enfer ; Et si ta main te scandalize, coupe-la, car il te vaut mieux entrer manchot au Royaume des cieux, qu’auec les deux mains estre iette en la gehenne (ainsi lors appelloit-on [???]Enfer.)

Que diras-tu ? que ton oeil ne te scandalize point pour danser, ni pour voir danser, ni ton pied pour danser, ni ta main pour mener ou manier, ou la donner en la danse ? Mais Dieu le scait ; Et qu’est-ce si tes yeux estincellans & ondoyans, si ta main estraignante, si ton pied fretillant scandalize quelq’vn ? N’est.ce pas scandale ? Qu’est ce autre chose de ce gay trepignement, auec tant de souplesses, curiosite & artifices, & de tout ce branlement du reste du corps ? Que sert tout cela sinon que d’ostentation, & de dire qu’on se manie bien ? Ie demande si cela ne peut enflammer la concupiscence a mal par les yeux au coeur ? Ne te vaudroit-il pas mieux qu’vne meule de moulin fust attachee a ton col, & toi iette en [???]eau ? Nostre Seigneur [???]a dit, aura-il menti ?

Quelle edification raporte-on de la danse ? Mais quel mal que le feu lubrique en la poictrine ? & un esprit de paillardise en la teste, & le peche en l’ame ; & l’ame en [???]Enfer ? A qui feras-tu croire qu’au plaisir que tu donnes a ton oeil en la danse tu n’enyvres ton ame de vanite aussi bien que Herodes : & que tu ne [???]empoisonnes d’vn venin mortel ?

Mais qui niera que le touchement de main a main, le guignement & rencontre des yeux vagues & estincellans de ceux qui la auec plaisir sentreregardent ne puissent infecter les ames ? Mais puis quelles sont naturellement infectees & corrompues de peche, qu’est ce que les chauffer encore plus. enpeche ? & les y attiser & enflamer plus fort ?

Ceux qui dansent diront qu’en la danse ils ne conuoitent point, & qu’ls ni pensent pas, estans prou empeschez a danser. Mais pour quoi danses-tu que pour te monstrer & te faire voir au bal, ou a la danse, & cela pour te faire louer, qu’est cela que vanite ? & ostentation Qu’est cela que se plaire en la chair ? Que sort il de tout cela que la damnable conuoitise ? n’en est-ce pas toute la fin ? Et qu’est-ce qu’irriter le peche, le nourrir en [???]ame, & y donner entrer au diable, pour y couuer le peche, [???]y esclorre & le perpetrer finalement tout a fait, comme il arriue bien souuent, ainsi que sera monstre ci apres ?

Mais mettons cela que quelqun ou quelqu’une ne dansent sans conuoiter, qu’ils [???]asseurent, on ne les pourra pas croire, & asseureront ils que ce sera sans qu’ils soyent conuoites ? Les filles & les femmes. ausquelles Dieu a departi quelques beautes pourront elles asseurer cela ? Il faut obuier a [???]vn comme a [???]autre. Si Ezechias fit mal de monstrer ses thresors aux ambassadeurs du roy de Babylon, & leur donner suiet de conuoiter le sien. Pourquoi ne font mal le pere & la mere qui permettent a leurs filles & a leurs femmes de se monstrer ès danses ? de faire voir leur grace, leur maintien, leur disposition & g[???]tilesse a tous, & qui leur souffrent se farder, se parer & attifer pour cet effect ? N’est-ce pas pour prostituer leur beautes, les exposer aux dangers d’estre desirees en mal, d’en estre solicitees ? Que merite cela deuant le iugement de Dieu ? ce qui aduient a plusieurs, qu’arriua-il a Candoles roy de Lydie, qui voulut faire voir sa femme toute nue a Giges ? il la perdit, il fut tue par celui a qui il auoit fait voir la beaute de sa femme, & elle fut femme du meurtrier. Que sert-il que les maris facent venir [???]eau a la bouche des ruffiens de la beaute & galantize de leurs femmes ? n’est-ce pas les mettre en danger ? Qui aime le danger, dit vn Sage, perira au danger.

Il faudra donc (dira quelcun) mettre & garder der les belles en vne bouette : Ie respons qu’il faut que chacun serve a sa vocation, & que la femme aille & vienne, & face ce qui est de sa charge selon Dieu : mais [???] & en la crainte de Dieu, sans desir de se faire voir, & que plustost doit obuier a cela & s’y desplaire : Et dis que la monstre sans cause & ou, il y a danger, & ou n’est que pour ostentation & orgueil, n’est pas trop seure, vne chose qui plaise Dieu, & qui n’est iamais sans danger, tesmoin Bersabee. N’eust-il pas este meilleur qu’elle ne se fust pas monstree si ouuertement ? Quel mal en sortit-il ? Mais combien d’horribles maux tesmoins encor Dina & la femme de Candoles, Lucresse la femme de Brutus, combien qu’il n’y eust point de faute de sa part. L’amour entre par les yeux, prend la son premier siege, de la au coeur, & puis c’est rage, tesmoin Amon fils de Dauid, & ce qu’il sit a Thamar sa soeur, plus acte de rage qu’autre chose, tesmoins vne infinite d’autres, comme se voit tousles iours. Ie di donc que les filles & les femmes [???] obuier a cela, & que ce n’est pus le tout de ne conuoiter point, mais faut qu’elles se gardent aussi d’estre conuoitees.Que si la fille de Iacob eust fait ainsi, elle n’eusl pas son rauissement vne ville mise au tranchant de l’espee. Si on dit que cestc concupiscence peut auoir lieu hors de la danse, ie le confesse : mais plus en la danse qui n’est que vanite, pourtant nous la condamnons ; Que si la femme est conuoitee hors la danse, & elle cheminant en sa vocation & sans ostentation, curiosite ni desir de se saire voir, Dieu sera sa garde comme de Sara & de Rebecca, & elle doit ainsi esperer, & se recommander a la bonte de Dieu.

Pourquoi allegueroi-ie ici, que ce [???] qu’on employe en la danse est vn temps perdu ? Car ceux qui dansent ne pensent pas qu’il y ait t[???]ps mieux employe, & ne le dependent pas en aucune chose plus ioyeusement. Mais Dieu veut il qu’on mette le temps, qui nous doit estre tres precieux, en telles vanites ? Que leur est Dieu durant la danse ? C’est la qu’est toute leur affection, leurs esprits tous transportes. C’est vne folie qui les tient, vn homme sage d’vn sens rassis & graue, les voyant tourner, virer & trepigner en la danse, pied ça, pied la, pied bas, pied haut, marcher tantost en auant, tantost en arriere, tantost d’vn coste, tantost de [???]autre, qui dira il sinon que se sont tous des fols ? On louera ceste souplesse & la gentilesse de ses mouuemens, tant qu’on voudra, mais, c’est estre enyure de vanire, auoir perdu [???]enterdement, & (comme dit Ciceron) deuenir incense & pour tout, c’est battre du pied la terre.

