Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

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1686 - Fénelon et la conversion des protestants de la Tremblade

dimanche 7 juin 2009, par Pierre, 1825 visites.

Gant de velours et main de fer : telle est la méthode de Fénelon pour obtenir la conversion des protestants de la région de la Tremblade. « Les peuples nourris dans l’hérésie ne se gagnent que par la parole. Un curé qui saura expliquer l’Évangile affectueusement, et entrer dans la confiance des familles, fera toujours ce qu’il voudra…. Dans les lieux où les missionnaires et les troupes sont ensemble, les nouveaux convertis vont en foule à la communion. »

Dans trois lettres au Marquis de Seignelay, Fénelon explique sa méthode, et demande des appuis.

En savoir plus sur Fénelon (Wikipédia)

Source : Correspondance de Fénelon - Paris - 1827 - Books Google

Lettres de Fénelon au Marquis de Seignelay : détails sur les missions de la Saintonge.

Il lui rend compte de l’état des missions de la Saintonge.

Les originaux de cette lettre et des deux suivantes sont entre les mains de M. le comte de Sèze, pair de France, qui a bien voulu permettre a M. le cardinal de Bausset d’en faire usage dans l’Histoire de Fénelon. (Liv. 1, n. 25. ) Nous les publions sur une copie faite de la main de Son Eminence , et collationnée par elle.

A la Tremblade, ce 7 février ( 1686 )

Monsieur ,

Je crois devoir me hâter de vous rendre compte de la mauvaise disposition où j’ai trouvé les peuples de ce lieu. Les lettres qu’on leur écrit de Hollande leur assurent qu’on les y attend pour leur donner des établissemens avantageux, et qu’ils seront au moins sept ans en ce pays-là sans payer aucun impôt. En même temps, quelques petits droits nouveaux qu’on a établis sur cette côte, coup sur coup, les ont fort aigris. La plupart disent assez hautement qu’ils s’en iront dès que le temps sera plus assuré pour la navigation. Je prends la liberté, monsieur, de vous représenter qu’il me semble que la garde des lieux où ils peuvent passer, a besoin d’être augmentée. On assure que la rivière de Bourdeaux fait encore plus de mal que les passages de cette côte, puisque tous ceux qui veulent s’enfuir vont passer par là, sous le prétexte de quelque procès. Il me semble aussi que l’autorité du Roi ne doit se relâcher en rien ; car notre arrivée en ce pays, jointe aux bruits de guerre qui viennent sans cesse de Hollande, font croire à ces peuples qu’on les craint et qu’on les ménage. Ils se persuadent qu’on verra bientôt quelque grande révolution, et que le grand armement des Hollandais est destiné à venir les délivrer. Mais en même temps que l’autorité doit être inflexible pour contenir ces esprits que la moindre mollesse rend insolens, je croirois, monsieur, qu’il seroit important de leur faire trouver en France quelque douceur de vie, qui leur ôtât la fantaisie d’en sortir. Il est à craindre qu’il en partira un grand nombre dans