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Le trésor liturgique de Cherves (16) en images - XIIIème siècle

mardi 9 octobre 2007, par Pierre, 4862 visites.

En images, découvrez le superbe trésor liturgique du XIIIème siècle trouvé en 1896 dans le village de Plumejeau, commune de Cherves (16). Un véritable chef-d’oeuvre de l’émaillerie limousine.

Un trésor aujourd’hui dispersé : 1 pièce au Musée du Louvre, 2 pièces au Musée de Cluny à Paris, la plus belle pièce (mais mutilée depuis sa découverte - voir ci-dessous "l’envol de l’archange Saint Michel") au Metropolitan Museum de New-York, et le reste, patrimoine voyageur, chez quelque(s) collectionneur(s).

Le texte de présentation est de Mgr X. Barbier de Montault.
Il a été publié dans le Bulletin de la Société Archéologique et Historique de la Charente - année 1897 - pages 81 à 257 - Cet article en ligne sur le site de la BNF Gallica (177 pages).

Les images présentées ici ont été éditées dans une annexe au Bulletin de 1897, de format 40 x 31 cm, et ne sont pas numérisées sur le site de la BNF.

Voir la galerie d’images

Le parcours d’une découverte archéologique


En 1897, Mgr Barbier de Montault écrit, dans le Bulletin de la SAHC : "l’inventeur, M. d’Auteville, n’est pas le propriétaire, M. le Comte de Roffignac. Il y a donc là deux noms, sujets à l’oubli et à des mutations. A distance et avec le temps, un nom n’évoque plus aucun souvenir, et le trésor pourra passer par plusieurs mains avant d’être installé dans un musée, où est sa vraie place pour l’instruction et l’admiration de tous". Réalisme ?

En 1908, le triptyque est dans un musée de Glasgow (Ecosse). Le compte-rendu de la réunion de la SAHC du 9 décembre 1908 indique : "M. GEORGE donne lecture d’une lettre relative au trésor trouvé à Cherves-de-Cognac, et étudié dans notre bulletin de 1897 par Mgr X. Barbier de Montault. Ce trésor comprenait un assez grand nombre d’objets, et notamment un triptyque d’une très grande valeur. De cette lettre, en date du 23 novembre dernier, qui lui a été adressée par M. le Conservateur général des Galeries des Arts et des Musées de Glasgow, il résulte que le triptyque est la propriété de M. Pierpont Morgan et qu’il est déposé dans ce dernier musée.". Il s’agit de John Pierpont Morgan père : (voir sa biographie), banquier américain collectionneur.

En 1917, la plus belle pièce, le triptyque, est donnée au Metropolitan Museum de New-York par John Pierpont Morgan junior, fils du précédent. (voir sa biographie). Elle y est actuellement. (Plusieurs images sur cette page).

La croix, très bel ouvrage en émaux sur cuivre, a été vendue en 1900 par Mr de Roffignac à Mr Félix Doisteau [1], qui en a fait don au Musée du Louvre en 1919. Il figure à l’inventaire de ce Musée sous la référence Inv. OA 1784.

Induit en erreur par la légende erronée d’une publication sur les émaux de Limoges, j’avais indiqué ici que cette croix était détenue par le Musée d’Art Ackland, Université de Caroline du Nord, à Chapel Hill. Voir cet objet sur ce site. Je prie les lecteurs de cette page de m’excuser pour cette confusion involontaire entre ces deux objets qui ont de nombreux points communs.

L’envol de l’archange Saint Michel


Dans la description du triptyque en 1897, Mgr Barbier de Montault écrit : "La plaque du fond représente la crucifixion : en haut, l’archange saint Michel, les ailes volantes et les bras ouverts, comme pour accueillir l’âme du Christ". Il est bien visible sur les photos de 1897.

On peut observer que cet archange (dimension : env. 8 cm de hauteur) a disparu du triptyque présenté au Metropolitan Museum. On distingue sur la photo du Musée la trace de son emplacement originel. On ne sait pas vers quelle destination son envol l’a emporté.

J’ai adressé aux conservateurs des Musées de Glasgow et de New York un courrier pour en savoir plus. (voir ces courriers)

Un parcours international qui rappelle celui qu’ont connu, à la même époque, les découvertes faites au cimetière des Francs à Herpes

M. d’Auteville raconte ainsi l’invention dans une note qu’il a bien voulu rédiger à ma demande :
« La découverte a eu lieu, le 11 décembre 1896, dans un endroit appelé Plumejeau., dépendant de la terre du Château-Chesnel, commune de Cherves, arrondissement de Cognac (Charente). Elle a été faite par un journalier, occupé au travail de défrichement, dans un pré en pente. Les objets ont été trouvés à trente centimètres environ de profondeur. Les deux volets du triptyque étaient côte à côte et à plat ; le panneau de la descente de croix, dans la même position, avait les figures en dessous. Les autres objets étaient groupés au milieu.