Dauantage tout ce qui est de [???]idolatrie & du diable nous doit estre en horreur. Or la danse est de [???]idolatrie, en est vne dependance, y est contointe, y sert, & ce fait aux solemnites des idolatres ( comme nous verrons ci apres ) la danse est donques de [???]idolatric, & en cela nous doit estre en horreur. Les enfans d’Israel celebrerent ainsi la feste des veaux au desert. Auec la danse se celebroit la feste de Bahal-pehor en Moab, quand les filles & femmes de Madian vindrent se monstrer aux enfans d’Israel, auecques lesquelles ils paillarderent : & autrement ne se celebroyent les festes de Venus & de son Adonis qui est appelle Thammus en Ezechiel : ni la feste de Priapus dont Mahaqua auoit fait planter le bois que Azarias son fils fit couper, & osta [???]idole, & pour cela deposa sa mere, a ce qu’elle ne fust plus roine. Ceste mesme image fit eriger Manasses & planter le bois, ou se faisoit ceste idolatrie, de laquelle la danse y estoit non la moindre partie, & ainsi seschaufoyent en leurs vilenies. Nous disons donques, que quand il ni auroit que cela, que la danse est de l’idolatrie , & que le diable sen est ainsi serui, que c’est assez pour nous la faire auoir en horreur.

Mais peut estre que quelcun mesme, qui ne sera pas danseur voudra dire, que ie presupose ce qui ne conste pas, ascauoir que la danse est du diable ; le demande qu’est ce donc que la prestresse d’Apollon ne respondoit iamais ni ne bailloit [???]Oracle , que premierement Satan ne l’eust agitee par la danse. Dont Ferdinand roy d’Aragon lors qu’vne femme dansoit deuant lui, de telle sorte que ses gens admiroyent ceste danseresse, il sescria comme elle acheuoit de danser, Attendez, dit-il, maintenant [???]Oracle, comparant ceste femme a la prestresse d’Apollon par laquelle le diable parloit, mais apres la danse. Aussi nous conste-il qu’au Bresil le seruice que leurs Prestres font aux diables, les ceremonies & deuotions qu’ils font faire aux Bresilians consistent principalement en danses : Aussi se peut voir par les procez qu’on voit des sorciers, que les diables les font danser, & dansent auec eux. Dont nous disons que ce qui est le ieu des diables & des sorciers ensemble doit estre en horreur a tous. Or la danse est ce ieu des diables & des sorcieres, qui est ce donc qui ne [???]abhorrera ?

Nous lisons aussi qu’entre les Geans qu’on appelle auiourd’hui Patagons, si quelcun d’entreux est mort, tout aussi tost on verra des diables danser a [???]entour du mort, en mesme flature de Geans que sont les Patagons. Mais en entr’eux celui qui mene la danse est beaucoup grand que les autres. Ie demande donc si nous deuons cercher nos plaisirs en la danse ? Ne laisserons nous pas plustost cela aux diables comme leur ? Mais veu que le diable en vse ainsi auecques ces pauures aueugles, nous a qui la lumiere de Dieu resplandit nous laisserons nous ainsi aueugler a Satan pour nous faire plaire en ceste vanite, nous y enyurer, y perdre nos sens, nous y glorifier, & y estre amorces a peche, & eschauffer en nos poictrines les sales concupiscences, les y attirer, & y enflamber les lubricites de [???]enfer ?

Aussi il se lit de quelques miserables peuples des Terres neuves, situes, dit-on, vers le Norouest, qui sont presque incessamment batus de pluyes, gresles, & du diable tous les iours ; que c’est comme leur naturel de danser & de chanter, sans pouuoir rien faire que ce’ne soit tousiours en dansant & en chantant. Helas amenerons nous entre nous la danse & la melodie de ses peuples idolatres & esclaues de Satan ? I’escris ce qui se lit ; Si quelcun reuoque cela en doute les liures sont mes tesmoins.

L’affection desordonnee que plusieurs ont a la danse, si qu’on ne s’y lasse iamais, & qu’hommes, filles, femmes, prennent plaisir extreme en ceste vanite, & tant que iamais ne voudroyent faire autre chose, cela tesmoigne la tyramnie que Satan a sur eux par le iuste iugement de Dieu.

On escrit choses memorables des pays plus Sept[???]trionaux, ou la danse est tenue pour vne maladie procedante de folie ou manie, que quelques-vns d’entre eux appellent les danses d’vn S Victus, les autres de S.Iean que les pauures idolatres estiment frapes du haut mal, & de telles agitatios qui se voy[???]t aux danses, & y en a qui s’y prennent si obstinement & auec tel transport d’esprit, qu’ils y perdent & le souffle & le sentiment, & tombent comme morts ; au contraire de ceux la qui sont mordus par la Tarentule qui dansent iusques a suer, & ne peuuent faire autre chose iusques a ce que le venin soit consume en eux par la danse, ou a force de danser. Ie laisse d’autres choses qui me semblent incroyables, mais toutesfois recitees par gens d’authorite.

I’ai amene toutes ces histoires parce qu’il me semble qu’elles doiuent faire honte a ceux qui aiment soustiennent & ont tant les danses au coeur : & si on me replique, que Satan a ensorcele ceux la, que i’y perdroi mon temps, & qu’on a beau prescher ceux que le diable endort : Ie confesse que cela est vrai, mais non pour tous, car la grace de Dieu a tous les iours son cours, & [???]Esprit de Dieu besongne puissamment, ramenant de [???]erreur ceux qui appartiennent tiennent a [???]election de Dieu.

Ce qu’encores nous trouuons de mauuais en la danse, & qui nous la fait reprouuer, c’est qu’on y abuse de la musique. Il conste que la musique est vn excellent don de Dieu, elle recree, remet les esprits, chasse la melancolie, appaise la colere, arreste la fureur, esmeut les plus stupides, resueille les abestis, esleue a pieu, esmerueille les hommes de sa beaute & excellence diuerse en toutes sortes, & sa grauite & douceur retire du propos de mal faire, esteint les mauuaises conceptions, incite a la vertu : Ce sont moyens dont Dieu se sert, quand & en tant qu’il lui plaist.

Nous lisons qu’Agamenon auoit laisse vn ioueur de lyre a Clitemnestra sa femme, pour chanter deuant elle sur sa lyre les vertus des ancienes femmes illustres, & afin de la diuertir de toutes sales pensees, l’induire a la vertu & pudicite : cela lui seruit de sorte qu’AEgistus ne peut iouir de Clitemnestra que premierement il n’eust tue le ioueur de lire. Nous lisons que Saul par ce moyen estoit deliure de Satan, car la douceur de la musique chassant ainsi la melancolie, le diable par le moyen d’icelle melancolie ne pouuoit plus si facilement troubler Saul. Nous lisons que par le moyen de la musique Elisee appaisa son iuste courroux qu’il auoit contre Ioram roi d’Israel, & prophetizer : & est certain que celui qui auroit en volonte de perpetrer quelque forfait, qu’il entede chanter quelque Pseaume auec la douce & grauc musique, comme Misericorde au pauure vicieux , ou quelque autre, que lors il diuertira aucunement son mauuais propos & se moderera.