les vaisseaux hollandais qui commencent à venir pour la foire de Mars à Bourdeaux. On assure que les officiers nouveaux convertis font ici mollement leur devoir. Pour M. de Blénac, il me paroît faire le sien fort exactement. Pendant que nous employons la charité et la douceur des instructions , il est important, si je ne me trompe, que les gens qui ont l’autorité la soutiennent, pour faire mieux sentir aux peuples le bonheur d’être instruits doucement. Je crois que M. l’intendant sera ici dans peu de jours 5 cela sera très-utile, car il sait se faire craindre et aimer tout ensemble. Une petite visite, qu’il vint nous rendre à Marennes, fit des merveilles ; il acheva d’entraîner les esprits les plus difficiles. Depuis ce temps-là , nous avons trouvé les gens plus assidus et plus dociles. Il leur reste encore des peines sur la religion ; mais d’ailleurs ils avouent presque tous que nous leur avons montré avec une pleine évidence qu’il faut, selon l’Écriture, se soumettre à l’Église, et qu’ils n’ont aucune objection à faire contre la doctrine catholique, que nous n’ayons détruite très-clairement. Quand nous sommes partis de Marennes, nous avons reconnu de plus en plus qu’ils sont plus touchés qu’ils n’osent le témoigner ; car alors ils n’ont pu s’empêcher de montrer beaucoup d’affliction. Cela a été si fort, que je n’ai pu leur refuser de leur laisser une partie de nos messieurs, et de leur promettre que nous retournerions tous chez eux. Pourvu que ces bons commencemens soient soutenus par des prédicateurs doux, et qui joignent au talent d’instruire celui de s’attirer la confiance des peuples, ils seront bientôt véritablement catholiques. Je ne vois, monsieur, que les pères Jésuites qui puissent faire cet ouvrage ; car ils sont respectés pour leur science et pour leur vertu. Il faudra seulement choisir parmi eux ceux qui sont les plus propres à se faire aimer. Nous en avons un ici, nommé le père Aimar, qui travaille avec nous, et qui est un ouvrier admirable : je le dis sans exagération. Au reste, monsieur, j’ai reçu une lettre du père de la Chaise, qui me donne des avis fort honnêtes et fort obligeans sur ce qu’il faut, dès les premiers jours, accoutumer les nouveaux convertis aux pratiques de l’Église, pour l’invocation des saints et pour le culte des images. Je lui avois écrit, dès les commencemens, que nous avions cru devoir différer de quelques jours l’Ave Maria dans nos sermons, et les autres invocations des saints dans les prières publiques que nous faisions en chaire. Je lui avois rendu ce compte par précaution, quoique nous ne fissions en cela que ce que font tous les jours les curés dans leurs prônes, et les missionnaires dans leurs instructions familières. Depuis ce temps-là je lui ai rendu le même compte de notre conduite, que j’ai déjà eu l’honneur de vous rendre. J’espère que cela, joint au témoignage de M. l’évêque et de M. l’intendant , et des pères Jésuites, nous justifiera pleinement.