« Nulle trace de maçonnerie, constituant un caveau ou cachette. Une terre, de nature différente, plus argileuse que celle du terrain, semble avoir été rapportée, dans le but d’isoler le trésor pour mieux le conserver.

« L’emplacement très réduit (1m sur 1m50) forme un parallélogramme, avec vestige de murailles autour, mais ces fondations ont si peu d’importance qu’elles n’ont pas dû supporter des murs d’une certaine élévation, encore moins des murs de défense : on dirait plutôt une clôture de jardin.

« D’après la tradition, il y aurait eu, à cet endroit, un château-fort, appartenant à la famille de Chesnel, puissante dans le pays. Le château du seigneur de Plumejeau aurait été pillé et brûlé par les protestants. Un engagement a certainement eu lieu, à 500 mètres de distance, au pont Saint-Sulpice, entre les huguenots battant en retraite après la bataille de Jarnac (1569) et les troupes royales qui les poursuivaient (Bull, de la Soc. arch. de la Charente, 1895, La Campagne de 1569).

« Le seigneur de Chesnel, pour remplacer son château détruit, aurait fait construire (1610) le château actuel, à peu de distance de l’ancien, sur les terres d’un petit domaine qu’il acquit dans ce but et où s’élevaient déjà une modeste construction et une fuie datée de 1547 ».

De cette note, je déduis ces trois faits : qu’à Plumejeau existait un château seigneurial ; que le trésor fut déposé dans son enceinte au milieu de charbons, indiquant un incendie ; qu’il a pu appartenir à la chapelle castrale, ce qui expliquerait comment il s’est conservé si longtemps sans subir l’influence de la mode qui renouvelle tout. En soi, la chose n’est pas absolument impossible, quoique moins vraisemblable ; si j’étais plus sûr du fait, je n’hésiterais plus à l’appeler trésor de Plumejeau [2].

Sur mes instances, M. d’Auteville a procédé à de nouvelles fouilles, mais elles n’ont amené aucune constatation notable, sinon la présence du charbon et de quelques débris de verre [3]. Nous avons donc le trésor dans son intégrité, tel qu’il a été confié à la terre.

La découverte est capitale sous un double aspect : archéologie et liturgie.

L’œuvre de Limoges jouit dans le monde entier d’une légitime réputation. Ses produits sont partout et nombreux : mon savant ami M. Rupin en a dressé la liste fort longue et à peu près complète. Mais ils peuvent se répartir en trois catégories distinctes : les grandes pièces, qui sont loin d’être communes ; les pièces moyennes, qui se rencontrent encore en abondance et les petites, qui sont légion.

La première catégorie compte à peine une dizaine de pièces, connues, classées et cotées, parce qu’elles offrent un mérite exceptionnel. Le triptyque de Cherves se placera désormais au premier rang : il a pour lui sa conservation parfaite, la beauté de son style et le charme de sa décoration émaillée, sans omettre son iconographie sculpturale.

Le reste du trésor se répartit dans les autres séries : la plaque de châsse, le crucifix et le canistrum sont des pièces de second ordre, et quoique les fragments de croix appartiennent à la production courante, plus industrielle qu’esthétique, on aurait tort de les dédaigner, car ils forment un appoint aux œuvres similaires dont nos provinces de l’Ouest ne sont guère pourvues.


Les courriers échangés avec les Musées de Glasgow et de New York

- 1 - Au conservateur du Musée de Glasgow

Courrier envoyé le 11/10/2007

Subject : About the "Tabernacle of Cherves" exhibited in Glasgow Museum in 1907

For the attention of Mr the Curator of the Museum of Glasgow

In 1896, the Tabernacle of Cherves, has been discovered at Cherves (Department of Charente, France). The first owner was Mr de Roffignac.

In 1907, the owner was Mr Pierpont Morgan, and the Tabernacle was exhibited in the Museum of Glasgow

In 1917, Mr Pierpont Morgan has given the Tabernacle to the Metropolitan Museum of New York, where it is today

We are interested by a detail about this masterpiece :

In 1896, at the top of the internal plate of the Tabernacle, there was an angel (archangel St Michael) of gilded copper - height ab. 3 in. or 8 cm.

In 2007, this angel has disappeared out of this object and the marks of its former place are visible on recent pictures

We should be interested to know if your museum has kept ancient pictures of this masterpiece, and know if the archangel Saint Michael was present on this masterpiece in 1907, when it was exhibited in your Museum.

Thank you for your answer.

Sincerely yours

Signature

------------------------------------------------------------------------

The Tabernacle of Cherves
ca. 1220–1230, French ; Made in Limoges
Gilded copper and champlevé enamel ; 30 11/16 x 18 1/8 x 9 13/16 in. (78 x 46 x 25 cm)

Gift of J. Pierpont Morgan, 1917 (17.190.735) to the Metropolitan Museum of New-York

-------------------------------------------------------------------------

about the discovery of the Tabernacle, and pictures of 1896 : http://www.histoirepassion.eu/spip....

about the Tabernacle, today :

http://www.metmuseum.org/toah/ho/07...