Aussi voyons-nous que Dieu sestoit consacre la musique pour chanter ses louanges, non seulement de voix & de bouche , mais aussi auec les instrumens. Vrai est qu’il y a plusieurs sortes de musique, car il y a la borique en laquelle se chantent les Psalmes entre nous , & de la mesme on les chantoit en Israel : combien que la leur peut estre ou plus douce on plus graue, car la musique se diuersifie en plusieurs sortes, & en cela Dieu se rend admirable, & l’esprit de l’homme merueilleux. Il y a outre la Dorique, la Pirrique & [???]lonique, la Pirrique est, celle qu’on vse a la guerre en tabours, phiffres, clairons & trompettes : L’Ionique est celle qui est lasciue : encore y a-il la musique lugubre qui est auiourd’hui perdue, quoi que soit, comme incognue , dont on vsoit en la Iudee du temps de nostre Seigneur pour faire pleurer aux funerailles, & dont vsoyent les Romains semblablement, & aussi en Israel du temps des rois de Iuda. Mais puis que Dieu a ordonne (comme a este dit) & sest consacre la musique pour chancer ses lonanges, & que les instrumens de musique estoyent iadis employes en cela, ne conste-il pas par la, que Dieu se l’est sanctifiee, qu’il ne veut pas qu’on en abuse, ni en danses, ni en mascarades, ni en telles autres folies ?

Quoi ? ferons-nous seruir ce beau don de Dieu a maquerellages & paillardise en incitant a concupiscenses charnelles, & a exciter la lubricite en nous, y accroistre & esmouuoir le peche ? La musique nous doit esleuer & rauir a Dieu, & faire mediter la douceur de sa ioye incomprehensible, & nous y faire aspirer. Pour cet effect aussi l’auoit Dieu ordonnee en son sainct temple, & comme pour estre vn gage, & come vn sacrement de ceste ioye celeste ; Pourtant en la captiuite de Babylone les Leuites auoyent porte leurs harpes, & si n’en iouoyent pas ; mais cela leur donnoit non seulement espoir deleur retour, mais aussi asseurance d’estre seruiteurs de Dieu, d’estre de sa maison, & leur donnoit esperance de la vie eternelle. C’est donc vn autre mal que nous trouuons en la danse, qu’on y abuse de la musique, vn beau don de Dieu & qu’on la sait seruir a vn vrai maquerelage.

Si on replique que la musique le porte ainsi, qu’elle peut estre mise & diuersifiee en ceste sorte pour sen seruir a la danse, a cela ie respos qu’aussi peut-on abuser du pain & du vin, le sophistiquer, l’empoisonner, & qu’on peut bien abuser du fer, & en tuer, abuser de l’or & de l’argent, en piafer, en corrompre, en faire maquerelages & autres meschancetes. Mais que Dieu en est aussi offense, & qu’il en est ainsi quand on abuse de la musique, & quand on la fait-seruir aux danses Dieu y est semblablement offense.

 Chap. II - Les raisons de ceux qui soustiennent les danses.

Ie pren maintenant les raisons de ceux qui soustiennent les danses pour leur satisfaire, si possible est, & premierement i’ameine ce qu’ils disent, que c’est vne excellente recreation, & ou on s’ennuye le moins : car quoi qu’on y soit long temps (a ce qu’on dit) tant sen faut qu’on s’y lasse , qu’au contraire ceux qui sont lasses d’auoir fort trauaille, se delassent (disent ils) en dansant. Ie respons que cela suffit pour nous faire reprouuer la danse : Car ou est ceste excellante recreation ? que trouuent la de beau, ne de graue les plus sages & entendus du mode ? d’ou se peut on plaire en cela, que de ce qu’on est ensorcele de Satan ? Car autrement quel suiet y peut-il auoir de se delecter si fort en ’la danse ? Ie dis donc que ce plaisir tant immodere est vn tesmoignage qu’il y a la de l’oeuure du diable, & qu’a cela tout homme qui sera vu peu sage, iugeraque la danse dont on vse auiourd’hui est de Satan. Quoi, dira-on, voila vne chose qui nous plaira le plus, sera-ce vn tesmoignage quenous sommes ensorceles du diable ? Ie respons qu’ouy, si c’est chose que Dieu n’ait ordonne, ne vueille, ait defendu & qui nous enyure en la vanite, nous tire ou induise au mal, soit a concupiscence charnelle ou a ostentation, & si c’est chose qui soit inutile, ridicule ou de neant, malheureuse, & de pernicieux effect, comme est la danse, ainsi que se verra en son lieu au plaisir de Dieu encor plus clairement.

A ce donc qu’on dit que la danse ou le bal est vn exercice ioyeux, ou recreatif. le respons qu’on trouue prou d’autres exercices, & si diuers que si [???]vn nous fatigue, que [???]autre pourra estre pour recreation, bien meilleur que les danses, lesquelles ostes la volupte & tels plasirs charnels qu’on y prend, ne peuuent donner qu’ennui & fatigue, & dis aussi que nostre ioye seroit bien maigre si nous la voulions prendre es danses, qui ne sont que folie & vanite. Mais qu’elle ioye prendras-tu ou Dieu sera offense ? c’est la ioye du diable, si ioye il y a, mais nostre ioye est bien ample, riche, & bien asseuree en C iij Dieu, & ne peut estre es choses de ce monde. Nostre gloire & nostre ioye sont en Christ. Ceux qui sont de Christ cerchent les choses qui sont de Christ, & qui sont d’enhaut, & nostre conuersation est au ciel encores que nous soyons en ce monde. Pourtant au douziesme de l’Apocalypse l’Eglise nous est representes ayant la lune sous ses pieds.

A cela on repliquera que si quelques-vns abusent de la danse qu’aussi abuse t’on bien du vin & des viures, & de la parole de Dieu, & des saincts Sacremens, que si pour [???]’abus il faut interdire la danse, faut donc interdire [???]’vsage du vin, les presches & les saincts Sacremens. Ie respons que ce n’est pas de mesme. Carla danse n’est ni ordonnee de Dieu, ni necessaire, ni bonne pour en pouuoir abuser, & qu’on n’abuse que des choses bonnes, Quoi, on se passe bien de la danse, mais non du pain & du vin ; ni de la predication de la parole de Dieu, ni des Sacremens que Dieu a ordonnes. Partat qu’on banit la danse que Dieu n’a point ordonnee, & qui corrompt les ames, & vse on des sainctes exhortations, des saincts Sacremens & des viandes que Dieu a creees pour en prendre auec action de graces.

Mais si (ainsi que dit S. Paul) il se faut priuer du vin ordonne de Dieu quand il y auroit scadale c’est quand en ce que tu en prendrois, tu donnerois scandale : combi[???] plus se faut-il priuer de la danse en laquelle tu te scandalizes & te corromps & scandalizes & corromps les autres ? La dase est vne vraye corruptio de moeurs & sen retourne on pire qu’on ni est alle, & les filles & les femmes n’y peuuent apprendre qu’a estre plus affaitees, saffres & effrontees.

On dit aussi qu’en la danse se pratiquent beaucoup de bons & honnestes mariages, pource qu’on voit la les filles, & les femmes, & elles voyent les hommes, & que la se voit le port, le maintien, la bonne grace, la beaute, la disposition, & des vns & des autres, & de la procede qu’on se prend en amour. Ie respons, que cela aussi suffit pour monstrer que les danses incitent a conuoiter. Mais que sera-ce de ceux qui seront maries qui voyent danser ainsi les filles & les femmes des autres, sinon que par ce moyen peut estre ils seront incites a les conuoiter & mespriser leurs femes ? Or celui qui iette l’oeil sur la femme d’vn autre pour la conuoiter il a desia commis adultere auec elle en son coeur, comme dit nostre Seigneur Matth. 5. Mais les mariages qui se font ainsi ne se font pas par bon moyen. Ne faut-il que scauoir danser pour faire vn mariage ? Certes il aduiendra souuent que celles qui danseront le mieux, seront plustost conuoitees pour paillarder que non pas pour leur donner a manier vn mesnage : il y ad’au tres meilleurs moyens pour choisir vne femme chaste que la danse, & aussi vn mari vertueux ne se remarque pas a scauoir bien danser.