Je suis avec un respect et une reconnoissance parfaite, monsieur,

Votre très-humble et très-obéissant serviteur,

L’abbé De Fénelon.


A la Tremblade, 26 février (1686.)

Nous avons laissé Marennes aux Jésuites, qui commencent à y grossir leur communauté, selon votre projet. Après plus de deux mois d’instruction sans relâche, nous avons cru devoir mettre en possession de ce lieu les ouvriers qui y seront fixés, et passer dans les autres de cette côte, dont les besoins ne sont pas moins pressans. Les trois Jésuites de Marennes n’y seront pas inutiles avec ceux qui y viennent. Les uns tempéreront les autres ; il en faut même pour le temporel. Avant que de les quitter, j’ai tâché de faire deux choses : l’une, de faire espérer aux peuples beaucoup de douceur et de consolation de la part de ces bons pères, dont j’ai relevé fortement la bonne vie et le savoir, l’autre, de persuader en même temps à ces pères, qu’ils doivent en toute occasion se rendre les intercesseurs et les conseils du peuple dans toutes les affaires qu’ils ont auprès des gens revêtus de l’autorité du Roi. N’importe que les gens qui ont l’autorité leur refusent ce qu’il ne sera pas à propos de leur accorder ; mais enfin ils doivent parler le plus souvent qu’il pourront, sans être indiscrets, pour attirer les grâces, et pour adoucir les punitions : c’est le moyen de les faire aimer, et de leur faire gagner la confiance de tout le pays ; c’est ce qui déracinera le plus l’hérésie : car il s’agit bien moins du fond des controverses, que de l’habitude dans laquelle les peuples ont vieilli, de suivre extérieurement un certain culte, et de la confiance qu’ils avoient en leurs ministres. Il faut transplanter insensiblement cette habitude et cette confiance chez les pasteurs catholiques : par là les esprits se changeront presque sans s’en apercevoir. Dans cette vue, j’ai pris soin que plusieurs petites grâces, que nous obtenions pour les habitans de Marennes, passassent extérieurement par le canal des Jésuites, et j’ai fait valoir au peuple qu’il leur en avoit l’obligation. Si ces bons pères cultivent cela, comme je l’espère, ils se rendront peu à peu maîtres des esprits. Ces peuples sont dans une violente agitation d’esprit ; ils sentent une force dans notre religion, et une foiblesse dans la leur, qui les consterne. Leur conscience est toute bouleversée, et les plus raisonnables voient bien où tout cela va naturellement ; mais l’engagement du parti, la mauvaise honte, l’habitude et les lettres de Hollande qui leur donnent des espérances horribles, tout cela les tient en suspens, et comme hors d’eux-mêmes. Une instruction douce et suivie, la chute de leurs espérances folles, et la douceur de vie qu’on leur donnera chez eux, dans un temps où l’on gardera exactement les côtes, achevera de les calmer. Mais ils sont pauvres ; le commerce du sel, leur unique ressource, est presque anéanti. Ils sont accoutumés à de grands soulagemens : si on ne les épargne beaucoup, la faim se joignant à la religion, ils échapperont, quelque garde qu’on fasse. Les blés que vous avez fait venir si à propos, monsieur, leur ont fait sentir la bonté du Roi ; ils m’en ont paru touchés. L’arrivée de M. Forant, que vous envoyez, servira aussi beaucoup à retenir les matelots. Dans la situation où je vous représente les esprits, il nous seroit facile de les faire tous confesser et communier, si nous voulions les en presser, pour en faire honneur à nos missions. Mais quelle apparence de faire confesser ceux qui ne reconnoissent point encore la vraie Église, ni sa puissance de remettre les péchés ? comment donner Jésus-Christ à ceux qui ne croient point le recevoir ? Cependant je sais que, dans les lieux où les missionnaires et les troupes sont ensemble, les nouveaux convertis vont en foule à la communion. Ces esprits durs, opiniâtres, et envenimés contre notre religion, sont pourtant lâches et intéressés. Si peu qu’on les presse, on leur fera faire des sacrilèges innombrables ; les voyant communier, on croira avoir fini l’ouvrage ; mais on ne fera que les pousser par les remords de leur conscience jusqu’au désespoir, ou bien on les jettera dans une impossibilité et une indifférence de religion qui est le comble de l’impiété, et une semence de scélérats qui se multiplie dans tout un royaume. Pour nous, monsieur, nous croirions attirer sur nous une horrible malédiction, si nous nous contentions de faire à la hâte une œuvre superficielle, qui éblouiroit de loin. Nous ne pouvons que redoubler nos instructions, qu’inviter les peuples à venir chercher les sacremens avec un cœur catholique , et que les donner à ceux qui viennent d’eux-mêmes les chercher après s’être soumis sans réserve. Nous sommes maintenant, monsieur , tous rassemblés ici , et de ce lieu nous allons instruire Arvert et tous les lieux voisins , qui forment une péninsule. Nous trouvons partout les mêmes dispositions, excepté que ce canton est encore plus dur que Marennes. Permettez-moi, monsieur, de vous témoigner notre parfaite reconnoissance sur la bonté avec laquelle vous avez parlé au Roi de nos bonnes intentions dans le travail qui nous est confié. Nous ne cesserons d’y faire tous les efforts dont nous sommes capables, tant que vous nous ordonnerez de continuer, quoique nous avancions peu ici, et que nos occupations de Paris eussent un fruit plus prompt et plus sensible. J’oubliois de vous dire, monsieur, qu’il nous faudroit une très-grande abondance de livres, surtout de Nouveaux-Testamens, et des traductions de la messe avec des explications : car on ne fait rien, si on n’ôte les livres hérétiques ; et c’est mettre les gens au désespoir, que de les leur ôter, si on ne donne à mesure qu’on ôte. Je suis, etc.


Au même, sur le même sujet que la précédente.

A la Tremblade, 8 mars ( 1686.)