éponse reçue le 16/10/2007

Dear Mr Collenot,

Thank you for contacting the Glasgow Museums website.

I am afraid our records do not go back as far as 1907 in any detail, and we don’t have any photographs of the exhibitions that took place at that time.

Our annual report for 1907 (not available to us at the moment) may refer to the exhibition in which Mr Pierpont Morgan’s object was included, but there is little likelihood of there being any more detail. We certainly don’t have the missing piece in our collection.

I am sorry we are not able to be more helpful. Good luck with your further investigations.

Yours sincerely,

Hugh Stevenson

Curator of British Art Culture and Sport Glasgow

Kelvingrove Art Gallery and Museum

Argyle Street

- 2 - Au conservateur du Metropolitan Museum de New York.

For the attention of Mr the Curator of the Metropolitan Museum of New York

In 1896, the Tabernacle of Cherves, has been discovered at Cherves (Department of Charente, France). The first owner was Mr de Roffignac.

In 1907, the owner was Mr Pierpont Morgan, and the Tabernacle was exhibited in the Museum of Glasgow

In 1917, Mr Pierpont Morgan has given the Tabernacle to the Metropolitan Museum of New York, where it is today

We are interested by a detail about this masterpiece :

In 1896, at the top of the internal plate of the Tabernacle, there was an angel (archangel St Michael) of gilded copper - height ab. 3 in. or 8 cm.

In 2007, this angel has disappeared out of this object and the marks of its former place are visible on recent pictures

We should be interested to know if your museum has kept ancient pictures of this masterpiece, and know if the archangel Saint Michael was present on this masterpiece in 1917, when it was given to your Museum.

Thank you for your answer.

Sincerely yours

Signature

id.


Les 24 images présentées ci-dessous proviennent d’une annexe au bulletin de la SAHC de 1897. Ce sont des photos en noir & blanc de l’époque (clichés par Pierre Dujardin, à Angoulême). Les annexes, fournies aux adhérents de la SAHC, étaient diffusées à environ 400 exemplaires.

Les légendes des images sont celles qui ont été données par Mgr X. Barbier de Montault en 1897.
Le "canistrum" est aujourd’hui considéré par les spécialistes comme étant plus probablement la pièce inférieure d’un encensoir.

Diaporama

Mode d’emploi
- 1- Cliquer sur une vignette, pour afficher l’image agrandie.
- 2- Diaporama : ouvrir la première image. Clic sur le mot "Diaporama"

Portfolio


[1Dans les années 1870, Félix DOISTEAU, industriel, crée à Pantin la plus grande usine de rectification d’alcool d’Europe. Pris de passion pour les oeuvres d’art des XVIIème et XVIIIème siècles, il commença une grande collection. Dans le but de se faire l’oeil sur ce qui le motivait, il parcourut le monde pour découvrir les merveilles des plus beaux musées.

Ainsi, il constitua une grande et magnifique collection de meubles, objets d’art, tableaux, dessins, orfèvrerie provenant principalement des plus grands antiquaires et des importantes ventes aux enchères de l’époque. Son fils, Paul, ne s’intéressant absolument pas à cela, Félix fît des dons innombrables aux musées du Louvre, Carnavalet et Arts Décoratifs, notamment, une merveilleuse collection de boîtes en or, de miniatures, de faïences de Rouen et d’orfèvrerie.

[2Les croix me font rejeter cette attribution, car deux supposent un clergé plus ou moins nombreux et trois des fonctions solennelles ; la croix mortuaire n’aurait pas eu d’emploi, puisqu’il n’y avait pas là de paroisse.

[3J’ai fait procéder à de nouvelles fouilles, qui ne m’ont procuré rien d’intéressant. Elles m’ont convaincu de l’absence de toute autre pièce à l’endroit de la découverte et dans un rayon rapproché. Je n’ai aucun indice pour découvrir une autre cachette. — C’est bien à l’angle des fondations de deux murs, de 60 à 70 centimètres d’épaisseur, que les objets se trouvaient. A cette place précise, il y a même une lacune dans la fondation, comme si la cachette avait été dans le mur et constituée par la solution de continuité. — Le terrain m’a offert une infinité de petits morceaux de charbon de bois, j’ai également recueilli des morceaux de verre fondu. Ces remarques donneraient corps à la légende d’après laquelle le château de Plumejeau aurait été brûlé » (Lettre du 16 avril 1897).
Je mentionnerai en outre trois objets indépendants du trésor : un fragment de serpe, en fer très rouillé, long de dix centimètres et large de trois, qui a pu servir à tailler la vigne, comme on le voit dans les miniatures des manuscrits ; un silex ovale, de quatre centimètres et demi sur trois et demi, plat dessous et à arête par dessus, employé à battre le briquet ; deux fragments de pots à rebord, en terre blanche et fine, l’un noirci à la fumée et mat à l’intérieur, l’autre, enduit à l’intérieur d’un vernis vert et brillant.

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