Par mesme moyen est confute ce qu’on dit que la danse apprent les filles a faire la grace bonne. Mais qu’elle grace que d’estre plus hardies, & aucunes d’estre plus effrontes, comme a este dit ? & aussi de la on voit sortir plus de paillardises & d’adulteres, que de mariages, veu que cela incite plustost a aimer desordonnement qu’en vn bon & sainct mariage. En la danse on choisira plustost la putain que la femme de bien. Et comme a este dit, en la danse les filles & les femmes ne peuuent apprendre d’auoir autre grace que de lasciues, saffres & trop hardics, & sans honte.

Ie laisse comme ridicule ce qu’on dit que la danse sert a bien tirer des armes. Car a ce conte il ne seroit pas de besoin que les femmes & filles apprinsent a danser, veu qu’elles ne tirent pas des armes. Dauantage ie ne pense pas que quand on fait a coup d’espee, qu’on ne laisse bien la danse & ses passages pour cercher d’autres demarches.

Aussi pour excuser les dases on allegue qu’elles estoyent bien tollerees en Silo, lorsque le tabernacle de Dieu y estoit. Ie respons que non, non que si quelques filles d’lsrael y dasoy[???]t que sestoit hors de Silo, & que toutes ne dansoy[???]t pas ainsi & que celles la furent punies de leur danse par le Magistrat, quand elles furent abandonnees aux Beniamites pour les rauir, & les auoir pour leurs femmes, eux de qui on auoit iure qu’on ne leur donneroit aucune fille d’Israel : qui dira que ce ne fut vn chastiment de leur danse d’auoir pour maris ceux que tout Israel auoit mis en execration ?

On allegue aussi la danse de Marie soeur de Moyse, & des femmes d’Israel au desert apres le passage de lamer rouge, puis quand les femmes d’Israel sortirent au deuant de Saul chantant en danses, Saul en a tue mille, & Dauid ses dix mille. Ie respos que cela n’estoit qu’entre les femmes, & sans que les hommes dansassent auec elles ; Item que ceste danse n’estoit pas vne danse vaine & folastre, & mesuree, auec tels gestes, bransles & mouuemens que celles de present, ains que ce n’estoit qu’vne ioye saincte, & du tout pour rendre graces a Dieu, & pour s’inciter a cela [???]vne & [???]autre, & toutes ensemble. Ce n’estoit la que zele, que feu & piete, qu’action de graces, louanges a Dieu d’vn si grand benefice qu’elles auoyent receu de Dieu, dont elles ne se pouuoyent assez resiouir. Et c’estoit selon la coustume des Orientaux, & que porte leur climat d’estre plus promptes & sensibles, soit en la ioye soit en la tristesse. Ce que n’est es pays de deca, ou naturellement nous sommes plus tardifs, pesans & graues, pour ne nous esmouuoir par ainsi, ni si tost ni si fort : Et quant a la danse des femmes d’Israel deuant Saul, elle apporta bien plus de mal que de bien, & fut cause d’espandre beaucoup de sang en Israel ; & de toutes les guerres d’entre Saul & Dauid.

La danse de Dauid quand il sautoit deuant [???]arche qu’on portoit en Ierusalem n’est pas icy oubliee : Mais ie respons que cela ne fait rien pour la danse, ains fait a [???]encontre, comme sera dit maintenant. Premierement ce n’estoit pas ni bal ni danse, ni telles autres choses des danses de maintenant. C’estoit que Dauid de ioye sautoit de toute sa puissance voyant la bote de Dieu & sa grande grace enuers tout Israel, que Dieu [???]eust deliure de tous ses aduersaires, lui eust donne repos, vn lieu asseure, pour demeurer auec son peuple, & que Dieu leust constitue roi sur Israel, au lieu de Saul, Dauid sautoit tout seul, & d’vne ioye du S.Esprit. Quand on vous persecutera, dit nostre Seigneur, sautez de ioye, car ils ont ainsi fait aux Prophetes qui ont este deuant vous : Dauid sautoit ainsi d’vne saincte ioye ; Cela n’estoit pas donc d’vne ioye prophane, ou sur vne chanson paillarde, comme on fait maintenant. Faut-il danser, chanter & s’esiouir de cela ? Il est deffendu.

Mais comment disoit Mical, que Dauid s’estoit descouuert deuant les chambrieres d’Israel ? sinon que la danse estoit tenue pour vne chose ridicule, deshonneste & qui apporte deshonneur & infamie ? & ainsi en eust este de Dauid, si sa danse ne fust procedee d’vne saincte ioye & extreme qu’il auoit, en rendant graces a Dieu, & chantant louange a sa bonte de ses bien faits enuers tout Israel, & enuers lui particulierement, que l[???]Eternel fust leur Dieu, & fist sa demeure au milieu de ce peuple, & sur celui [???]eust constitue roi. Cependant Mical fit mal de despriser son mari, son seigneur & son Roi, & vn Prophete de Dieu, & de le condamner si temerairement, mesme pouuat bien voir que cela ne procedoit que d’vne resiouissance toute saincte, puis que c’estoit en chantant louanges a Dieu. A cause dequoi Dieu la priua de lignee, comme Saul, & elle estant heritiere de ses vices herita a ses maledictions aussi.

Mais que sert ce fait de Dauid a la danse. Car s’il auoit lieu en cela, ce seroit donc au presche & au chant des Pseaumes qu’il faudroit danser, & lors qu’on celebre les Sacremens comme est dit Pseau. 68. la tout le peuple present chantoit les louanges de Dieu, & faisoit-on sacrifices de six en six pas. Au reste ces danses de Dauid & des femmes d’Israel n’ont este frequentes, ains vne seule fois, quoi que soit non plusieurs fois, & tant qu’on en puisse dire que ce fust coustume : & encore cela durant la pedagogie & ceremonies d’Israel, quine sont plus en vsage.

Ie demande si on pourroit endurer quelques vns d’entre nous danser en nostre assemblee a [???]heurre des prieres ou de [???]exhortation, ou au chant des Pseaumes. Or ce seroit la comme a este dit, qu’il faudroit danser, si [???]exemple de Dauid authorisoit la danse. Car ce fut deuant [???]Arche, tesmoignage visible de la presence inuisible de Dieu, que Dauid dansoit ainsi, ou tous chantoyent les louanges de Dieu, rendoyent graces, & faisoyent sacrifices de six en six pas.

On allegue aussi, ce que dit Salomon que la Sunamite (c’est [???]Eglise) est belle comme deux bandes de danses. Mais le mot signifie bien autre choses que danses. Car premierement c’est le nom du lieu, ou Ia ob vid les Anges de Dieu, campes pour sa garde a [???]entour de lui, lors qu’il auoit si grand peur de son frere Esau ; Dont il dit, Voici le camp ou les bandes de Dieu. C’estoit chose belle que ces bandes d’Anges. Aussi est belle [???]Eglise de Dieu, forte & puissante, car elle a les Anges de Dieu campes a [???]entour d’elle, Dieu habite en son Eglise auec ses Anges, Psea. 68.