L’arrivée de M. Forant a donné de la joie aux habitans de la Tremblade. J’espère qu’il servira beaucoup à les retenir, pourvu qu’il n’exerce point ici une autorité rigoureuse qui le rendroit bientôt odieux. Il donne un fort bon exemple pour les exercices de religion, et il engage par l’amitié les autres à les suivre. Sa naissance, sa parenté avec plusieurs d’entre eux, et la religion qui lui a été commune avec tous ces gens-là, le feroient haïr plus qu’un autre , s’il vouloit user de hauteur et de sévérité pour les réduire à leur devoir. Cependant le naturel dur et indocile de ces peuples demande une autorité vigoureuse et toujours vigilante. Il ne faut point leur faire du mal ; mais ils ont besoin de sentir une main toujours levée pour leur en faire s’ils résistent. Le sieur de Chatellars, subdélégué de M. Arnoul, supplée très-bien à ce que M. Forant ne pourra pas faire de ce côté-là. La douceur de l’un et la fermeté de l’autre étant jointes, feront beaucoup de bien. Je n’ai pas manqué, monsieur, de lire publiquement ici et à Marennes ce que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire des bontés que le Roi aura pour les habitans de ce pays, s’ils s’en rendent dignes, et du zèle charitable avec lequel vous cherchez les moyens de les soulager. Les blés que vous leur avez fait venir à fort bon marché leur montrent que c’est une charité effective, et je ne doute point que la continuation de ces sortes de grâces ne retienne la plupart des gens de cette côte. C’est la controverse la plus persuasive pour eux : la nôtre les étonne, car on leur fait voir clairement le contraire de ce que le ministre leur avoit toujours enseigné comme incontestable , et. avoué des catholiques mêmes. Nous nous servons utilement ici du ministre qui y avoit l’entière confiance des peuples. et qui s’est converti. Nous le menons à nos conférences publiques, où nous lui faisons proposer ce qu’il disoit autrefois pour animer les peuples contre l’Église catholique. Cela paroît si foible et ai grossier par les réponses qu’on y fait, que le peuple est indigné contre lui. La première fois, plusieurs lui di- soient, se tenant derrière lui : Pourquoi, méchant, nous as-tu trompés ? Pourquoi nous disois-tu qu’il falloit mourir pour notre religion, toi, qui nous as abandonnés ? Que ne défends-tu ce que tu nous as enseigné ? Il a essuyé cette confusion, et j’en espère beaucoup de fruit. Ceux de Marennes sont aussi dans la même indignation contre un ministre qu’ils croyoient fort habile. Il n’étoit pas sorti du royaume, parce qu’il a été mourant pendant plusieurs mois ; enfin, il est guéri. Aussitôt M. l’abbé de Bertier, dans « n entretien particulier, le pressa pour une conférence publique : le peuple la souhaita avec ardeur, et le ministre n’osa la refuser, tant ses meilleurs amis furent scandalisés de le voir reculer. Il promit donc, et marqua le jour ; les matières furent réglées par écrit. Nous demandâmes deux personnes sûres, qui écrivissent les réponses de part et d’autre, afin que le ministre ne pût disconvenir, après la conférence, de ce qu’il y auroit été forcé d’avouer. On s’engagea de mettre le ministre dans l’impuissance d’aller jusqu’à la troisième réponse, sans dire des absurdités qu’il n’oseroit laisser écrire, et que les enfans mêmes trouveroient ridicules. Tout étoit prêt ; mais le ministre, par une abjuration dont il n’a averti personne, a prévenu le jour de la conférence. Dès que nous découvrîmes sa finesse, nous allâmes chez lui avec les principaux habitans qui étoient les plus mal convertis. Il ne put éviter d’avouer qu’il avoit promis la conférence, et qu’il sa dédisoit. Jugez, Messieurs, dîmes-nous sur-le-champ, ce qu’on doit croire d’une religion dont les plus habiles pasteurs aiment mieux l’abjurer que la défendre. Chacun leva les épaules, et l’un des principaux dit en sortant : Pour moi, j’ai soutenu mes sentimens tant que j’ai pu ; mais je vais songer sérieusement à ma conscience. Cette promesse n’aura peut-être pas de suites assez promptes et assez solides ; mais enfin, voilà l’impression des peuples : ils sentent le foible de leur religion, et la force accablante de la catholique. Je ne doute point qu’on ne voie à Pâque un grand nombre de communions, peut-être même trop. Ces fondemens posés, c’est aux ouvriers fixes à élever l’édifice, et à cultiver cette disposition des esprits. Il ne faut