Dauantage en Mahanajim (ce mesme lieu) les bandes de Dauid vindrent pour se resiouir auec lui quand Abscalon & ses gens furent dessaits. C’estoit chose belle aa voir les bandes de Dauid victorieuses en Mahanajim [???]esgayer auec leur roi, de ce que Dieu leur auoit donne victoire. Aussi est belle [???]Eglise quand elle est si forte & puissante que les enfers ne la peuuent ni vaincre ne surmonter, mais qu’elle surmonte tout, voire les enfers mesme. Dieu lembellit & [???]orne de sa gloire, & le mot Csumeolat signifie troupe, ou bande, & ce que nous appelons en latin Chorus : dont aucuns estim[???]t que Salomon a voulu dire que [???]Eglise est belle, come deux bandes de chantres & musiciens dont la melodie n’est que belle.

Ie ne debats pas qu’on ne trouue en ces ballets qu’on fait es cours desrois quelque chose de beau, & ne nie pas que les rois & les grands ni prennent du plaisir, ni que les gens d’esprit ne sesmerueillent de telles gentilesses, mais ie nie qu’on se doiue samuser a cela, ni que tout soit licite a tous, & nie fort & ferme que tout ce qui est licite soit expedient, & tout ce qui est beau a [???]œil soit bon au salut de [???]ame, & nie fort & ferme qu’en ces ballets, voltes & danses lubriques il y ait ri[???] qui soit si beau qu’on puisse y accomparager [???]Eglise, ni que Salomon ait songe a cela : & au reste Ie nie aussi que tout ce qui plaist au sens de la chair, soit bon & doiue pourtant estre approuue, & tiens que la dase n’est toute que vanite. I’ai dit (disoit Salomon) du ris c’est folie, & de la liesse tu es hors du sens. Mais si Salomon a voulu dire que l’Eglise est belle comme deux bandes de danse louans Dieu, comme les bandes des femmes d’Israel qui disoyent en leur danse, Chantez a [???]Eternel, car il est hautement esleue. Il a iette en la mer le cheual & son cheuaucheur. Ie demande si telle est [???]intention de Salomon, que fera cela pour en prouuer les danses telles qu’elles sont auiourd’hui, & qu’on les veut introduire en nos Eglises ?

Aussi amene-on pour prouuer que les danses sont bonnes, & qu’il n’y a pas de mal, ce qui est dit en Zacharie, qu’encores danseroit on es rues de Ierusalem : Ie respons que tout cela n’est dit pour dire que les danses soyent ou bonnes ou mauuaises, mais qu’on s’esgayeroit encore es rues de Ierusalem, & le mot qu’on tourne danser, signifie sauter de ioye comme faisoit Dauid deuant l’Arche, &comme nostre Seigneur disoit, vous serez bien-heuruex quad les hommes vous hairont, & vous retrancheront, & vous diront outrages, & reietteront vostre nom, comme mauuais a cause du Filz de [???]homme, esiouissez-vous en cesiours-la & sautez de ioye. Car voici vostre salaire est grand es cieux. La le mot de sauter de ioye ne se pred pas pour danser, mais pour se resiouir grandement, ainsi que Dauid sautoit & tressailloit de ioye. Et ainsi en Zacharie pour dire qu’on s’esbatroit encor & s’esiouiroit-on es rues de Ierusalem. Ie dis d’auantage que ce que dit Zacharie n’estoit pas pour approuuer la danse, mesme que la n’est pas parle de danse. Mais Dieu promettoit que Ierusalem seroit encor habitee & en paix, si qu’on y verroit les vieilles personnes de vieillesse s’appuyer sur le baston, & les rues & places de la ville plaines de fils & de filles qui se ioueroyent ensemble comme on fait en temps d’vne longue paix, ce qui se peut bien faire sans danser.

On allegue aussi ce que dit nostre Seigneur Matth. II. que les petits enfans crient es marches a leurs compagnos, Nous vous auons ioue de la fleutte, & vous n’auez point danse, nous vous auons chante complainte & vous n’auez point lamente ou pleure. Ie respons que nostre Seigneur ne dit pas cela pour approuuer la danse, mais pour monstrer que les Iuifs estoyer come ces enfans qui n’auoyent voulu ni danser ni lamenter. Car lean Baptiste estoit venu auec vne grande austerite de vie pour les amener a repentance, & n’auoyet pas beaucoup profite. Et nostre Seigneur auoit mene vne vie plus facile, & si les Iuifs n’en auoyent este ni mieux gagnes ni mieux attires a [???]Euangile. Si on dit que nostre Seigneur ne condamne pas la danse, que plustost semble qu’il [???]approuue, veu qu’il parle de sa facilite de viure, [???]estant accommode a la facon de viure des autres homes, & parle des lametations a propos de [???]austerite de Iean Baptiste. Ie respons encor qu’il n’est la question de reprouuer ni d’approuuer la danse. Mais de dire que les Iuifs estoyent incorrigibles, comme ceux qu’on ne scait par quel bout les prendre, que nostre Seigneur par sa facilite de vie, & quoi qu’il se fust accommode a tous, ne les auoit attires a soi, ni resiouis en sa grace, ni S. Iean Baptiste esmeus a repentance par son austerite.

Il en y a qui alleguent aussi ce qu’est dit au 16 de S.Luc, qu’on dansoit en la maison du pere de lenfant prodigue. Ie respons que nostre Seigneur n’a pas dit cela pour approuuer la danse : mais bien pour monitrer qu’il y a ioye au ciel quand quand vn pecheur vient a repentance. Nostre Seigneur (dira-on) parle selon la facon commune de s’esgayer, Ie respons que cela est vray, mais l’ensuit-il que la commune facon de faire soit tousiours bonne ? & qu’elle doiue estre imitee, mesme quand il y a du mal ? comme nous auons fait paroistre cy dessus qu’ily a aux dases ?

Les similitudes ne l’emplyoment pas en tout ce qui est dit en icelles. Mais en ce seulement dont est question. Car autrement il seroit loisible de desrober son maistre, veu la similitude du maistre d’hostel qui desroboit son Seigneur, Luc 15 ce qui n’est loisible de faire.

 Chap. III. - Les effects des danses.

Venons maintenant aux effects des danses, il est escrit au premier liure de Moyse dit Genese, que la fille de Iacob estant sortie pour voir les filles du Pays fut rauie par le fils du Roy de Sichem. Or si elle n’a este seure de se montrer ainsi encor qu’elle ne fust pas sortie pour danser, mais comme est vray semblable ce que dit Iosephe pour voir les filles du lieu, en quelque assemblee de danse, quelle seurete y a il de permettre telles dissolutions que les danses, & que cela soit libre.

Mais voicy dequoy puis apres cette fille fut cause pour [???]estre trop voulu monstrer, c’est que la ville de Sichem fut mise au fil de l’espee, & Iacob & sa famille (lors [???]Eglige de Dieu) en danger d’estre destruits. Les filles de Silo pour leurs danses furent rauies. Certes en ces exemples, Dieu montre bien, que les denoirs des parens n’est pas de laisser ainsi vaguer leurs filles, & que de telles danses en fin ilne peut sortir que du mal, & qu’il est bie plus seur & meilleur d’interdire les danses & les banir de la republicque, & de [???]Eglise que de les
pennettree, ni en la rue, ni en la maison, soit en assemblee ou festins.

Et pour voir cecy plus clairement, quel profit apporta la belle danse de la fille d’Herodias ? sinon qu’elle fut cause que S. Iean Baptiste eut la teste tranchee ? Car le Roy Herodes pour le plaisir qu’il print a la voir danser, ou baller luy promit tout ce qu’elle demanderoit, & fut-ce la moitie de son Royaume. Que jugerons nous donc de la danse ? Quels sont ses effets ? veu qu’elle a enyure ou forcene Herodes, iusques la qu’il voulut doner a cette danseresse pour auoir bien danse la moitie de son Royaume, & en fin luy donna la teste du sainct seruiteur de Dieu, qu’il scauoit bien estre tel, & l’oyoit volontiers, & faisoit beaucoup de choses bonnes apres l’auoir ouy ? Si donc le Diable a surpris par cette danse ce Roy, dira-on qu’on en puisse estre surpis en mal, ni offenser contre Dieu en la danse ?

Mais qui doutera que Zamri qui mena la Princesse Cosbi pour la paillarder au Tabernacle de Conuenance, comme s’il eust voulu faire vn bordeau du Sanctuaire de Dieu ? qui doutera dije, qu’il eust iamais fait cela s’il n’eust este comme ensorcele ainsi que plusieurs autres d’Israel, par les danses des filles de Madian, & de Moab qu’elles faisoient en la solennite de leurs Idolatries, fust de Venus, ou de Priapus (comme veulent aucuns) qu’on appelloit Baal Pheor, ou autre Idolatrie.

 Chap . IIII. Lieux de la saincte Escriture contre les danses.

Pour venir maintenant aux lieux que nous auons en l’Escriture saincte pour condamner les danses, i’amenerary premierement ce que dit S. Paul I. Cor.10. ce qui est pris de l’Exode. C’est que les enfans d’Israel apres auoir sacrifie a leurs veaux, ils [???]assirent pour manger & pour boire, puis se leuerent pour jouer, ce jeu qu’ils faisoient en cette idolatrie m’estoit, ni n’a este pris que pour la danse ; On le peur ainsi recueillir des mots de Moyse ; & puis qui ne scait que la danse est le jeu qui vient apres la panse ? Aussi auoient ils la lors les instrumes de la danse, a scauoir les flageols, & les sonnoient, lesquels Moyse ayant ouy & voyant leur idolatrie & leur danse & dissolution, rompit les tables de la Loy, iugeant ce peuple indigne de l’alliace de Dieu. Or la dessus S. Paul nous exhorre, de ne nous acquerir la malediction de Dieu comme ce peuple se l’est acquise. Si on dit que ce fut par l’Idolatrie, ie l’accorde, mais la danse y fut aussi meslee, & S. Paul ne fait mention de ce jeu sans cause, ains parle comme de chose ou Dieu estoit aussi offense, & dont on se doit aussi garder, & qui estoit de l’Idolatrie.

La danse de fait va auec l’Idolatric communement, ainsi qu’a este dit, & en a sa source, comme on voit que les Idolatres apres auoir fait leurs deuotios apres leurs idoles & images de leurs saincts en leurs confrairies, s’en vont se mettre a danser sous les arbres plantez tout expres aupres des temples de leurs idoles : Et la dansent au son des instruments, ou au chant de chansons sales & vilaines, voire si vilaines & lubriques que les Payens (selon que neus lisons leurs himnes en Homere & allieurs) n’en eurent iamais de si sales. Nous disons donc qu’en ces lieux de Moyse & de S. Paul la danse est condamnee, comme estant de I’Idolatrie, & chose qui attire le courroux & indignation de Dieu.

Nous auons aussi la menace que Dieu faisoit par Esaye aux filles & aux femmes de Ierusalem : pour autant, dit Dieu, que les filles de Sion se sont esluees & ont chemine la gorge estendue, & guignant des yeux, & ont chemine auec vne brave desmarche, & ont fait resonuer leurs pas, l’Eternel pelera la greue des filles de Sion, & l’Eternel descouvrira leur vergogne. Helas ou est-ce que les femmes & les filles ont la demarche plus braue & plus affectee qu’en la danse ? ou leuent elles plus le nez ? Ou se piassent elles plus de leur beaute ? Ou composent elles mieux leur contenance ? Ou vaguent plus leurs yeux ? Mais comment, que comme si elles vouloient naurer tous ceux qui les regardent ? N’est-ce pas autant, mais encor plus que ce que reprenoit Esaye es filles & femmes de Ierusalem ? Et si pour cela Dieu a descouuert leur vergongne, & les a prostituees a leurs aduersaires, & despouillees de tous leurs Ioyaux & beaux atours, que fera-il a celles qui ne se plaisent que ces delices de peche ? C’est le iuste Iugement de Dieu que celles qui veulent estre conuoitees & n’y obuient, ains y complaisent, & se font voir pour cet effect, soient non seulement conuoitees, mais aussi prostituces. Et cest dequoy Dieu menacoit par son Prophete les filles & les femmes de Ierusalem. Qui ayme le danger, dit vn sage, cherra en iceluy. Or dautant que ce danger est surtout en la danse comme a este dit cy dessus, nous tenons que la danse ne doit estre ny libre ny permise, en nos Eglises & republiques.

Aussi ne peut on contredire que le mesme Prophete au 5. chap. de ses propheties ne condamne la danse en ce qu’il dit, le lut & la harpe sont en leurs conuiues. Si on dit qu’Esaye ne parle pas des danses, mais des instruments de musique, ie demade si cest pour les condamner, ou pour en condamner [???]abus ? C’est [???]abus sans contredit que le Prophete condamne [???]a, car autrement la musique, ni le lut, ni la harpe, ne sont point a codamner : on en vsoit au S. Temple.

Mais quel plus grand abus de la musique & de ses instruments que la danse ? Nous tenons donc que cest la danse qui est la condamnee, & non la musique simplement ny la melodie des instrumens.

Mais la danse n’est que vanite, qui peut contredire cela ? Quel bien, quelle vtilite en vient il ? Qui ne voit que ce n’est que vaine ostentation, folastrerie, & de loeil & des pieds & des mains, qu’affeterie de face, des gestes & de contenance ? Ie demande si cela n’est pas deffendu par la parole de Dieu. La danse n’est que vanite folastrerie & affetterie, la danse est donc deffendue par la parole de Dieu.

 Chap. V. Raisons contre les danses.

Dauantage tout ce qui est du Diable est deffendu par la parole de Dieu, la danse est du Diable, nous l’auons veu cy dessus : elle est donc deffendue par la parole de Dieu.

Item tout ce qui est de l’idolatrie est deffendu & reprouue par la parole de Dieu. Or telle est la danse : elle est donc deffendue & reprouue par la parole de Dieu.