que des prédicateurs qui expliquent tous les dimanches le texte de l’Évangile avec une autorité douce et insinuante. Les Jésuites commencent bien ; mais le plus grand besoin est d’avoir des curés édifians qui sachent instruire, Les peuples nourris dans l’hérésie ne se gagnent que par la parole. Un curé qui saura expliquer l’Évangile affectueusement, et entrer dans la confiance des familles, fera toujours ce qu’il voudra. Sans cela l’autorité pastorale, qui est la plus naturelle et la plus efficace, demeurera toujours avilie avec scandale. Les peuples nous disent : Vous n’êtes ici qu’en passant ; c’est ce qui les empêche de s’attacher entièrement à nous. La religion, avec le pasteur qui l’enseignera, prendra insensiblement racine dans les cœurs. Les ministres n’ont été si puissans, que par la parole , et par leur adresse à entrer dans le secret des familles. N’y aura-t-il point des prêtres qui fassent pour la vérité ce que ces malheureux ont fait efficacement pour l’erreur ? M. de Saintes est bien à plaindre, dans ses bonnes intentions, d’avoir un grand diocèse où le commerce et l’hérésie font que peu de gens se destinent à être prêtres. Si on n’établit pas au plus tôt de bonnes écoles pour les deux sexes, on sera toujours à recommencer. Il faut même une autorité qui ne se relâche jamais , pour assujétir toutes les familles à y envoyer leurs enfans. Il faudroit aussi, monsieur, répandre des Nouveaux-Testamens avec profusion : mais le caractère gros est nécessaire ; ils ne sauroient lire dans les menus. Il ne faut pas espérer qu’ils achètent des livres catholiques -, c’est beaucoup qu’ils lisent ceux qui ne coûtent rien : le plus grand nombre ne peut même en acheter. Si on leur ôte leurs livres sans leur en donner, ils diront que les ministres leur avoient bien dit que nous ne voulions pas laisser lire la Bible, de peur qu’on ne vît la condamnation de nos superstitions et de nos idolâtries, et ils seront au désespoir. Enfin, monsieur, si on joint toujours exactement à ces secours la vigilance des gardes pour empêcher les désertions, et la rigueur des peines contre les déserteurs, il ne restera plus que de faire trouver aux peuples autant de douceur à demeurer dans le royaume, que de péril à entreprendre d’en sortir. C’est, monsieur, ce que vous avez commencé, et que je prie Dieu que vous puissiez achever selon toute l’étendue de votre zèle. Les Jésuites sont maintenant à Marennes en assez grand nombre pour instruire de suite tous les dimanches les principaux lieux de cette côte. Ainsi il ne nous reste qu’à leur préparer les voies eu chaque lieu. Nous avons accoutumé les peuples à entendre les vérités qui les condamnent le plus fortement, sans être irrités contre nous. Au contraire, ils nous aiment , et nous regrettent quand nous les quittons. S’ils ne sont pas pleinement convertis, du moins ils sont accablés, et en défiance de toutes leurs anciennes opinions. Il faut que le temps et la confiance en ceux qui les instruiront de suite, fasse le reste. Je ne prends, monsieur, la liberté de vous représenter tout cela, qu’afin de recevoir vos ordres sur notre séjour en ce pays, et de les exécuter avec une parfaite soumission.

J’ai eu sept ou huit longues conversations avec M. de Sainte-Hermine, à Rochefort, où j’ai été le chercher. Il entend bien ce qu’on lui dit, il n’a rien à y répondre ; mais il ne prend aucun parti. M. l’abbé de Langeron et moi, nous avons fait devant lui des conférences assez fortes l’un contre l’autre. Je faisois le protestant, et je disois tout ce que les ministres peuvent dire de plus spécieux. M. de Sainte- Hermine sentoit fort bien la foiblesse de mes raisons, quelque tour que je leur donnasse : celles de M. l’abbé de Langeron lui paroissoient décisives, et quelquefois il répondoit de lui-même ce qu’il falloit répondre contre moi. Après cela, j’attendois qu’il seroit ébranlé ; mais rien ne s’est remué en lui, du moins au dehors. Je ne sais s’il ne tient point à sa religion par quelque raison secrète de famille. Je serois retourné encore à Rochefort pour lui parler encore selon vos ordres, si M. Arnoul ne m’avoit mandé qu’il est allé en Poitou. Dès qu’il en sera revenu, j’irai à Rochefort, et je vous rendrai compte, monsieur, de ce que j’aurai fait.

Je suis, avec toute la reconnoissance et tout le respect possible, etc

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