On me reprochera que ie fay Dauid Idolatre, & les filles & les femmes d’Israel qui chanteret
en danses au desert, & apres auoir passe la mer rouge, & apres la mort du Philistin occis par Dauid :

Ie respos que ces danses n’estoient charnelles, affettees & voluptuenses, comme celles que nous reprouuons, ni ainsi mesurees, & auec tels artifices, ains plustost quelques sauts de ioye & d’vne ioye saincte & louant Dieu, comme portoient les mots de leurs chansons. Et quant aux danses de la mort du Philistin elles n’eurent qu’vn malheureux effect, & tel qu’il eust este meilleur qu’elles n’eussent pas danse comme a este dit.

Aussi ne peut on contredire que tous ce qui induit a conuoitise charnelle & a paillardise, ne soit deffendu par la parole de Dieu.

Or la danse incite a telle conuoitise & paillardise, elle est done deffendue par la parole de Dieu. Nous auons monstre tout cela amplemens cy dessus, par la confession de ceux mesme qui soustiennent la danse.

Tout ce qui est des desirs de la chair est defendu par la parole de Dieu, or la danse est des desirs de la chair, la danse est donc deffendue par la parole de Dieu. Mais qui doute que la danse ne soit des desirs charnels ? Qu’est la danse que gaillardise charnelle, luxure & lubricite bouillonnante ?

Car qui esmuet a faire ces sauts, tours, bonds & gambades qui tiennent plus des Singes, Cheureaux & des leunes bouquins & Satires (cest a dire Diables a pieds de chevre, comme on les figure, & se monstroient entre les Payens) que de la modestie & grauite des hommes, de la modestie & bien seance des filles & femmes pudiques & honnestes ?

Tout ce ou l’ame peut estre souillee de lubricite & sales concupiscences est deffendu par la parole de Dieu. Or en la danse, l’ame peut estre souillee de tout cela, & l’est indubitablement en ceux qui s’y plaisent, la danse est donc defendue par la parole de Dieu. Que ce ou l’ame peut estre souillee soit deffendu par la parole de Dieu, l’Apostre en l’Epistre aux Ephesiens le montre clairement, quand il dit que que tout ce qui est de souillure ne soit pas mesmes nomme
entre vous.

Mais tout ce que Dieu n’a point ordonne, & ou on abuse des dons de Dieu est deffendu par la parole de Dieu. Or Dieu n’a pas ordonne la danse, & on y abuse de la musique qui est vn beau don de Dieu : la danse est donc deffendue par la parole de Dieu. Que la musique soit vn beau don de Dieu, qui en doute ? Dieu, la ordonnee en son seruice, & ordonne d’y chanter ses louanges, comme a este dit ci-dessus, & la consacrer a ce sainct vsage. Est-il donc loisible d’en abuser en lubricites, desirs charnels, vanite & ostentation, comme on fait en la danse ?

L’ostentation est deffendue en la parole de Dieu, & est mal-heureuse, tesmoin Dina, qui fit trop librement monstre & ostentation de soimesme, comme a este dit ci-deuant, tesmoin Bersabee, qui ne fut pas si aduisee quelle deuoit en se baignant en beau plein iour en sa fontaine. Tesmoin ce que Ezechias fit monstre de ses thresors aux ambassadeurs de Babylon, qui induisit les Babyloniens d’enuier les richesses de lerusalem, & thresors d’Ezechias. Or la danse n’est qu’ostentation : qui contredira cela ? Elle est donc deffendue par la parole de Dieu.

Tout ce qui est impudique & contraire a la sainctete est defendu par la parole de Dieu. Or la danse n’est qu’impudicite. L’Apostre dit (ce que la raison veut) que nous cheminions comme il est decent selon le Seigneur. Ie demande si la saincte Vierge & les saincts ont danse : nostre conuersation doit estre comme la leur, Dieu n’en requiert pas moins de nous que de ceux la.

Dauantage tout ce qui a apparence de mal & en peut donner le blasme, est condamne par la parole de Dieu. Or la danse a apparence de mal, & en peut donner le blasme : la danse est donc condamnee par la parole de Dieu. Que la danse donne apparence de mal & le soupcon, nous le verrons ci apres par le tesmoignage & iugement des plus entendus d’entre les Payens. Mais qui doute que celles qui scauent si bien fretiller en la danse, & qui en font la monstre auec si grand plaisir, ne soyent tenues pour peu chastes ? S. Paul en l’Epistre aux Romains chap. 13. & S.Pierre en sa premiere chap.4.ver. 3. deffendent les danses aux fidelles, comme chose indecente & deshonneste aux Saincts.

Ces deux Apostres vsent du mot de Comos , qui signifie danses, aussi bien que commeffation ou buveries & intemperance & gourmandises, voire que le mot se prend pour la danse, ou le bal & mascarades qui se font apres souper. Certes ce n’est point sans cause que ces deux Apostres ont vse de ce mot qui signifie autant la danse que [???]intemperance, qui est la mere de la danse, come on dit en commun prouerbe qu’apres la panse vient la danse. Et les Payens appelloyentet Comus ou Comos le Dieu qu’ils faisoient presider sur les danses, bals & autres dissolutions de nuict, duquel dieu faisoyent la feste les ieunes gens, allans de nuict auec instrum[???]s de musique danser deuant les portes & maisons de leurs amis, comme on fait maintenant a Caresme prenant.

Tout ce qui n’est que dissolution, intemperance, & qui est de [???]idolatrie des payens est defendu par la parole de Dieu. Or la danse n’est que dissolution, intemperance & idolatrie, mesmes de celle des Payens. La danse donc est defendue par la parole de Dieu.

Mais ie demande, si ce qu’est dit que la danse de la fille d’Herodias pleut a Herode, est dit a la louange d’icelui, ou a son vitupere, ou a la louange & au a blasme de la dase. Mais qui doute que la danse ne soit condamnee en cela, comme vne poison d’enfer, ou ce pauure roi fut ensorcele, & son esprit tellement espris de ce venin infernal, qu’il lui en voulur donner la moitie de son royaume, si elle l’eust demande,estoit il sage ? Qui le faisoit si fou que la danse ? Laquelle lui auoit fait perdre le sens dont lui donna la teste de Jean Baptiste, comme a este dit ci-dessus.

Tout ce qui ensorcelle nos esprits d’vn venin infernal est deffendu par la parole de Dieu. Or la danse les ensorcelle d’vn venin d’enfer, tesmoin Herodes : la danse est donc deffendue
par la parole de Dieu.

 Chap. VI. Les Anciens docteurs contre les danses.

Nous auons veu que les danses sont deffendues par la parole de Dieu, voyons maintenant qu’en ont dit e les anciens docteurs, & premierement ce qu’en dit vn de ceux qui ont le plus escrit, a scauoir S.Augustin, qui escriuant a vn certain Petilian chap. 6 .dit ainsi, Autrefois les Euesques reprenoyent fort aigrement les danses, mais auiourd’hui ils ne font point de difficulte de danser auec les femmes. Ce sont les mots de ce bon docteur, par lesquels on peut voir que du temps que [???]Eglise estoit bien gouuernee, que les danses n’estoyent point permises, & que ce qu’elles ont este permises, c’a este par la negligence des Euesques & Pasteurs, & la se peut voir comment peu a peu les Pasteurs se sont abastardis : s’esbahira-on donc si beaucoup d’erreurs se sont fourrees en l’Eglise ?

Ce mesme docteur sur le Pse.3. 3. quand il expose ces mots ; Chantez sur la viole auec l’instrument de dix cordes .Il prend ces dix cordes pour les dix combandemens de Dieu, & parlant vn peu de chacun il vient au quatriesme la ou il est parle du repos, & la il dit, qu’il est meilleur de labourer le dimanche a la vigne & aux champs, que de danser. S.Iean Chrisostome en l’homelie 56. sur le Genese condamne les danses encor plus aigrement. Car parlant des nopces de Iacob, il dit, vous auez veu des nopces, mais non des danses, & la il les appelle diaboliques, & apres plusieurs choses qu’il en dit,il adiouste que par les danses [???]espoux & [???]espouse se corrompent & toute sa famille y est polluee.

Dauantage en [???]homelie 48. Tu oys des nopces, dit-il, & non des danses : Car en ce temps la les hommes n’estoyent point si lascifs qu’auiourd’hui. Voila comment Chrysostome tient que la lasciuete est la source des danses. Mais sur le 14.chap.de [???]Euangile selon S. Matthieu parlat de la fille d’Herodias, il dit, Auiourd’hui les Chrestiens ne promettent pas, ni ne donnent la moitie de leur royaume pour les danses, mais leurs ames en damnation eternelle :

Et pui a la fin il dit, ou il y a de telles danses, le diable y est & danse auec la compagnie.Mais moi ie dirai plus que Chrysostome : que c’est le diable qui mene la danse, entant qu’il fait danser, & veu le mal qui en peut prouenir & en prouient.

 Chap. VII. Les Conciles & Loix Ciuiles contre les danses.

Il y a aussi des Conciles qui deffendent aux Chrestiens de danser : [???]vn dit, il n’est point decent aux Chrestiens de danser aux nopces, mais qu’ils disnent & soupent auec crainte & modestie, & puis rendent graces a Dieu du benefice des nopces, & en ce mesme Concile que les Clers (c’est a dire ceux qui auoyent charge en l’Eglise) & que nous appellons Ministres, Diacres & Anciens, ne se trouvent point aux danses, soit qu’elles soyent publiques, ou qu’elles soyent aux nopces. Bien,dit le Concile, se pourront-ils trouuer aux nopces, mais quand les menestriers & ioueurs seront venus pour dancer, qu’ils se retirent de peur que par leur presence ils ne semblent approuuer ceste lasciuete. Et en vn autre Concile tenu du temps du Pape Symmacus, & Hirsmidas il est deffendu aux Chrestiens de dancer. Aux Loix Ciuiles il est dit, Nous permettons bien les iours du repos de se reposer de ces oeuures : mais non point de s’adonner aux voluptes, & par ainsi ces iours la on ne dansera point, soit que foy[???]t dances lasciues, ou pour se recreer.

 Chap. VIII.- Le iugement des Payens touchant les dances

Pour faire plus de honte aux Chrestiens qui veulent maintenir telle impudicite, voyons le iugement que les Payens de leur sens naturel seulement ont fait touchant les dances. Il y auoit a Rome vn proconsul nomme Murena, icelui demandoit le consulat : on lui mit sus qu’il auoit danse estant en son gouuernement en l’Asie.Pour cela seulement Caton requit qu’il fust deboute du consulat. Cela monstre qu’on ne trouuoit en la republique Romaine les danseurs dignes d’y auoir charge. Ciceron plaidoit pour Murena, & nia tout a plat qu’il eust danse & si dit que iamais homme sobre ne dansa, sinon que d’auenture il deuint incense, ou fust yvre. Il dit plus, ni seul ni en banquet honneste. Ce sont les mots de Ciceron en sa harangue pour Murena. Le mesme Ciceron au troisieme liure de ses offices dit qu’vn homme de bien & honneste ne voudroit pas danser publiquem[???]t, non pas mesmes pour gagnet vn grand patrimoine. Et apres son retour au Senat, il reproche a vn sien aduersaire nomme Sulpice, pour vn grand vice & infamete qu’il estoit vn danseur : autant en reproche il en ses Philipiques a M. Antoine.

Il a este reproche a Neron d’auoir danse publiquement. Suetone recite que Caligula se fit mocquer de ce qu’on [???]auoit veu danser. Il recite aussi que Domitian, (qui relegua S.Jean en [???]isle de Patmos) cassa de [???]estat de magistrature vn Romain, pource qu’il se plaisoit a danser.

Ovide docte payen en sa Metamorphose trasforme les Cretains (qu’on appelle auiourd’hui Candiots) en des Singes, pource que les Cretains estoyent des danseurs. Ce Poete vouloit dire que les danseurs & baladins sont plustost [???]estat de Singes que d’hommes.

Saluste historiographe Romain qui a escrit la coniuration de Catilina, recite que Ciceron lors consul la descouurit par le moyen d’vne Fulvia, laquelle Catilina entretenoit : & Saluste pour descrire, este courtisane de tout point, & la representer ce qu’elle estoit, dit qu’elle scauoit bien danser & baler, & qu’elle en scauoit plus qu’il n’estoit decent a vne femme honeste.

Mais est auiourd’hui a celle qui en saura le plus, & se trouuera en nos Eglises des gens qui n’ont point de honte de faire instruire en cela leurs filles & leurs fils, & plongent leurs enfans & les perdent en ceste volupte.

 Conclusion des danses

Veu donc que les danses ne sont que vanite, qu’elles n’apportent d’elles-mesmes qu’occasion d’offenser Dieu, qu’elles incitent a lubricite, & sales concupiscences, qu’on y chante des chansons paillardes auec ioye prophane, dont on deuroit pleurer, & que les bonnes moeurs y sont corrompues, & veu queles cadases de ces danses ne sont que mouuemens attrayans a peche, que Dieu punit telles amorces a paillardise, menacoit les filles & les femmes de Ierusalem de les prostituer pour telles dissolutions & ostentation, & pour se vouloir trop monstrer en leurs braues demarches & vestemens. Et veu que nostre Seigneur nous commande de nous priuer de tout ce qui peut nous corrompre , infecter nos ames , & nous rendre indignes du royaume des cieux : Et quoi qu’on die,veu qu’il conste que les ames ne [???]en peuuent retourner de la danse, que pires qu’elles n’y sont allees, & veu aussi que Dieu ne nous permet point d’vser d’aucun exercice de recreation qui donne scandale, ou a nous ou au prochain, comme sont les danses, ainsi qu’a este dit, soit a ceux qui danseut ou a ceux qui voyent danser, & veu que la danse de Dauid & de la soeur de Moyse & des femmes d’lsrael n’ont rien de commun auec les dances d’auiourd’hui veu aussi que la danse est condamnee & deffendue par plusieurs passages de la parole de Dieu, & veu que telles danses sont sorties de [???]idolatrie, sont le ieu & ceremonies des sorciers & du diable auec eux : veu aussi les malheurs & effects qui prouiennent des dances comme a este monstre, veu tout cela, di-ie, auec les Anciens Docteurs, qui ont appele les danses diaboliques, & auec les Anciens Conciles qui deffendent les danses aux Chresties, & suiuant les Loix Ciuiles, & mesmes selon l’aduis des plus entendus d’entre les Payens : Nous reprenons les danses, les reiettons de nos maisons, familles & Eglises, comme vanite, luxure, ostentation, amorces a peche, attraits a lubricite, afin d’oster le mal du milieu & nous, & pour estre a Dieu peuple sainct & agreable.

FIN.

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